Un million pour un lampadaire Giacometti

Un million pour un lampadaire Giacometti

Publié aujourd’hui à 9h33

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Il s’agissait du lot numéro 30. Les passionnés avaient été enthousiasmés par quatre pages de catalogue. Devenu sculpture compte tenu de la popularité de l’artiste, le lampadaire modèle « Tête de femme, version étroite » d’Alberto Giacometti avait tout pour devenir non pas « l’objet invisible » de son auteur mais un objet hautement désirable. Elle fut exécutée en 1933 pour Henry Louis Mermod (1891-1962), homme de la Guilde du Livre à Lausanne. Le sculpteur travaille ensuite avec le décorateur Jean-Michel Frank (un cousin d’Anne). Une photo montre la lampe, alors équipée d’un abat-jour, dans la bibliothèque Mermod avec le fils et la petite-fille de l’éditeur. Aucun problème de traçabilité ici ! L’œuvre n’avait jamais quitté la famille avant d’arriver à Genève chez Piguet avec une jolie estimation située entre 200 000 et 300 000 francs.

Guéridon très contesté

La bataille attendue a eu lieu, avec des hésitations, des retards et des remords, Bernard Piguet devant jouer le rôle de sage-femme au marteau. Les enchères montaient, certes, mais lentement. Un demi-million a été atteint. Puis trois quarts. Les offres s’arrêtent à 800’000 francs. Une somme à laquelle il faudra bien sûr ajouter les fameuses « chutes », dont je vous parle souvent. L’acheteur, qui était pour une fois dans la chambre et non au téléphone, devra retirer de sa poche, de sa tirelire ou de son compte bancaire 25% supplémentaires plus un 8,1 sur ce supplément, soit un total de 27,1% . Nous atteignons ainsi largement le million. Il n’y a en effet pas de prix dégressifs à partir d’un certain prix chez Piguet. Mais il faut savoir que certaines maisons françaises ou internationales paient dans un premier temps 30 % côté acheteur et un pourcentage qui n’est pas toujours très clair côté vendeur. Ils peuvent donc s’offrir ce que les Britanniques appellent des « friandises sucrées ».

Avant cela, il y avait eu une bataille à moindre coût pour un guéridon néo-gothique qui aurait été créé sous la Restauration pour Sosthène de La Rochefoucauld, directeur des beaux-arts entre 1824 et 1830. Le prix ressemblait à un cadeau. Entre 15 000 et 25 000. Il y avait pourtant deux passionnés au bout de ce que je ne peux plus appeler la file. L’un semblait mieux armé que l’autre côté picaillon (ou argent, ou flouze ou ce que vous voulez). Il progressait avec des offres de 10 000 francs, tandis que l’autre avançait timidement avec 5 000. Le premier a bien sûr gagné. Il paiera 260 000 francs, plus les fameux impôts. L’œuvre me paraissait plus spectaculaire, mais moins à la mode que le lampadaire devenu sculpture en bronze.

Botero décevant

Sinon, ça s’est bien passé chez Piguet, dont la plupart des lots ont été vendus en ligne, puis seront vendus de gré à gré à partir de ce vendredi pour les invendus « après-vente ». Deux dessins de Jean-Marc Nattier représentant des filles de Louis XVLouis XV triplent l’estimation haute à 45 000 francs chacun. Un Degas très très inachevé s’est vendu 130 000 francs et non entre 50 000 et 80 000. Un surprenant Vallotton représentant l’escalier du Salut à Venise a quant à lui « fait » 85 000 francs au lieu de 40 000-60 000. Le grand dessin de Botero représentant une femme (énorme, comme il se doit) n’a pas dépassé l’estimation basse de 15 000. Et pour 3800, un amateur a pu repartir (1) avec un spectaculaire régulateur (pendule de parquet) étincelant de bronzes dorés d’époque Louis XV signé Balthazar Liautaud. Une chose incroyable. Tout n’atteint pas le million, Dieu merci !

(1) C’est une image, bien sûr. Ce meuble très haut doit s’avérer horriblement lourd.

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Né en 1948, Étienne Dumont étudié à Genève qui lui furent de peu d’utilité. Latin, grec, droit. Avocat raté, il se tourne vers le journalisme. Le plus souvent dans les sections culturelles, il travaille de mars 1974 à mai 2013 à la Tribune de Genève, commençant par parler de cinéma. Viennent ensuite les beaux-arts et les livres. A part ça, comme vous pouvez le constater, rien à signaler.Plus d’informations

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