Émeutes, pillages, catastrophes climatiques… Vers un retrait des assureurs à l’étranger ?

Émeutes, pillages, catastrophes climatiques… Vers un retrait des assureurs à l’étranger ?
Émeutes, pillages, catastrophes climatiques… Vers un retrait des assureurs à l’étranger ?

Alors que les violences urbaines provoquent d’importants dégâts en Martinique et en Nouvelle-Calédonie, les compagnies d’assurance voient la facture s’alourdir. Certains menacent sans enthousiasme de quitter les territoires d’outre-mer, eux aussi en première ligne face au changement climatique dont les conséquences sont particulièrement difficiles à assurer.

« L’État doit trouver des solutions sinon, à terme, il n’y aura plus d’assureurs en Outre-mer » prévenu le Le 7 octobre dernier Jean-Laurent Granier, président de la compagnie d’assurances Generali. Son entreprise est présente en Nouvelle-Calédonie, où les dégâts causés par la crise débutée en mai dernier se chiffrent en milliards d’euros. Jean-Laurent Granier remet en cause l’État et son incapacité à maintenir l’ordre.

“En effet, si l’ordre n’est pas respecté, alors l’économie de l’assurance ne peut pas fonctionner : il n’y a plus de risque en cas d’émeutes à répétition”, note Christophe Delcamp, directeur de l’Assurance de dommages et responsabilité civile at Assureurs, la principale fédération des compagnies d’assurance en France. Parce que les tensions sociales provoquent régulièrement des destructions dans les territoires d’outre-mer et que ces territoires sont en première ligne face au changement climatique, les assureurs vont-ils finir par déserter les territoires d’outre-mer ?

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Un laboratoire alimentaire a brûlé pendant les émeutes. Normandie. Nouméa. Septembre 2024.

©Noémie Dutertre/ NC La 1ère

En 2020 déjà, l’Inspection générale des finances constatait dans un rapport que “L’outre-mer peut effrayer les assureurs, avec des marchés trop petits et présentant des caractéristiques particulières, compte tenu des risques jugés excessifs.” De son côté, Christophe Delcamp assure qu’il n’y a pas “pas de difficultés à l’étranger”, tout en reconnaissant que si l’assureur “estime que certains événements sont trop fréquents, dont la survenance est certaine, elle peut adapter sa couverture d’assurance, voir sa présence sur certains territoires.”

“L’assureur analysera l’exposition au risque, que ce soit à Nice ou en Guadeloupe, explique Christophe Delcamp. Les territoires d’outre-mer sont exposés à un grand nombre d’aléas climatiques, éruptions volcaniques, cyclones, glissements de terrain, inondations… » Mais en théorie ces aléas ne freinent pas les compagnies d’assurance, puisqu’elles sont couvertes par la garantie catastrophes naturelles. Ce système, quasiment unique au monde, est un système d’assurance « public-privé » financé par une taxe sur les contrats d’assurance. La franchise est la même, en France comme en Outre-mer. Mais alors que les événements extrêmes se multiplient, le système peine à se financer. La taxe, auparavant fixée à 12 %, passera à 20 % à partir du 1est en janvier prochain, pour prendre en compte les conséquences du changement climatique.

La garantie catastrophe naturelle n’assure pas tous les risques liés au changement climatique : vous ne pouvez pas assurer vos biens contre les sargasses par exemple, ni contre la montée du niveau de la mer. Le dispositif couvre les dommages directs, mais ce n’est pas l’échouage des algues qui endommage directement les appareils électroménagers, mais le manque de collecte qui les fait pourrir. « Même chose pour le retrait du littoral. L’assurance est basée sur l’aléa, le phénomène doit être aléatoire. Mais malheureusement, le recul du littoral n’est pas un phénomène aléatoire, c’est un phénomène certain : toutes les côtes du monde sont menacées », explique Christophe Delcamp.

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Ouragan Tammy : l’eau est entrée et a dévasté plusieurs habitations, à Capesterre-Belle-Eau – 22/10/2023.

©Mickaël Bastide

Assurer les biens contre les effets du changement climatique est particulièrement complexe : non seulement un glissement de terrain a des causes multifactorielles, mais les catastrophes sont plus ou moins imprévisibles et leurs conséquences difficiles à anticiper, d’où la difficulté pour les assureurs de provisionner des fonds pour ce type de risque.

Selon l’Inspection générale des finances, il y a déjà moins d’assureurs en Outre-mer qu’ailleurs en France. En 2020, seuls quatre assureurs se partageaient 70 % du marché international. En France, une telle part de marché est occupée par 11 compagnies d’assurance.

Il est parfois difficile pour ceux qui veulent être assurés de trouver une franchise. L’année dernière, Madi Madi Souf, le maire de Pamandzi, à Mayotte, s’est inquiété de voir des Mahorais contraints de se tourner vers les compagnies d’assurance de La Réunion. « Avec les problèmes que nous vivons actuellement, des voitures incendiées, des maisons incendiées, les particuliers ont du mal à obtenir une assurance », il a expliqué, craignant que les municipalités doivent, à long terme, faire de même.

Que faire si certains territoires deviennent non assurables parce que les émeutes ou les pillages deviennent trop fréquents ? Dans un rapport publié en mars dernier, le sénateur Jean-François Husson a proposé de s’inspirer du régime des catastrophes naturelles pour mieux gérer les risques de dégâts urbains, et a soumis l’idée d’un « arrêté de reconnaissance des émeutes », comme il existe des arrêtés reconnaissant l’État. de catastrophe naturelle.

 
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