Sous la colline, un site militaire oublié de la Seconde Guerre mondiale, à redécouvrir

CC’est un charmant sentier qui serpente à travers une butte calcaire recouverte de végétation, au-dessus de l’estuaire. On pourrait s’y promener longtemps sans se douter qu’il offre une tranche d’histoire. Pour en découvrir les secrets, un guide s’impose : l’Association Historique du Site Militaire de Mugron, à Gauriac. Elle organise des visites, à l’occasion de ces 41et Journées européennes du patrimoine, mais aussi tout au long de l’année (06 66 63 87 41).

Jean-Yves Berlie fait partie des passionnés qui l’ont créée il y a deux ans. Ce samedi, il mène une colonne sur la colline qui mène à un ancien dépôt de munitions allemand de la Seconde Guerre mondiale. Un site dont la préservation tient du miracle. « Heinz Stahlschmidt, maître-bombardier de la Kriegsmarine, connu pour avoir refusé de détruire le port de Bordeaux, avait lui aussi reçu l’ordre de faire sauter la colline, explique-t-il. Heureusement, il ne l’a pas fait, sinon il ne serait plus rien resté de Mugron ou de la Roque-de-Thau. »


Seul le premier sous-sol a été exploité par les Allemands. Les carrières elles-mêmes s’étendent sur neuf niveaux souterrains et 20 mètres de profondeur, soit la hauteur de la falaise.

Gw.B./« SO »

Seules les entrées de ces anciennes carrières, construites par la marine allemande pour stocker 200 Schachtmine A (SMA), mines constituées d’une sphère d’aluminium contenant des explosifs et d’alvéoles assurant sa flottaison, reliées par une chaîne au « crapaud », le lest retenant la mine sous la surface de l’eau.

Perquisitions et uniformes

A la surface de la colline, quelques indices de son importance : les défenses qui la gardaient. Ici, des « tétraèdres », des hérissons d’acier comme on en voit sur les plages du débarquement. Là, des tranchées reliant des nids de résistance creusés dans le sol. Plus loin, une plateforme antiaérienne et une autre pour un projecteur. Et, parfaitement conservés, cinq tobrouks, ces abris en béton pour mitrailleurs.


Une mine Schachtmine A (SMA). Chacune transportait une charge de 350 kilos d’hexanite.

Voir B.

« On est passé 40 ou 50 fois devant certaines choses sans les voir, confie Jean-Yves Berlie. Et plus on en découvre, plus on est convaincu de l’importance cruciale du site derrière le Mur de l’Atlantique. » L’association a pour objectif de mettre en valeur les lieux de vie : locaux énergétiques, réfectoire… « Une quarantaine d’officiers et de spécialistes étaient en poste ici. » 250 personnes ont travaillé à la construction du complexe. « Certains étaient payés, d’autres contraints. »

Il a fallu attendre longtemps pour que l’intérêt patrimonial du lieu soit pris en compte. « Les mines sont restées très longtemps. Ce n’est que dans les années 1970 qu’il a été décidé de combler les locaux de stockage avec du sable – on disait que l’ETA était venue là pour se servir d’explosifs. Ce n’est qu’en 1990 que les mines ont finalement été retirées. »


Fred, Damien et Maxime, trois « reconstituteurs » de l’association Arca, en uniforme de l’armée (Heer), qui gardaient le site de la Kriegsmarine pendant la guerre

La découverte de ce morceau d’histoire perdu dans la végétation enchante les visiteurs. Qu’ils soient venus en voisins, comme Alain, 69 ans : « Quand j’étais lycéen, on se promenait ici alors que c’était interdit. » Ou comme cet autre Alain, de Royan, passionné d’histoire militaire : « Le week-end dernier, j’étais déguisé en arbalétrier avec les chevaliers de la Licorne d’Ambarès. »

A Mugron, les costumes pimentent aussi l’ambiance : trois fantassins de la Heer (armée de terre) assurent l’animation. Maxime, Damien et Fred sont membres d’Arca (commémoration de reconstitution aquitaine airsoft). En uniforme allemand, américain ou soviétique, ils ont fort à faire dans ceet anniversaire de la Libération.

 
For Latest Updates Follow us on Google News
 

PREV qui était Michel Ohl, cet écrivain d’Onesse-Laharie ?
NEXT Appel à projets des Hauts-de-Seine