« Notre armée doit monter en puissance », estime cet homme politique

« Notre armée doit monter en puissance », estime cet homme politique
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Charles Juillard défend le vote de sa commission de politique de sécurité du Conseil des Etats : une enveloppe hors budget de 15 milliards de francs pour l’armée et la reconstruction de l’Ukraine.

L’armée pourrait bénéficier d’une contribution financière supplémentaire. © Clé de voûte

L’armée suisse pourrait bénéficier d’une contribution financière supplémentaire. © Clé de voûte

Publié le 28/04/2024

Temps de lecture estimé : 4 minutes

La sécurité de la population suisse n’a pas de prix. Pour la Commission de politique de sécurité (CPS) du Conseil des Etats, cela représente bien 15 milliards de francs supplémentaires dans un contexte tendu de réarmement mondial. Un montant qui comprend également une contribution de 5 milliards de francs destinée à la reconstruction de l’Ukraine. Soutenue par le centre et la gauche, la motion votée jeudi réclame la création d’une loi fédérale “portant une contribution extraordinaire à la sécurité de la Suisse et à la paix en Europe face à la guerre contre l’Ukraine”.

Le problème est qu’il ignore le sacro-saint frein à l’endettement, instrument qui évite les déficits structurels. Un contournement « illégal » aux yeux du Conseil fédéral, qui ne voit pas dans les achats pour l’armée et l’aide à la reconstruction de l’Ukraine « des événements extraordinaires qui échappent au contrôle de la Confédération ». Le conseiller d’Etat jurassien Charles Juillard (Le Centre) est convaincu de la nécessité de cette dépense hors budget.

Pourquoi débloquer de nouvelles ressources pour l’armée, alors que le Parlement a déjà voté l’augmentation du budget de la défense?

Charles Juillard: En raison de l’évolution du conflit en Ukraine. Son armée est en difficulté sur le terrain. La majorité de la commission a fait cette analyse. Il est essentiel de se prémunir contre la guerre en augmentant les ressources militaires. Nous devons faire preuve de solidarité avec les autres pays. Notre armée doit devenir plus puissante. Elle doit retrouver son rôle premier de protecteur de la population, rôle relégué au second plan dans l’après-guerre avec les dividendes de la paix. Les membres de l’OTAN doivent augmenter leur budget militaire à un minimum de 2 % du PIB. Certains pays membres parlent même de 3,5 à 4 %. Notre proposition est encore loin du standard international : nous demandons seulement 1% du PIB pour la Suisse d’ici 2030.

« Se protéger contre la guerre, en augmentant les moyens militaires, est essentiel »
Charles Juillard

Le calendrier des nouvelles dépenses en faveur de l’armée n’est-il pas mal choisi compte tenu des récentes difficultés de financement ?

Quand on veut augmenter les moyens de l’armée, ce n’est jamais le bon moment. Il y a deux ans et demi, le Parlement a adopté une motion visant à ce que le budget de l’armée atteigne 1 % du PIB en 2030. La volonté du Parlement doit être respectée. Il faut prendre des décisions maintenant car il faut toujours un certain temps pour que les choses se mettent en place en Suisse entre la prise de conscience et l’action. Et la montée en puissance de l’armée prendra plusieurs années.

Mais en décembre dernier, le Parlement a repoussé l’échéance pour atteindre 1% du PIB à 2035, notamment grâce au vote du Centre. Pourquoi revenir si vite à cette échéance de 2030 ?

La situation géostratégique évolue rapidement. L’instabilité sur le front de la guerre et ses conséquences, notamment en matière d’asile et d’immigration, nécessitent une réaction encore plus rapide qu’auparavant si l’on veut pouvoir répondre efficacement aux défis sécuritaires qu’elle pourrait poser à notre pays. Sans compter que le réarmement général, notamment en Europe, rend plus difficile l’acquisition et la disponibilité des moyens dont l’armée a besoin.

Le Parlement a la compétence de créer une base juridique pour un tel fonds. Mais obtenir une majorité aux Chambres sera plus compliqué qu’au sein de la Commission…

Nous appelons les députés de bonne volonté à soutenir cette proposition. On ne peut pas, d’un côté, demander de créer un fonds d’aide à l’Ukraine, et de l’autre, puiser ailleurs, par exemple dans le budget de la coopération internationale, dont l’aide est essentielle pour d’autres régions du monde. Si nous essayons d’aller dans cette direction, c’est parce que nous voulons qu’il s’agisse de dépenses extraordinaires qui ne pèsent pas sur des secteurs importants comme la formation, l’agriculture ou l’aide au développement.

Défense : Un arsenal militaire qui s’élève à 25,8 milliards

La gauche est généralement allergique à toute dépense supplémentaire pour l’armée. Comment le Centre a-t-il réussi à négocier ce compromis ?

Concernant la position de la gauche, il faut rappeler que les Verts réclament depuis longtemps des moyens plus importants pour venir en aide à l’Ukraine. Et au sein du Parti socialiste, la perception de la politique sécuritaire du pays a également évolué. Les opposants purs et durs à l’armée sont moins nombreux. Cette motion devrait également plaire à ceux qui sont habituellement favorables à l’industrie d’armement suisse.

Où trouver ces 15 milliards des francs ?

Il appartient au Conseil fédéral de formuler des propositions au Parlement. Les commissions de sécurité ont pour mission de veiller à la sécurité du pays et de ses habitants et doivent formuler des propositions en ce sens. Si nous voulons respecter le frein à l’endettement, nous devrons peut-être procéder à des ajustements ailleurs. Et ces 15 milliards ne seront pas dépensés d’un seul coup sur un seul exercice budgétaire. Cela n’empêche pas une décision ultérieure du processus budgétaire. Même avec un fonds de 15 milliards, cela serait budgétisé. Cela permet d’augmenter le plafond des dépenses plutôt que de puiser dans le fonds de roulement et ainsi de faire des arbitrages avec d’autres dépenses.

 
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