Si le tribunal de commerce n’a pas encore trouvé de motif d’alarme, les prévisions économiques pessimistes pour 2025 incitent à l’action.
Au niveau national, l’annonce de plusieurs plans sociaux a suscité une vive émotion. Le Gard n’est pas épargné par les suppressions d’emplois, notamment chez Solvay (Salindres) ou chez Royal Canin (Aimargues). « On constate par exemple une augmentation de 25 % des faillites d’entreprises au tribunal de commerce de Caen. Il n’y a aucune raison pour que cela ne touche pas le Gard à un moment donné. Les entrepreneurs gardois ne vont pas bien, certains pensent au suicidea indiqué cette semaine un expert de ce type de dossiers.
Le président du tribunal de commerce de Nîmes, Jean-Marie Albouy, ne veut pas tomber dans l’alarmisme même s’il voit que les choses vont se durcir l’année prochaine. Il s’en remet pour l’instant à ses chiffres : « Si je compare la période d’octobre 2019 (avant la crise du Covid) à celle de 2024, je décompte 508 procédures collectives, dépôts de bilan, contre 520 aujourd’hui. Si l’on regarde les différents secteurs d’activité : sur 119 procédures de redressement judiciaire, soit des entreprises encore en vie, le bâtiment représente 24,37% du total des dossiers, le commerce 43%, la restauration 10,92% et le service 13,45%.
Légère hausse des liquidations judiciaires
Pour les liquidations judiciaires, 401 cette année, le nombre est légèrement supérieur à celui de 2019 (378 procédures). Près de 29 % des dossiers concernent le bâtiment, plus de 39 % le commerce, un peu plus de 11 % pour la restauration et plus de 17 % le service. « C’est quasiment la même chose qu’en 2019. Ce qui change par rapport à il y a cinq ans. Le passif avant ouverture s’élevait à 55 millions d’euros, aujourd’hui, nous sommes à 100 millions d’euros. Les gens viennent nous voir avec des dettes, ce qui me fait peur c’est qu’il y a souvent des garanties personnelles. Les gens sont garants de leurs dettes.
92% des TPE (moins de cinq salariés) génèrent 73% du passif, “71 millions d’euros de dettes à l’ouverture, ce qui fait que le montant du passif sera multiplié par trois par la suite.” Jean-Marie Albouy souhaite sensibiliser les chefs d’entreprise du Gard pour éviter les situations catastrophiques : “Il faut les mettre autour d’une table, les faire venir à nous.”
Une veille pour les TPE
C’est ce que compte mettre en place le président du tribunal de commerce de Nîmes, qui partira fin janvier 2025, avec le président de la CCI du Gard Éric Giraudier. Une démarche d’accompagnement, pour être aux côtés des entreprises au début de l’année prochaine où la situation va probablement se dégrader. Une action de veille auprès des TPE qui permettra à Jean-Marie Albouy, récemment membre associé de la CCI, d’apporter son expertise pour mener à bien la prévention. “On nous dit qu’en 2025, il fera chaud et qu’on sera prêts !”indique le président du tribunal de commerce.
Interrogé, le président de la CCI du Gard a évoqué le principe de ce suivi lors d’une assemblée générale : « Celle-ci sera soumise au bureau de la Chambre Consulaire le 9 décembre puis à l’Assemblée Générale une semaine plus tard. Quand il y a des moments difficiles, le meilleur interlocuteur reste la CCI qui est dirigée par des chefs d’entreprise impliqués, proactifs.
Jean-Marie Albouy estime que cette action sera d’autant plus nécessaire que la situation va particulièrement basculer sur le plan social et économique : « On nous dit qu’il y a 3 000 milliards de dettes mais la première chose qu’ils veulent faire, c’est augmenter les impôts ! Que manque-t-il aujourd’hui pour que cela fonctionne ? De l’argent pour donner de l’argent aux entreprises ! Comment veut-on créer de la richesse en donnant moins aux gens, pour qu’il y ait du réinvestissement ?
L’inquiétude concerne également les futurs marchés publics si les autorités locales disposent de moins de ressources pour faire fonctionner l’économie locale. Une chose est sûre, cette période d’instabilité et de flou a de quoi vous donner des sueurs froides sans vraiment en connaître les répercussions.
Eric Giraudier veut « apporter des solutions »
Le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Gard Éric Giraudier, qui se prépare l’année prochaine à aider davantage les entreprises en difficulté, indique que le premier semestre avait été bon pour l’économie gardoise avant la dissolution de l’Assemblée nationale.
« Depuis, il y a un manque de visibilité et de stabilité et cela inquiète les chefs d’entreprise. Nous avons une réelle inquiétude si nous voulons ajouter des impôts aux entreprises. Tout cela pèse sur les dirigeants et le personnel. (…) De nombreuses entreprises qui avaient le feu vert sont devenues rouges, notamment dans le secteur de la construction et l’on s’inquiète pour 2025. (…) Nous sommes encore le seul pays d’Europe à connaître une grande instabilité, d’où une perte de confiance.»
Le président de la CCI indique qu’en cas de problème, les entreprises du Gard se tournent vers la chambre consulaire, d’où l’initiative début 2025 dans le Gard qui va aider les TPE : “Nous allons les amener à la solution.”
Éric Giraudier précise qu’il fera tout son possible, avec les élus du Gard, pour défendre les entreprises du territoire, pour les accompagner dans leurs difficultés, en prévision des turbulences qui pourraient bien toucher bon nombre de secteurs d’activité en France. Et le Gard ne devrait pas y échapper.