Les jeunes, cette force électorale qui n’écoute plus

Les jeunes, cette force électorale qui n’écoute plus
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Les jeunes Canadiens n’ont jamais été autant dans le viseur du gouvernement Trudeau. Plus nombreux que les baby-boomers dans le pays, les millennials, désormais âgés de 28 à 44 ans, sont la force électorale à séduire en vue des prochaines élections. Et le Parti libéral du Canada (PLC), toujours en mauvaise position dans les sondages, redouble d’efforts pour les convaincre. En vain.

Ottawa ne s’en cache pas : le budget fédéral présenté la semaine dernière se targue de prôner « l’équité intergénérationnelle », un « indicateur clair » que les libéraux tentent de séduire les jeunes électeurs, même s’ils ne constituent pas la clientèle électorale « la plus facile », souligne le politologue Philippe Dubois, professeur assistant à l’École nationale d’administration publique (ENAP).

« Nous savons que les jeunes votent généralement moins que les électeurs plus âgés. En même temps, ils représentent aujourd’hui un poids démographique très important, ce qui les rend incontournables », note-t-il dans un entretien à Devoir.

Les milléniaux représentent aujourd’hui 23 % de la population canadienne, soit environ 9,3 millions de personnes. Et la génération suivante, les « Z » (constituée des personnes nées entre 1997 et 2012), arrive en troisième position en nombre absolu. Et si leurs habitudes de participation électorale les rendent moins « payants », tous les partis fédéraux ont quand même intérêt à les courtiser, à l’heure où les circonscriptions se gagnent parfois par quelques voix, ajoute le professeur.

Sur les dix courses décidées par les plus petites marges lors des élections fédérales de 2021, sept ont été remportées par les libéraux. La libérale Brenda Shanahan, par exemple, a remporté la circonscription de Châteauguay-Lacolle par à peine 12 voix.

Même constat dans les circonscriptions à forte concentration de jeunes Canadiens. Sept des dix circonscriptions fédérales comptant la plus forte proportion de résidents âgés de 25 à 29 ans (selon les données du recensement canadien de 2021) sont détenues par les libéraux. Les ministres Marc Miller, Steven Guilbeault et Chrystia Freeland en font partie.

Un budget sans effet ?

Seul problème : plus d’une semaine après le dépôt du budget pour « redonner une chance équitable à chaque génération », les sondages ne montrent toujours aucun mouvement dans les intentions de vote des jeunes Canadiens. «Les libéraux se sont complètement égarés auprès des jeunes», affirme l’analyste de sondage Philippe Fournier, fondateur des plateformes 338Canada et Qc125.

Le Parti conservateur du Canada (PCC), dirigé par Pierre Poilievre, domine toujours dans les intentions de vote — et ce dans tous les groupes d’âge. Plusieurs sondages nationaux donnent désormais aux conservateurs une avance de 20 points. Le Québec est la seule région où ils ne sont pas en tête ; Ils arrivent au deuxième rang, derrière le Bloc québécois.

Parmi les électeurs de la génération Z, les libéraux occupent même la troisième place, derrière le Nouveau Parti démocratique et le PCC, selon l’Institut Angus Reid. Le sondage révèle que, même si certaines mesures budgétaires ont été appréciées, de nombreux Canadiens se disent pas convaincus qu’elles amélioreront leur situation financière personnelle, la crise du logement ou l’économie générale du pays.

Ces préoccupations sont les mêmes pour les jeunes, indique Philippe Fournier. « Ils sont plus préoccupés par l’environnement que les plus âgés, mais aussi par l’inflation, le logement, le coût de la vie… Ce n’est pas très différent des autres tranches d’âge. »

Même s’il convient qu’il est encore tôt pour mesurer les effets du budget, les impressions laissées par le premier ministre libéral Justin Trudeau sont « horribles ». « Les gens n’écoutent plus », résume-t-il.

Nouvelles stratégies

L’argument de l’équité intergénérationnelle n’a pas été la seule tactique adoptée par le PLC pour faire connaître ses mesures budgétaires aux jeunes. Pour la deuxième année, le ministère des Finances a invité une cohorte de sept créateurs de contenus au huis clos budgétaire, traditionnellement réservé aux journalistes et experts.

Gabrielle Gauthier-Veillette, « tiktoker » et collaboratrice chez Noovo Info, était l’une des deux seules créatrices québécoises invitées à Ottawa cette année. La conseillère en sécurité financière de 28 ans, qui compte près de 30 000 abonnés sur TikTok, a pris la route de Trois-Rivières pour être l’une des premières à découvrir le budget — et à préparer un petit résumé sur ses réseaux sociaux.

« Les jeunes n’ont pas l’impression que les politiques représentent leurs valeurs », dit-elle au téléphone. ” Je pense que [notre présence] est un excellent moyen de les informer, de rendre la politique plus accessible et plus intéressante.

Ses abonnés n’ont pas tardé à réagir aux différentes mesures budgétaires présentées sur sa page TikTok. Le taux d’inclusion fiscale passant de 50 % à 66,67 % pour les gains en capital de plus de 250 000 $ n’a pas été populaire. « Avec le coût de la vie actuel, de nombreux jeunes se lancent dans l’immobilier ou investissent tôt dans leur vie. C’est une mesure qui finira par les toucher, lorsqu’ils voudront vendre leur bien immobilier ou leurs investissements », illustre-t-elle.

Le ministère des Finances précise qu’il n’a pas payé les sept créateurs de contenu invités à Ottawa. Cependant, son équipe des communications leur a permis de consulter le budget dans une salle privée, ainsi que de rencontrer personnellement la ministre des Finances Chrystia Freeland et d’autres ministres lors d’une séance photo.

Pour Philippe Dubois, professeur à l’ENAP, ce recours aux personnalités en ligne est tout à fait dans l’air du temps. « Cela peut être une stratégie prometteuse, car ils reformuleront, redéployeront le discours officiel du gouvernement dans un langage et un format qui plaisent à leur communauté », souligne-t-il.

En novembre dernier, l’équipe du premier ministre a fait appel aux services d’un spécialiste en image et marketing, Max Valiquette, reconnu pour son expertise auprès des jeunes millennials et de la génération Z. Ce dernier a notamment cofondé une firme-conseil en marketing et communications axée sur la jeunesse.

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