« Le Pape est plus imprévisible que (Donald) Atoutquand il met le clignotant à gauche, c’est généralement pour tourner à droite”, décrit un bon observateur.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la communication concernant le voyage papal en Corse a été hésitante. En godille, on serait tenté d’écrire en ces temps de contemplation des belles trajectoires des skippers du Vendée Globe, actuellement au large des Canaries, où certains imaginent aussi un voyage de François en 2025. Mais un projet de voyage à la fois.
Au moment où vous lisez ces lignes, le voyage du Pape à Ajaccio pourrait être officialisé. En fin de semaine dernière, deux sources de bonne qualité nous l’ont confirmé samedi 16 novembre. Deux autres, d’égale fiabilité, faisaient plutôt référence au début de la semaine du 18. Récemment, de nombreux médias français ont indiqué un “annonce imminente”, “dans les prochaines heures”, ” demain “, “dans les jours à venir”…
Ces variations ont une cause plus fondamentale que le manque de sources ou leur recoupement. En 2013, François a été élu pape avec pour mandat clair de rétablir l’ordre dans une Curie affaiblie par les scandales. Le pape argentin l’a en partie réformé, mais a surtout instauré une pratique du pouvoir très personnelle consistant très régulièrement et largement à contourner sa propre administration. Sous François, un “Source Vaticane”même si elle « haute »n’est pas toujours « bien informé ».
Héritage
« Ce voyage en Corse est-il vrai ? “, Un poids lourd de l’épiscopat français aurait interrogé un représentant des services diplomatiques du Vatican en octobre. Ce membre de la Secrétairerie d’État du Saint-Siège, notamment chargé des relations avec les États, aurait ainsi entendu parler de ce projet de visiter l’île méditerranéenne pour la première fois.
En septembre, une Source comparable confiait dans l’avion ramenant le Pape de son long voyage en Asie : « Cet été, je vous aurais dit qu’il était peu probable que le Pape vienne à Notre-Dame, mais maintenant je ne sais pas… Peut-être. » C’était quelques jours après la publication d’un article annonçant le pape lors de l’inauguration de la cathédrale, le 8 décembre, selon la Source « prélat influent du Vatican ». Il s’est également écoulé quinze minutes avant que François ne déclare lors d’une conférence de presse : «Je n’irai pas à Paris, je n’irai pas à Paris. »
L’étude d’un éventuel voyage en Corse a été menée dans le plus grand secret au Vatican, en contact direct avec le diocèse d’Ajaccio. Une partie de la Secrétairerie d’État, la Conférence des évêques de France, l’Élysée et l’ambassade de France près le Saint-Siège n’ont été informées que tardivement. Une invitation officielle, nécessaire avant d’imaginer le pape sur le sol français, a été demandée début novembre à l’Élysée, qui l’aurait envoyée. Une délégation du Vatican s’est rendue à Ajaccio ces derniers jours pour organiser les détails techniques.
Ce compartimentage de l’information reste à interpréter. Et les « sources vaticanes » sont divisées sur ce point. Faut-il voir François comme un grand joueur d’échecs, souhaitant rester libre dans ses choix vis-à-vis de la Curie ou de l’agenda d’un Emmanuel Macron politiquement fragilisé ? « Je crois plutôt que ce voyage en Corse était une décision sur un coup de tête, ou un coup de cœur, lié à son amitié avec (l’évêque d’Ajaccio François) Bustilloqu’il a créé cardinal», dit un proche du pape, qui le rencontre régulièrement. Cette hypothèse, moins politique, ne l’empêche pas de s’inquiéter : « A presque 88 ans et avec ce mode de fonctionnement, je crains que certains choix de François soient moins bien compris et qu’il porte atteinte à son héritage. » Là encore, qui sait ?