Franchement, la tournée sud-américaine d’Emmanuel Macron dépasse nos attentes. Avant-hier, nous écrivions ici : « Emmanuel Macron, c’est un peu l’OSS 117 en Rio ne répond plus. ” Un peu ? L’incident haïtien nous oblige à revoir notre bilan : Emmanuel Macron est carrément OSS 117. C’est très simple, il n’en rate pas un seul.
Notre président en liberté…
L’incident haïtien ? Cela fait le tour des réseaux sociaux, et désormais, du monde entier car, c’est bien connu, le succès engendre le succès. En marge du G20, en manches de chemise, notre Président déambulant dans les rues de Rio (on ne sait pas s’il a oublié de « monter là-haut », comme le chantait autrefois l’inoubliable Dario Moreno) est vivement interpellé par un Haïtien. Il lui reproche, ainsi qu’à la France, « être responsable de la situation en Haïti ».
La situation en Haïti ? Les crises politiques, sociales, économiques, sécuritaires et humanitaires accablent ce malheureux pays des Caraïbes. Port-au-Prince, sa capitale, est contrôlée à 80 % par des gangs. D’ailleurs, récemment, le site officiel de notre ministère de l’Europe et des Affaires étrangères soulignait notamment le risque élevé d’enlèvement et déconseillait aux nationaux de se rendre dans ce pays. Bref, le chaos. En mai dernier, le Conseil présidentiel de transition, organe collégial constitué en avril, a désigné le docteur Garry Conille, qui avait été Premier ministre pendant un semestre en 2011-2012, comme chef du gouvernement. Mais le 10 novembre, ce même Conseil présidentiel de transition l’a démis de ses fonctions. Pour quoi ? Là n’est pas la question, et revenons à Rio.
Notre président en roue libre…
Que dit OSS 117 à cet Haïtien ? ” Là-bas, franchement, ce sont les Haïtiens qui ont tué Haïti, laissant derrière eux le trafic de drogue. Et là, ce qu’ils ont fait, le Premier ministre a été génial, je l’ai défendu, ils l’ont viré ! » D’ici là, rien – ou presque rien – à dire. Passons au côté « sauveur du monde » qui plante tout ce qu’il touche : « Je l’ai défendu, ils l’ont viré. » Passons au langage de la rue : « Le Premier ministre a été formidable. » Après tout, nous sommes dans la rue. C’est d’ailleurs dans la rue que Macron est à son meilleur. On se souvient de son fameux « Il suffit de traverser la rue » pour trouver du travail, adressé à ces jeunes Français. C’est alors que les choses se gâtent vraiment : « C’est terrible. C’est terrible. Et je ne peux pas le remplacer. Ce sont des idiots complets, ils n’auraient jamais dû le sortir, le Premier ministre a été génial. » En roue libre, Manu. Evidemment, la scène n’était sans doute pas destinée à être filmée, mais vous savez comment c’est aujourd’hui, à l’ère des réseaux sociaux et tout ça…
Et une petite crise diplomatique, une !
L’art de provoquer à moindre coût une petite crise diplomatique en coulisses. Protestation de l’ambassadeur haïtien auprès de l’incroyable Jean-Noël Barrot, brillant successeur de Stéphane Séjourné au Quai d’Orsay. Convocation de notre ambassadeur de France à Port-au-Prince. Classique. Heureusement, Haïti n’est pas la Russie. Comment dire ? Nous avons eu une sorte d’intuition. Que ce voyage de Macron aux Amériques relèguerait celui du général de Gaulle, il y a soixante ans, au rang d’une jolie croisière pour préretraités. Qu’il trouverait un moyen de nous surprendre. Il faut admettre qu’avec lui, on n’est jamais déçu.
« Et comment appelle-t-on un pays qui a pour président un militaire doté des pleins pouvoirs, une police secrète, une chaîne de télévision unique et dont toute l’information est contrôlée par l’Etat ? – Je l’appelle la France, Mademoiselle, et pas n’importe quelle France : la France du général de Gaulle », a répondu OSS 117, en Rio ne répond plus. Et comment appelle-t-on un pays qui a pour président un homme qui dit des conneries – Oh, alors flûte, puisque le mot est désormais élyséen – des conneries ? Je l’appelle la France, Mademoiselle, et pas n’importe quelle France : la France d’Emmanuel Macron.
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