sur le thème de la vérité et de la réconciliation

sur le thème de la vérité et de la réconciliation
sur le thème de la vérité et de la réconciliation

Lundi dernier, des milliers de personnes au Québec et au Canada ont souligné la Journée nationale pour la vérité et la réconciliation, l’occasion de réfléchir aux séquelles des pensionnats et à la relation entre les peuples autochtones et la population canadienne.

Commentant cette Journée dans une récente chronique publiée le 2 octobre dans le Journal de MontréalJoseph Facal a fait preuve d’une certaine ignorance et a tenu des propos qui méritent d’être éclaircis.

Confusion

Premièrement, en définissant le mot « réconciliation » uniquement dans un contexte de « différend », M. Facal démontre une confusion bien présente dans l’opinion publique et qui restreint la portée réelle du concept. La réconciliation ne consiste pas simplement à résoudre un différend au sens traditionnel du terme. Il s’agit plutôt de la reconnaissance d’un déséquilibre historique et systémique dans les relations entre les peuples autochtones et l’État. La réconciliation vise à réparer un fossé créé par des décennies de politiques coloniales, d’injustices institutionnelles et de discrimination qui ont nui directement et indirectement aux communautés autochtones.

Le terme « réconciliation » dépasse donc l’idée d’un simple différend ; cela fait référence à l’établissement de la justice, à la reconnaissance des souffrances passées et à la création de nouvelles bases pour des relations respectueuses et équitables. Il ne s’agit pas seulement de dissiper les malentendus, mais aussi de corriger les torts, tout en apprenant à coexister de manière juste et mutuellement respectueuse.

Prisons

Concernant l’utilisation du terme « survivants », je reconnais qu’il peut être chargé de sens, mais il ne fait pas nécessairement référence à une tentative d’extermination physique au sens traditionnel, comme l’écrit M. Facal. Ce terme fait plutôt référence aux nombreux aspects destructeurs de ces pensionnats, sur le plan culturel, psychologique et parfois physique. Les pensionnats visaient à assimiler de force les enfants autochtones, ce qui impliquait souvent des abus physiques, émotionnels et sexuels, ainsi que la destruction délibérée des langues et des cultures autochtones. Pour la plupart, il s’agissait davantage de prisons que d’établissements d’enseignement.

Le terme « survivants » est utilisé par respect pour ceux qui ont vécu des expériences traumatisantes dans ces institutions, dont beaucoup ont été arrachés à leur famille et certains n’ont jamais pu retrouver leur identité culturelle. Certains enfants n’ont jamais survécu aux pensionnats, ce qui renforce encore davantage l’idée de « survivants » pour ceux qui ont vécu ces épreuves. Il ne s’agit donc pas seulement de survie physique, mais aussi de survie face à un système qui cherchait à effacer leur culture et à les assimiler, ce qui a eu des répercussions dévastatrices sur plusieurs générations.

Disons-nous « la vraie affaire », comme le souhaite M. Facal. La réconciliation est la reconnexion entre les peuples autochtones et la société canadienne dans son ensemble, après des siècles de politiques coloniales qui cherchaient à assimiler et à effacer les cultures, les langues et les traditions des Premières Nations. « Tuez l’Indien qui est dans l’enfant » disaient-ils. Laisser entendre que le génocide culturel dont les Premières Nations ont été victimes est plutôt une question d’incompréhension mutuelle, à mon avis, frise l’ignorance. Lorsque je parle de génocide culturel, je fais référence aux politiques visant à éradiquer les langues, cultures et traditions autochtones. Il ne s’agit pas d’un simple « malentendu », mais d’une volonté systématique de destruction des identités.

Il est vrai que de nombreux défis persistent dans les communautés autochtones. Il est également vrai que près de dix ans après la présentation du rapport de la Commission Vérité et Réconciliation, il reste encore un long chemin à parcourir. Cependant, il est erroné de simplement blâmer les Premières Nations ou de laisser entendre que les solutions à ces problèmes résident uniquement dans le fait de « s’aider soi-même ». Les conditions de vie difficiles dans de nombreuses communautés autochtones ne sont pas le résultat d’un manque de volonté de la part des chefs ou des membres, mais plutôt d’une succession de politiques fédérales et provinciales inappropriées et du manque de ressources allouées sur le long terme. Le sous-financement chronique, les barrières bureaucratiques et les approches paternalistes ont largement contribué à ces défis qui persistent encore aujourd’hui.

M. Facal souligne que la question indigène ne constitue pas une véritable priorité politique pour les gouvernements. Là-dessus, nous sommes d’accord. C’est précisément pour cette raison que l’APNQL travaille fort à faire entendre la voix des nations autochtones aux différents niveaux de gouvernement, afin que la question autochtone devienne une véritable priorité politique.

Accuser les dirigeants des Premières Nations de vivre dans l’abondance alors que leurs communautés demeurent dans la pauvreté ou de tolérer le crime organisé ne favorise pas la réconciliation, mais renforce les préjugés et les stéréotypes. C’est contre-productif et nous éloigne encore plus des solutions. D’ailleurs, je me demande d’où M. Facal tient ses informations, car elles sont très loin de la vérité. Les Chefs œuvrent au quotidien pour améliorer le bien-être de leurs membres dans des conditions souvent difficiles, malgré les obstacles politiques, financiers et sociaux. Je peux témoigner du fait que les Chefs dénoncent sans détour la criminalité qui s’immisce dans certaines communautés, comme on l’a vu récemment chez les dirigeants innus aux prises avec un problème de trafic de drogue qui met en danger la santé et la sécurité. de nos jeunes. Prétendre le contraire est odieux, tout comme pointer du doigt sans nuance et accuser sans connaître les faits.

La « vérité », c’est reconnaître la complexité de ces enjeux et s’engager, chacun à son niveau, dans des actions concrètes pour changer les choses. Le chemin vers la réconciliation est long et nécessite une écoute, une compréhension et une vision commune pour un avenir meilleur. Le texte d’opinion publié par M. Facal le 2 octobre prouve que le chemin est encore long. Et je suis prêt à accompagner M. Facal sur ce chemin de vérité et de réconciliation.

Ghislain Picard
Chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador

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RÉPONSE DE JOSEPH FACAL

J’accueille avec respect et courtoisie la réaction de M. Picard à ma chronique. Après avoir lu sa lettre, je suis retourné lire mon texte. Je n’y vois ni inexactitude factuelle ni interprétation malveillante, même si je peux comprendre que certains passages puissent déplaire. J’invite nos lecteurs à le lire pour en juger par eux-mêmes.

M. Picard suggère d’interpréter les mots différemment afin d’en élargir la portée. C’est son droit le plus strict, mais le danger est alors de les vider de leur sens.

Sa crainte d’alimenter les préjugés est également parfaitement compréhensible, mais elle ne me semble pas être une justification suffisante pour éviter de nommer de vrais problèmes.

Enfin, mon appel à s’aider soi-même n’est en aucun cas un souhait que nos gouvernements se désengagent et renoncent à leurs responsabilités.

Ma chronique ne dit cela nulle part. Je salue l’engagement de M. Picard et lui souhaite plein succès.

Parole de Joseph

 
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