Wittelsheim (Haut-Rhin) se met en quatre pour accueillir la cinquième gigafactory de France. Comprenez une immense usine capable de produire la dernière génération de batteries électriques au lithium pour alimenter les voitures et les camions. Le projet est dirigé par Solutions bleuesune filiale du groupe Bolloré, qui a jeté son dévolu sur l’Alsace lors d’une conférence de presse en mai dernier, sans en dire plus sur la localisation précise de l’usine. “Les concertations sont toujours en cours, la décision sera prise au plus tard début 2025», répond l’industriel. En attendant, Wittelsheim peaufine son argumentaire.
L’espoir d’une reconversion industrielle
La ville de 11 000 habitants, au nord-ouest de Mulhouse, a déjà identifié le futur site : un terrain de 92 hectares derrière l’ancien terril Amélie II, situé à proximité de la voie ferrée. “C’est l’équivalent de la potasse, découverte par Amélie Zurcher, un siècle de bonheur», se félicite le maire Yves Goepfert, car reconvertir une tuile minière, je n’aurais pas parié grand chose qu’un jour cela puisse arriver…« Le projet permettrait de passer d’un domaine minier à la production de batteries au lithium solide, présentée aujourd’hui comme une petite révolution dans le secteur de l’automobile électrique.
Blue Solutions se targue de commercialiser des pièces avec «une densité énergétique plus de dix fois supérieure à celle d’un matériau graphite. Un processus de production simplifié, hautement recyclable et une sécurité renforcée. L’usine est attendue pour 2026, avec 230 salariés à l’ouvertureet jusqu’à 1 500 d’ici 2032 répartis en cinq modules de production. En plus de ces emplois directs, «il faut y ajouter tous les sous-traitants qu’une usine comme celle-là va employer, qu’il s’agisse d’électriciens, de métallurgistes, de chauffagistes… C’est une très bonne nouvelle pour le tissu industriel de Wittelsheim.», ajoute l’élu.
Tollé des associations de défense de l’environnement
Le maire énumère alors les arguments en faveur de Wittelsheim. L’Allemagne n’est pas loin, mais Blue Solutions a déjà annoncé que les batteries seraient destinées aux constructeurs automobiles outre-Rhin. Une voie ferrée et des routes sont à proximité, ce qui facilite le transit des marchandises et, plus rarement, le site bénéficie d’une alimentation en 225 000 Volts, un atout non négligeable dans un projet d’industrie lourde.
Actuellement, le terrain est en partie occupé par des panneaux solaires. Si le feu vert est donné, les installations photovoltaïques seraient déplacées dans un an et demi, deux ans, sur un autre site. Un déménagement qui serait ensuite financé par M2A. Mais là où le tableau tend à s’assombrir, c’est la présence d’un ZNIEFF (Zone naturelle d’intérêt écologique, faunistique et floristique), située à proximité du site. “L’étude d’impact sur la faune et la flore est en cours», prévient le bourgmestre, qui assure que le projet n’affectera pas la ZNIEFF.
Ce n’est pas l’avis de l’association Alsace Nature qui se préoccupe de l’implantation de projets industriels dans des territoires où la nature a repris ses droits. “Il y a ici une biodiversité très riche», souligne Yann Flory, représentant de l’association à l’échelle de l’agglomération. Autour de lui, des buissons, des arbres, des plantes, des plantes, des fleurs et des herbes folles ont peu à peu poussé dans cet immense terrain vague, où l’on distingue une ancienne voie ferrée, quelques décombres ici et là et une route légèrement cahoteuse menant aux panneaux solaires.
Au loin se dresse l’ancien terril. Cela ressemble plus à une colline verdoyante. “Vous avez différentes espèces de serpents, de lézards… Vous avez par exemple le crapaud vert, symbole même de cette espèce menacée, protégée et qui a trouvé refuge ici.», se défend le militant, avant de reprendre, si vous détruisez cet habitat, vous supprimez toutes ces espèces.« Yann Flory se dit exaspéré par ces projets qui se font au détriment de la biodiversité. »Les politiciens doivent changer leur logiciel de réflexion», ajoute-t-il. Si l’usine devait se concrétiser, il n’exclut pas d’utiliser tous les outils légaux à sa disposition, et même d’occuper le terrain pour se faire entendre.