“Quand ça marche, c’est génial”

« Ici, c’est bon, c’est bio. » Le panneau d’accueil à l’entrée de la ferme Verdier, à Saint-Astier en Dordogne, n’a pas changé. Elle évoque toujours le nom de Françoise David, l’ancienne propriétaire des lieux achetés par Kevin Berthelot, 33 ans, en décembre 2023. Tout un symbole. L’histoire d’une vie dédiée au maraîchage biologique, passée sous serres et dans les champs, qui en accueille désormais une nouvelle dans la même lignée agroécologique.

L’impensable

Kevin a pu réaliser « l’impensable », à savoir le rachat de l’exploitation de 13 hectares de Françoise, une des pionnières de la conversion bio en Dordogne. Non seulement l’acquisition de bâtiments privés, mais aussi le terrain, le matériel, 6 000 m² de serres et les avances de cultures (tous stocks de semences). « Je n’avais qu’un apport personnel, qui servait à financer la partie privée, aucun apport professionnel. Le projet total s’élève à 560 000 euros, dont 150 000 pour le terrain », explique le maraîcher.

C’est là qu’intervient Fermes en vie (FEVE), qui s’appuie sur l’épargne citoyenne sociale et solidaire (ci-contre). La foncière bordelaise, qui a financé il y a trois ans l’une de ses premières fermes à Cussac en Dordogne, n’hésite pas à apporter son soutien. Le maraîcher coche toutes les cases : un projet sérieux, économiquement viable, conforme à la charte agroécologique de la société foncière.

Epaulé par un conseiller de la Chambre d’Agriculture de Dordogne, il a obtenu des prêts plus classiques auprès du Crédit Agricole pour les serres et le matériel, et un prêt à taux bonifié sur la plateforme de financement participatif Miimosa pour le reste. Particularité de la FEVE ? Faites-en un locataire de son propre terrain avec option d’achat. « J’ai un bail agricole de 25 ans, ce qui est assez protecteur. C’est assez pratique et flexible. Je peux racheter quand je veux. Si je fais ce métier pendant 25 ans, ce ne sera pas mal », sourit l’ancien chercheur postdoctoral.


Kevin Berthelot, parmi les poireaux clairsemés, qui ont souffert des derniers aléas climatiques.

Stéphane Klein / SO

Auteur d’une thèse en 2016 sur la communication chimique des fourmis, entre reines et ouvrières, il a choisi de se reconvertir vers le maraîchage à son retour des Etats-Unis en 2020. « J’ai quitté la recherche par commodité. Je pense que c’est moi qui ne correspond pas à la recherche. On ne valorise que 5 % de ce qu’on fait, alors que je voulais quelque chose de plus concret », explique l’intéressé. A son retour des Etats-Unis, il se forme pendant deux ans au maraîchage en Normandie en tant que maraîcher. Parallèlement, il obtient un BTS en agriculture, car, dit-il, il « a toujours besoin d’une formation théorique ».

L’envie d’aller plus au sud, chez ce toulousain d’origine, et l’installation professionnelle de sa compagne en Dordogne, l’amènent à Saint-Astier, sur les terres de « Madame David ». Il a été embauché pour la première fois comme salarié, en 2022, en même temps que trois autres personnes. « Elle avait 63-64 ans et souhaitait prendre sa retraite depuis trois ou quatre ans », raconte Kevin, séduit par l’idée de la transmission. Lentement mais sûrement, la graine grandit.


Kevin Bertherlot exploite 6 000 m² de serres où poussent une gamme complète de variétés de légumes.

Stéphane Klein / SO

Deux ans plus tard, les mains et les pieds sur terre, il ne regrette pas un seul instant son geste. Il passe la moitié de ses journées à récolter et conditionner des légumes (une énorme production de salades), avec les trois employés qu’il a gardés. L’après-midi est consacré à l’installation et à l’entretien des cultures, sans compter « la partie administrative importante ».


La ferme Verdier produit un très grand nombre de salades (ici la serre qui abrite les plants livrés par un pépiniériste).

Stéphane Klein / SO

Pas de problème quand on exploite 6 à 7 hectares en moyenne, et qu’on cultive sous serre des milliers de plants de tomates et autres légumes très variés. Les journées commencent tôt, voire plus tôt en été pour résister aux fortes chaleurs, et se terminent tard. « Encore un peu en sous-effectif pour ce que nous avons à faire », n’édulcore pas le maraîcher.

Tièdes, les dernières tomates de la saison finissent de virer au rouge, aux côtés des patates douces.


Tièdes, les dernières tomates de la saison finissent de virer au rouge, aux côtés des patates douces.

Stéphane Klein / SO

Des caisses de patates douces, à l'abri de la pluie et du froid, sont proposées pour diverses ventes.


Des caisses de patates douces, à l’abri de la pluie et du froid, sont proposées pour diverses ventes.

Stéphane Klein / SO

Un agriculteur pourtant heureux d’avoir trouvé « un métier passionnant ». « Quand ça marche, c’est génial », s’enthousiasme celui qui marche dans les pas de Françoise David, petite-fille de maraîcher. Il a pu bénéficier d’un stage de parrainage à ses côtés. Pour elle, ce relais rime avec satisfaction. « Même si ce ne sont pas mes enfants qui prennent la relève, c’est vraiment bien. Pouvoir passer le relais est l’aboutissement d’une vie de travail. Tout cela n’est pas perdu, et en plus, j’ai la satisfaction de savoir qu’il n’y aura pas de culture industrielle », ajoute Françoise David.

Dans ces démarches, Kevin continue la vente directe à la ferme, deux marchés hebdomadaires à Périgueux et Saint-Astier, les livraisons quotidiennes chez un magasin de producteurs et sur la plateforme de restauration collective Manger bio en Périgord.

 
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