La lutte contre le cancer au Sénégal progresse, avec des chiffres qui évoluent chaque année. Cependant, le Dr Kanta Ka, oncologue radiothérapeute à l’hôpital Dalal Jamm, exprime ses doutes sur l’efficacité de la campagne Octobre rose, qu’il qualifie d’« hypocrisie », lors d’un entretien au journal L’Observateur.
Selon le Dr Kanta Ka, contrairement à l’estimation faite par le Centre international de recherche sur le cancer en 2020, selon laquelle, plus de 11 000 personnes sont touchées par un cancer qui provoque 8 000 décès chaque année. Selon lui, les chiffres ont évolué.
« On observe environ 12 000 nouveaux cas de cancer par an, avec près de 8 500 décès selon les données estimées en 2022 par le Circ (Centre international de recherche sur le cancer). Cependant, il est important de souligner que le fonctionnement du registre national du cancer en est encore à ses balbutiements », a-t-il souligné.
« Une augmentation notable des cas de cancer et de la mortalité »
Selon lui, cette « initiative est menée par les équipes du Dr Malick Hann, chef de la division maladies non transmissibles (MNT) au ministère de la Santé et de l’Action sociale, en attendant des données plus robustes, les chiffres actuels ne restent que des estimations qui sont donc peu fiables. Malgré cela, le Dr Ka affirme avoir remarqué une « augmentation notable des cas de cancer et de la mortalité » dans les services de cancérologie.
Un radio-oncologue souligne les dangers des retards dans le traitement du cancer du col de l’utérus. “Des études ont montré que pour le traitement du cancer du col de l’utérus, chaque jour d’excès au-delà de 54 jours de traitement entraîne une perte de 1% des chances de survie”, prévient le Dr Kanta Ka.
“Cela signifie qu’un retard accumulé peut être fatal pour le patient, réduisant considérablement ses chances de guérison”, a-t-il ajouté.
Il reste également moins convaincu de l’efficacité de la campagne Octobre rose, qu’il qualifie d’hypocrisie à bien des égards.
« Même si Octobre Rose a joué un rôle fondamental dans la sensibilisation au dépistage du cancer du sein, grâce à des associations comme la Ligue sénégalaise contre le cancer (Lisca) », souligne le Dr Ka.
Il estime qu’il y a une « forme de désorganisation autour de cette campagne, certains l’utilisant pour leur propre visibilité plutôt que pour une réelle aide ». Ainsi, il a constaté beaucoup de difficultés dans leur système de santé.
Selon lui, les infrastructures sont insuffisantes, les équipements font défaut, sans compter l’accès aux soins qui est un véritable parcours du combattant. “Avec les pannes répétitives et l’insuffisance des techniques de radiothérapie, ainsi que le manque de centres équipés, la situation s’aggrave”, a déclaré le Dr Kanta Ka.
Il affirme que ce dont ils ont besoin, c’est d’une « mobilisation coordonnée, où ceux qui veulent s’impliquer rejoignent les structures déjà en place pour avoir un impact concret et durable ».