Dans la ville centrale de l’enclave papale, le taux de pauvreté atteint 26%, soit six points de plus que la moyenne départementale. Dévasté par la fin de l’industrie du carton dans les années 90, Valréas veut aller de l’avant.
“J’ai envie de boire une tisane à la terrasse du bistro mais je ne vais pas y aller», dit Reine, maussade. A 81 ans, la retraitée ne s’autorise pas les excès. Derrière elle, la place Cardinal-Maury s’anime. Nous sommes mercredi matin à Valréas, jour de marché. A l’aube du mois de novembre, aucun nuage ne ternit le ciel bleu azur de Provence. Le soleil réchauffe les forains qui attendent les clients en se frottant les mains.
“Je vais juste prendre deux morceaux de paella, ma petite-fille vient déjeuner à midiajoute la dame habillée. Avec trois enfants, nous avons toujours été prudents. Aujourd’hui, c’est plus difficile. Mon mari est mort. Heureusement, je roule encore pour sortir un peu. Ici, sans voiture, on ne fait rien. Le jour où je n’en pourrai plus, je serai en prison.“
Avec Grillon, Richerenches et Visan, Valréas est une partie du Vaucluse dans la Drôme, enclave des Papes. On y accède uniquement par la route (la gare la plus proche est à Bollène, tout comme l’A7). Bordé de vignes et de lavande, ce territoire rural est attractif et préservé. Isolé, pauvre aussi. Comme Avignon, Cavaillon, Carpentras ou Apt, Valréas figure dans le top dix des communes les plus défavorisées du territoire.
Selon l’Insee, le revenu médian des habitants en 2021 est inférieur aux moyennes départementales et nationales : 18 900 € contre 21 370 € et 23 000 €. La ville compte cinq quartiers prioritaires et le taux de chômage (12 %) est près de deux fois supérieur à celui de la France. Au total, plus d’un quart des 9 000 Valréassiens vivent sous le seuil de pauvreté : 26 % exactement contre 19,9 % dans le Vaucluse et 15,3 % en France.
“J’économise de l’argent. La viande est une fois par semaine et j’ai dû vendre ma voiture», confie Djilali, 79 ans. L’ancien maçon et père de quatre enfants dispose d’une maigre pension. Avec moins de 700 euros par mois, il compte sur chaque euro.»L’essence et l’entretien étaient devenus trop chers. Maintenant, c’est ennuyeux de consulter un médecin. Parce qu’il n’y en a plus. Je vais à Orange ou Avignon en ambulance», soupire-t-il, un sachet de légumes frais à la main.