DDifficile de trouver des électeurs républicains dans la région. La plupart des Américains vivant en France sont démocrates. Tout le monde regarde les élections américaines avec inquiétude. “Si Donald Trump gagne, ce sera dangereux pour les Etats-Unis et si Kamala Harris gagne, j’ai peur que la situation dégénère dans les rues, comme lors de l’assaut du Capitole le 6 janvier 2021”, anticipe Denise Jobin. Welch, ancien diplomate américain basé à Barsac, en Gironde, depuis deux ans. Dans une société américaine toujours aussi divisée, ce New-Yorkais « ne voit pas comment les deux camps peuvent s’entendre ».
« C’est de plus en plus compliqué de dialoguer. Il y a vingt ans, le débat politique était encore constructif entre les deux partis. Aujourd’hui, il n’y a plus d’échanges amicaux ni de respect, on perçoit l’autre comme notre ennemi. Il y a une guerre de valeurs, entre progressistes et conservateurs, sur la notion d’être “un bon Américain””, analyse Jamie Perosi-Doughty, guide touristique et enseignant vacataire à Bordeaux. Cet Américain arrivé en France en 2009, originaire du New Jersey, ne parle même plus de politique avec sa famille, dont la majorité vote républicain. « On évite le sujet pour rester tranquille. »
« Vue de France, nous percevons cette campagne comme un spectacle »
Une campagne « spectacle »
Mais depuis la France, ils affichent ouvertement leur soutien au camp démocrate, les ongles peints en bleu, à quelques jours du scrutin. Sous la réplique de la Statue de la Liberté, place Picard à Bordeaux, ils sont rejoints par Rebekah Tonnerieux, une autre Américaine originaire de Californie, mariée à un Français et installée en Gironde. « Vu de France, nous percevons cette campagne comme un spectacle. Même mes enfants souhaitent savoir quelles célébrités soutiennent quel candidat ! Sauf que c’est pareil avec les adultes là-bas. Il y a une attente moins exigeante sur le fond de la campagne, tout est dans la forme”, regrette-t-elle.
Ils ont déjà voté en ligne, par anticipation, mais dans leurs Etats respectifs, déjà engagés dans la cause démocrate, l’enjeu est minime. «Parfois, j’ai l’impression que mon vote ne sert à rien et qu’il compte moins que les autres», explique Rebekah Tonnerieux, peu motivée par le scrutin indirect. «Nous aurons surtout les yeux rivés sur la Pennsylvanie ou le Wisconsin, qui seront décisifs», estime Jamie Perosi-Doughty. Voyant les sondages légèrement en faveur de Donald Trump, ces démocrates s’inquiètent surtout des droits des femmes ou de la stabilité de la démocratie.
“Mais une élection de Trump aura aussi des répercussions sur l’économie européenne et française, à cause des taxes commerciales”, prévient Rebekah, dont le mari travaille dans le vin, un secteur déjà fragilisé. « Les Français autour de nous se sentent concernés par cette élection, notamment en ville », disent-ils. «Mais ils se demandent aussi, comme nous, comment Donald Trump, malgré ses ennuis judiciaires, peut encore être aussi populaire. Et moi, à l’inverse, je leur demande comment Marine Le Pen peut-elle être si populaire ici ? », compare Denise.