menacé de mort pour la troisième fois, le maire d’une petite commune se confie

menacé de mort pour la troisième fois, le maire d’une petite commune se confie
menacé de mort pour la troisième fois, le maire d’une petite commune se confie
Publié le 23/05/2024 à 11h50

Écrit par Valentin Pasquier Et Julie Radenac

Un homme a été interpellé par les gendarmes de Corrèze après avoir menacé de mort le maire de Rilhac-Treignac. Il sera jugé en octobre 2024. C’est la troisième fois que l’individu s’en prend ainsi à Estelle Bouchot, l’élue de la petite commune du plateau de Millevaches, qui a accepté de répondre à nos questions.

Un individu a été interpellé par les gendarmes à Rilhac-Treignac (Corrèze) ce samedi 18 mai, après avoir proféré des menaces de mort contre le maire du village deux jours plus tôt. Alcoolique, l’homme de 51 ans est accusé d’avoir traqué l’élue depuis son domicile jusqu’à ses voisins, multipliant les insultes.

Le parquet nous a confirmé qu’il a été présenté en comparution immédiate le même jour, placé sous contrôle judiciaire et qu’il sera jugé le 8 octobre dans l’après-midi pour répondre du délit de « menaces de mort contre un élu ». La peine encourue est de cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende.

C’est la troisième fois que l’individu s’en prend à Estelle Bouchot, l’élue de la petite commune de 115 habitants en bordure du plateau de Millevaches, qui a porté plainte. Au micro de France 3, elle confie son exaspération, mais aussi sa foi dans la poursuite de son mandat.

En 2023, 69 % des maires se déclarent victimes d’incivilités et dix maires de Corrèze ont raccroché leur foulard depuis 2020.

Pour la troisième fois, vous expliquez avoir été victime d’une agression verbale de la part d’un de vos électeurs le 16 mai dernier. Que s’est-il passé ?

Estelle Bouchot :cLa personne s’est présentée chez moi. Le problème, c’est que je n’étais pas là, alors il est entré chez moi, sur la véranda. Il s’est mis à crier dans toutes les directions. Mon mari qui était dehors, entendant le bruit, est venu. Il essaya de le calmer, c’était impossible.

Mon mari lui a dit que le maire n’était pas là, mais chez les voisins. Du coup, cette personne s’est rendue chez les voisins. Et puis ça a sonné.

Mon voisin sort et là il voit cette personne, qui me crie des menaces, tenant un tout petit rat, comme ça, par la queue. ” je vais le faire manger “, il a dit. En entendant la voix et en reconnaissant la personne, je sors immédiatement.

Je me suis placé entre mon voisin et cette personne, et c’était un festival de menaces de mort : «jJe vais prendre une lame, je vais te tuer.. En termes informels : «Je vais tuer votre famille, je vais tuer vos enfants, je vais tuer vos petits-enfants. Tu verras”. Je vais vous en transmettre quelques-uns et les meilleurs.

J’avais déjà fait venir mon voisin qui voulait me protéger, pour ne pas aggraver la situation, car on ne sait jamais où est la limite. Après dix minutes de ce cirque, mon voisin sortait de temps en temps, essayait de le calmer, mais il n’y arrivait pas. Je suis entré chez mon voisin, je me suis enfermé et cette personne est partie.

Comment vous sentez-vous ?

Estelle Bouchot : Aujourd’hui, tout va bien. Au fond, je ne suis pas une personne extrêmement craintive. J’avais l’habitude de gérer des conflits.

J’avais raison, et je le sais, de porter plainte. Nous ne savons pas ce qui pourrait arriver. Ai-je peur ? Non. Suis-je un peu moins serein ? Oui. Vigilant? Oui.

Mais après ça, je ne vais pas arrêter ma vie. Je ne vais pas regarder derrière moi à chaque fois pour voir ce qui se passe.

Les menaces que vous évoquez vous sont adressées en tant que maire de cette commune. Que penses-tu de cela?

Estelle Bouchot : Je pense qu’aujourd’hui, le respect, quel qu’il soit, envers un élu, existe beaucoup moins. On ne va pas dire qu’il n’existe plus. Mais je dirais qu’il est normal de « payer » pour un élu. Comme il est normal aujourd’hui de « payer » un médecin, un policier, un pompier.

Maintenant, quand on voit ce qui se passe un peu plus haut, même à l’Assemblée nationale, comment les gens se battent, les mots qu’ils se disent… Est-ce normal d’insulter un député ? Est-ce normal d’insulter le président de la République, de l’appeler Emmanuel ? Non, ce n’est pas normal. J’ai 65 ans. Il y a des valeurs qu’on m’a enseignées. Je ne veux pas ressembler à un vieux ringard, mais à un moment donné, il y a des choses qui ne se font pas.

Alors on nous dit «oui, mais il y a des mesures”. Nous allons donc refaire de l’éducation civique. Nous allons refaire cela. Beaucoup de mots, peu d’actions. C’est ce que je pense.

Les événements du 18 mai remettent-ils en cause votre engagement de maire ?

Estelle Bouchot : Non. En revanche, cela remet en cause une candidature à un nouveau mandat, oui. (…) Je peux comprendre qu’il y ait des frictions. Mais pas à ce point, surtout un petit village calme et paisible.

De nombreuses personnes m’ont appelé pour m’apporter leur soutien, notamment le préfet qui m’a appelé ce matin. Et je lui ai dit “ça va aller« . Je ne vais pas non plus déprimer, la vie continue. Je vais vous donner un exemple : la semaine prochaine, samedi, nous organisons une fête chez nous. Alors, ça peut paraître un peu humoristique, mais c’est la fête des voisins (rires). Ce n’est pas une blague. La fête continue, la vie continue.

J’espère que cette personne comprend, je le fais vraiment de tout mon cœur. Est-ce que cela sera suffisant ? Je ne sais pas, le temps nous le dira. J’espère que vous n’aurez pas à venir voir mon épitaphe un jour (rires) !

 
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