Des études récentes ont démontré, grâce au séquençage génétique, que les dauphins rayés du Golfe possèdent des caractéristiques génétiques uniques que l’on ne retrouve nulle part ailleurs en Méditerranée. Cela suggère que les dauphins que nous voyons aujourd’hui sont probablement les descendants de ceux présents dans la Grèce antique.
“Tarente fait partie de l’ADN de ces dauphins”, explique Cristiana De Leonardis, biologiste marine à Jonian Dolphin Conservation.
Après plus d’une décennie de surveillance du golfe de Tarente, les chercheurs ont identifié six espèces de cétacés : les dauphins à long bec, qui représentent la plus grande population, estimée à environ 20 000 individus ; les grands dauphins, les dauphins communs à bec court, les dauphins de Risso et la baleine de Cuvier. Les cachalots utilisent cette zone comme nurserie et les chercheurs ont parfois aperçu des rorquals communs.
Depuis le début de la surveillance il y a quinze ans, la population de dauphins est restée stable et la clé de leur survie est probablement cachée à des milliers de kilomètres sous la surface de l’océan.
Sur quelques kilomètres le long de la côte de Tarente, entre les Pouilles et la Calabre, un canyon sous-marin appelé le Vallée de Tarente atteint près de deux kilomètres de profondeur. Le canyon est un habitat actif pour les céphalopodes, dont se nourrissent les cachalots. Ses pentes abruptes mélangent des eaux de surface chaudes avec des eaux froides plus profondes et riches en nutriments, stimulant ainsi la production de phytoplancton à la base de la chaîne alimentaire.
Dans un écosystème bien équilibré, le phytoplancton assure la survie d’un large éventail de créatures marines telles que les crevettes, les mollusques et les méduses, qui nourrissent les poissons dont se nourrissent les dauphins. Étant donné que les scientifiques n’ont commencé à surveiller les dauphins de Tarente que très récemment, il est difficile de savoir dans quelle mesure l’activité humaine a mis en cause leur survie au cours des siècles où les deux espèces ont vécu côte à côte. Mais les scientifiques pensent que la géographie unique du canyon fournit une source de nourriture stable qui aide la population de dauphins à s’adapter aux conditions stressantes telles que la pollution et les bateaux.
Environ la moitié des dauphins et des baleines de la Méditerranée sont menacés d’extinction, faisant du golfe de cette ville industrielle un paradis marin.
La ville côtière italienne veut faire en sorte que ses eaux restent un sanctuaire pour ces habitants maritimes.
Le long de la côte de la ville, les dauphins sont confrontés à des menaces croissantes : bateaux, pollution sonore, pêche et hausse de la température de l’eau de mer. La marine italienne y a sa plus grande base, qui occupe des kilomètres de côte. C’est le site d’un centre de commandement de l’OTAN et le port commercial de la ville est en pleine expansion. La première installation éolienne offshore d’Italie a été inaugurée en 2022 et, le long de la côte nord de la ville, la société énergétique Eni possède une grande usine de raffinage de pétrole.
Selon des études, la pollution sonore sous-marine provoquée par ces activités présente un risque pour les mammifères marins tels que les dauphins. Les dauphins utilisent le son pour communiquer entre eux, nager et trouver de la nourriture. Le bruit sous-marin généré par le trafic maritime et l’industrie perturbe leurs comportements essentiels.
Ce qui est encore moins clair, c’est la façon dont la pollution de l’air provenant de la plus grande usine sidérurgique d’Europe, propriété d’ILVA, peut affecter les dauphins. Carlucci estime qu’« il est presque impossible que la pollution générée le long de la côte n’ait pas d’impact » sur le milieu marin et ses créatures. Mais déterminer la corrélation directe entre la pollution industrielle et les impacts spécifiques sur les populations de dauphins nécessite davantage de recherches.
