Au-delà de la vague bleue qui a déferlé sur les scrutins ce week-end dans le Lot-et-Garonne, c’est un torrent d’eau qui s’est abattu sur les champs, plus précisément dans le nord du département.
Près de Cancon, Monflanquin et Saint-Eutrope-de-Born, il est tombé jusqu’à 130 millimètres en deux heures samedi soir. « Nous avons lutté tout l’automne et tout l’hiver pour le blé… Nous avons tout perdu. Nous avons remis toute notre énergie à semer du tournesol, du soja et du maïs ces dernières semaines… J’ai fait un super travail. Juste après avoir déposé mon tracteur samedi, tout avait disparu en quelques heures. » Nicolas Magné, céréalier à Saint-Eutrope-de-Born, attendait la pluie pour irriguer ses graines tout juste enfouies dans la terre, « mais 20 millimètres auraient suffi. Pas 90…», souffle-t-il.
Au total, sur les 25 hectares de soja qu’il vient de semer, il espère en économiser sept ou huit. « Dans les plaines, où un mètre d’eau stagne depuis plusieurs heures, c’est aussi ruiné pour le maïs, les tournesols… »
Face à ce nouvel épisode climatique, les agriculteurs devront encore faire preuve de patience. « Par endroits, 50 centimètres de sol alluvionnaire devront sécher. Je ne pourrai pas de sitôt retourner aux champs avec mon tracteur pour recommencer à semer. » Et au-delà de la contingence climatique, il y a la question financière. « Les fournisseurs devront faire un effort. Et attendez que nous ayons de l’argent. Certains collègues ne parvenaient pas du tout à produire du blé. Cependant, les ventes de blé servent à payer les factures des semis de printemps. Il faudrait surtout qu’il arrête de pleuvoir… »
Hélas, la tendance n’est (encore) pas à la chaleur estivale. Jean-François Berthoumieu, président de l’Association climatique de Moyenne Garonne (ACMG), annonce un temps pluvieux pour encore quinze jours. La faute en est à l’air frais arrivant d’Islande et du Groenland. Selon le scientifique, il est désormais impératif de s’adapter à ces phénomènes de pluies torrentielles, localisées et concentrées.
« Il existe déjà quelques solutions pour y remédier, comme l’enherbement des cultures intermédiaires – les sols nus sont dangereux – mais aussi la création de lacs nouvelle génération en amont sur les coteaux, des fossés qui permettent à l’eau de s’infiltrer, la plantation de haies, etc. » Jean-François Berthoumieu réfléchit également à un labour horizontal, afin d’éviter que l’eau et la terre ne s’écoulent à grande vitesse vers les rivières. « Nous avons des coteaux qui s’y prêtent très bien. »