La CGT appelle à la grève le 12 décembre. Le syndicat tire la sonnette d’alarme face aux plans sociaux qui se multiplient depuis septembre 2023. 286 ont été recensés, soit environ 200 000 emplois qui seraient menacés. Quelles conséquences ? Nous en avons parlé avec notre invité ce matin dans Le Grand-Réveil.
Son n°1 – Fermeture d’industries dans le Bas-Rhin : la faute à la voiture électrique ?
Laurent Feisthauer, secrétaire général CGT du Bas-Rhin
On parle de 286 PSE, plan de licenciement, selon vous, qu’est-ce qui explique ces chiffres ?
Ces chiffres s’expliquent d’une part par la situation d’un des secteurs industriels, pas forcément en France, mais aussi en Allemagne et ailleurs en Europe, c’est l’automobile qui est en crise avec le passage des voitures thermiques à l’électrique. voiture qui ne se passe pas forcément bien. On a des aides qui ont été distribuées par l’Etat et qui s’arrêtent et du coup les constructeurs ne savent plus trop sur quel pied danser et on se retrouve avec des entreprises en difficulté, des sous-traitants en difficulté et on a ce résultat là.
Dans le Bas-Rhin, 10 entreprises sont concernées. Flabeg à Sarrewerden, Cadie à Dettwiller, Dumarey à Strasbourg pour ne citer qu’eux. Environ 1.500 emplois sont menacés. À quels problèmes ces entreprises sont-elles confrontées ?
Dumarey, Novares… ce sont des sous-traitants automobiles. Dumarey fabrique des boîtes de vitesses, des Novares, des sièges d’automobile, ce sont des sous-traitants de deuxième ligne qui fabriquent pour les grandes entreprises. Dumarey fabrique pour ZF en Allemagne qui est le fournisseur de BMW, Stellantis et d’autres marques comme Audi. Sur les voitures thermiques, on constate une nette baisse des voitures vendues, ZF licencie 20 000 personnes en Allemagne donc cela se ressent évidemment chez Dumarey qui n’a plus ce contrat et qui représentait 90% de son activité.
L’État est-il fautif selon vous ?
L’État et les entreprises aussi. L’Etat est fautif car depuis des années on nous promet une transition écologique qui se fera en douceur, les emplois détruits dans le thermique seront compensés par de nouveaux emplois dans l’électricité, mais on ne le voit pas venir. Nous avons quelques entreprises qui s’implantent en Alsace comme Huawei qui va s’implanter à Brumath, mais ce ne sont pas les mêmes métiers. Ce ne sont pas des emplois industriels, ce sont souvent des emplois plus techniques et technologiques et ils sont beaucoup moins nombreux donc le delta n’est pas bon.
Est-ce que le changement de carrière est difficile ?
Surtout dans ces entreprises, ce sont des entreprises bien établies. A l’époque, c’était Clestra, Dumarey qu’on les soutenait, il n’y a pas si longtemps. L’âge moyen est de 54, 55 ans pour ces salariés, certains bénéficieront d’une retraite anticipée, mais pour beaucoup, ils ont 52 ou 53 ans, ce sera compliqué pour eux de reprendre et de se reconvertir dans un autre secteur.
Quelles sont les solutions pour stopper ce saignement ?
Ce que demande la CGT au niveau national, c’est un moratoire. C’est-à-dire que l’Etat joue son rôle une fois. On l’a déjà vu avec la loi Florange à l’époque qui devait nationaliser, un temps, certaines entreprises stratégiques pour éviter le dépôt de bilan et la fuite des compétences pour qu’on puisse trouver des repreneurs et ne pas se retrouver au pied du mur. Peut-être reconvertir ces industries. L’État pourrait jouer son rôle, ce qu’il ne fait pas. Nous menons en France une politique d’État libérale qui n’interfère pas avec l’activité industrielle et qui laisse filer nos fleurons, comme on l’a encore vu avec Doliprane. 125 entreprises stratégiques ont été vendues l’année dernière. Elles sont soit vendues, soit fermées lorsqu’elles ne sont pas suffisamment rentables.
Les mobilisations prévues sont-elles liées à ces plans sociaux ?
Nous avons Dumarey qui est en grève depuis plus de 10 jours. Là, malheureusement, le client principal ne commande plus donc il n’y a pas d’autre moyen que d’accepter la suppression d’emplois, mais ils se sont mis en grève pour obtenir les meilleures conditions de départ. Les Novares continuent de se battre pour leur emploi et nous avons une action prévue le 12 décembre à Metz pour interpeller également la Région, qui est également au centre des stratégies industrielles de la Grande Région. Un de ses axes financiers majeurs c’est la réindustrialisation donc on va les croire sur parole, on veut des informations concrètes sur les entreprises qui ferment et notamment tout ce qui touche à la métallurgie. A Reims, vous avez ArcelorMittal, vous avez le secteur automobile dans les Ardennes, il y a toute une série d’entreprises qui sont en difficulté dans l’industrie.