Pourquoi les syndicats craignent un « plan social » et appellent à la grève

Pourquoi les syndicats craignent un « plan social » et appellent à la grève
Pourquoi les syndicats craignent un « plan social » et appellent à la grève

Après deux grèves les 14 et 29 août, la justice des jeunes (PJJ) prépare une nouvelle journée de mobilisation jeudi 19 septembre. La suite d’un conflit qui a éclaté en plein été avec l’annonce, le 31 juillet, aux syndicats d’économies budgétaires. «Depuis le début de l’année, la PJJ connaît une accélération de ses recrutements»justifie le ministère de la Justice, et une réévaluation de « la rémunération des travailleurs contractuels » sur ceux des agents permanents. La masse salariale a donc dérapé et la direction a décidé de ne pas renouveler les contractuels, qui représentent 20% des effectifs de la PJJ.

Du côté de l’intersyndicale CGT-CFDT-Unsa-SNPES, c’est la douche froide. « Un véritable plan social digne du secteur privé »elle soutient dans un communiqué publié le même jour. « Plusieurs syndicats avaient déjà tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences des coupes budgétaires dès février »elle poursuit, en évoquant les coupes de 700.000 euros décidées par décret en début d’année.

« Manque total de respect envers les jeunes »

Le 6 août, le cabinet du ministre de la Justice a rencontré les syndicats, FO exclu. Il a annoncé un dégel de 3 millions d’euros, affectés à certains contrats. Insuffisant pour compenser les contrats des salariés qui n’ont pas été renouvelés, juge l’intersyndicale. « Bercy a imposé des contraintes budgétaires. Mais finalement, il n’y a qu’à la direction de la PJJ qu’on a vu les choses se dérouler de manière aussi brutale, sans déraper sur l’année »s’emporte Eric Achard, secrétaire général de l’Interco CFDT justice.

« Une gestion calamiteuse »

L’argent est au cœur de cette affaire. Pour l’intersyndicale – le ministère s’en défend –, la PJJ procède à des coupes pour compenser le versement d’une prime de JO, conditionnée à une activité accrue, et le versement d’une prime de fidélité pour les agents de Seine-Saint-Denis. « Il n’y a pas eu d’augmentation d’activité et la prime de fidélité existe depuis plusieurs annéesestime Eric Achard. Tout cela était connu. « Cela fait des années que la gestion de la masse salariale est désastreuse »ajoute Béatrice Briout, son homologue à l’Unsa. « Un projet de loi de finances rectificative a permis une première coupe qui a restreint le fonctionnement de la PJJ, une seconde a attaqué les ressources humaines, affirme le sénateur du Maine-et-Loire, Grégory Blanc (groupe Ecologiste, Solidarité et Territoires). Nous nous concentrons sur les coupes budgétaires dans les domaines régaliens, ici la gestion de la réponse pénale pour les jeunes délinquants et criminels. « La forme était irrespectueuse et le fond est toujours le même, quand il y a des restrictions budgétaires, ce sont toujours les contractuels qui sont touchés »dénonce Martine Raniveau, membre du syndicat national des psychologues, qui a fait carrière à la PJJ.

Par ailleurs, le nombre de contrats non renouvelés apparaît élevé pour un « dérapage » budgétaire estimé entre 1,6 et 1,8 million d’euros, la masse salariale de la PJJ étant d’environ 456 millions d’euros.

Combien sont-ils ? L’intersyndicale évoque un chiffre de 500. « Nous avons des retours de chaque syndicat. Dans les interrégions d’Île-de-France et du Nord, il y a entre 80 et 100 postes, déclare Eric Achard. Dans les sept autres interrégions, il oscille entre 30 et 50. » La Chancellerie juge que « Moins de la moitié de cette estimation était potentiellement affectée ».  Depuis lors, la direction de la PJJ a annoncé que « plusieurs dizaines » les travailleurs sous contrat ont été rappelés et d’autres le seront « à partir du 15 octobre »Il est temps de revenir au budget. Mais pour l’intersyndicale, le mal est fait. « Les personnes qui n’ont pas été renouvelées ne voudront peut-être pas revenir à la PJJ »predicts Béatrice Briout.

L’environnement ouvert impacté

Sur le terrain, le mécontentement se fait sentir. « Nous avons perdu environ 25 % de notre personnel local. Le suivi des jeunes a été transféré alors que nous gérons en moyenne 25 jeunes par personne, se lamente un éducateur qui a rejoint la PJJ il y a plus de dix ans. C’est beaucoup de travail de construire un lien avec eux. D’autres suivis sont mis en suspens. C’est un manque total de respect envers les jeunes, alors qu’ils sont en difficulté. ” “Pour gérer cette crise, comme il y a des déficits partout, on envoie des agents en mission, en leur demandant d’aller faire des services sur d’autres unités. Il y a aussi beaucoup de postes vacants, des congés de maladie par exemple, qui ne sont pas comblés, develops Béatrice Briout. Des services qui seront fortement impactés, notamment dans les environnements ouverts. » Dans les établissements pénitentiaires pour mineurs, « Cela signifie moins d’activités pour les jeunes en détention et moins de surveillance à leur sortie de cellule. »elle continue. « Pour des mesures d’enquête (un ensemble d’éléments concernant un jeune)le psychologue est obligatoire, cela fait partie de leurs missions. Si ce poste était occupé par un contractuel et qu’il n’est pas renouvelé, il n’y a plus de psychologue du tout”ajoute Martine Ravineau.

De son côté, le ministère se défend : « Une attention particulière est portée à la continuité du service public et à la qualité de l’accueil des jeunes »Cette troisième mobilisation en un mois entretient le doute.

Une administration méconnue

La protection judiciaire de la jeunesse est une administration composée d’environ 9 000 professionnels. Dépendante du ministère de la Justice, elle « s’occupe de l’organisation de la justice des mineurs »vise à intégrer et à éduquer « mineurs en conflit avec la loi » et protègent les mineurs en danger. 55 % des agents de la PJJ sont des éducateurs, qui travaillent dans différentes structures : établissements de placement éducatif, centres éducatifs fermés, établissements pénitentiaires pour mineurs par exemple. Des psychologues et des infirmiers y travaillent également. En 2023, la PJJ a pris en charge 130 000 mineurs.

 
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