soupçons de fraude sur fond de déchirement politique – .

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L’intervention s’inscrit dans le cadre d’une enquête pour fraude visant l’ancien Grand Chef Serge Otsi Simon, qui a dirigé le conseil de bande de 2011 à 2021. Dès que Victor Bonspille lui a succédé, il a entrepris des démarches pour examiner l’affectation des fonds alloués à la gestion de la COVID-19. 19 dans la communauté. Il soupçonne son prédécesseur d’avoir détourné plus de 3 millions de dollars d’aide fournie par le gouvernement fédéral.

Tout ce qui se passe ici détourne l’attention du fait que le conseil de bande fait l’objet d’une enquête pour fraude SQ, précise Victor Bonspille. Je crois que cela clarifiera ce qui s’est passé lorsque Simon était grand chef.

Serge Otsi Simon se trouvait dans la salle de réunion du conseil avec quatre autres chefs lorsque la police a fait irruption. Ils ont été immédiatement sommés de quitter les lieux. Ils [les policiers] avait un mandat de perquisition pour fouiller tous les bureaux, dit le chef mohawk. J’ai coopéré et leur ai demandé s’ils voulaient que je laisse la porte de mon bureau ouverte. J’ai aussi ouvert mon sac de travail pour montrer que je ne sortais rien du bureau.

Il [Victor Bonspille] est convaincu que j’ai volé l’argent. Je suis convaincu que l’enquête montrera qu’il n’y a pas eu de fraude. »

Une citation de Chef Serge Otsi Simon

conseils toxiques

Serge Otsi Simon et ses collègues s’étaient regroupés dans l’espoir de faire avancer des dossiers qui stagnaient depuis longtemps en raison des divisions qui paralysent le conseil de bande. Le grand chef Bonspille et sa sœur, la chef Valérie Bonspille, ne se sont pas joints à eux malgré l’invitation.

Les deux camps opposés s’accusent mutuellement de blocages et de complot. L’impasse politique est totale. Actuellement et depuis 18 mois, les conseils sont vraiment toxiquestémoigne M. Bonspille.

Le Grand Chef Victor Bonspille (à gauche) et le Chef Serge Otsi Simon (à droite) sont à couteaux tirés au Conseil de bande de Kanesatake.

Photo : Radio-Canada / Marie-Laure Josselin

De plus, pour ramener un peu d’ordre dans la communauté, le Grand Chef ne voit d’autre moyen que de déclencher des élections générales le plus rapidement possible.

L’espoir peut revenir lorsque les conseils sont modifiés. Je ne serai peut-être plus là et, si c’est le cas, j’espère que la personne qui me remplacera aura une bonne tête, un bon cœur et une bonne conscience. J’espère qu’elle sera là pour la communauté. »

Une citation de Le grand chef Victor Bonspille

Ce qui empêche le grand chef Bonspille de procéder immédiatement, c’est la réforme en cours du code électoral. Le processus, qui est mené par des membres de la communauté et dans lequel il ne peut intervenir, pourrait durer encore quelques mois.

Une situation intenable

Entre autres, Victor Bonspille reproche à son prédécesseur son manque de transparence et sa mauvaise gestion des affaires communautaires. De son côté, M. Simon a beaucoup de choses à reprocher à son successeur. Il dénonce son style de management opaque et son recours à l’intimidation et à la diffamation comme outils politiques. Il l’accuse également de népotisme.

Destitué du conseil de bande après l’annulation de son élection en janvier dernier par un comité d’appel, M. Simon a finalement pu réintégrer l’instance politique à la suite d’une récente décision de la Cour fédérale. Le bras de fer juridique n’est cependant pas terminé puisque le tribunal n’a toujours pas renversé la décision de la commission d’appel.

Les événements des derniers mois ont aussi convaincu M. Simon de la nécessité de déclencher des élections générales à Kanesatake pour former un nouveau conseil de bande.

Ça ne peut pas continuer comme ça pendant deux ans de pluslance Serge Otsi Simon, qui entend se présenter au prochain scrutin pour empêcher la réélection de M. Bonspille.

Je n’ai pas le choix. Je ne voulais pas me présenter comme grand chef et je pensais que ma carrière politique était terminée. Dix ans, c’était plus que suffisant pour moi… Mais j’ai l’obligation envers mes enfants, mes petits-enfants et tous les enfants de la communauté d’intervenir. Je ne vois aucun autre candidat qui ait l’expérience ou le cœur pour vouloir changer les choses.

Serge Otsi Simon (Photo d’archives)

Photo: Radio-Canada / Ismaël Houdassine

Une catastrophe écologique

La situation environnementale à Kanesatake exacerbe les tensions au sein du conseil de bande.

Victor Bonspille regrette la façon dont l’ancien grand chef a laissé l’entreprise G&R Recyclage faire tant de dégâts dans la communauté. D’abondantes fuites de dioxines, de BPC, d’amiante et d’hydrocarbures aromatiques polycycliques, entre autres, se sont échappées du site au fil des ans pour se retrouver dans les cours d’eau avoisinants, avant d’être rejetées dans le lac des Deux Montagnes et la rivière des Prairies.

Ces lacunes ont incité le ministère de l’Environnement du Québec à révoquer, en 2020, le permis d’exploitation de l’entreprise, propriété des frères Gary et Robert Gabriel.

Simon avait peur de confronter G&R Recyclage à propos du problème. À mon arrivée au pouvoir, en moins d’un mois, j’avais rencontré les propriétaires de l’entreprise et mis fin à l’entente qu’ils avaient avec le conseil de bande. Ils ont enfreint les règles et ça ne pouvait pas continuer comme çadit M. Bonspille.

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Grand chef de la communauté mohawk de Kanesatake, Victor Bonspille.

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Photo : Radio Canada

M. Simon assure que les choses se sont passées différemment. Au printemps 2020, il dit avoir tenté de révoquer la résolution autorisant G&R Recyclage à exploiter la décharge, mais Victor Bonspille et d’autres dirigeants s’y seraient opposés. Finalement, en raison de divers facteurs, tout le monde s’est mis d’accord pour mettre le dossier sur la glace.

Nous étions au milieu de la pandémie de COVID et attendions les résultats des tests de sol, d’eau et d’air du site. J’avais besoin de ces résultats pour révoquer la résolution. Sans preuves concrètes, je ne pouvais pas aller de l’avant avec mes demandes aux gouvernementsexplique M. Simon.

Les frères Gabriel

Malgré la réputation peu enviable de Gary et Robert Gabriel, qui les lie au crime organisé, Serge Otsi Simon affirme n’avoir jamais eu peur de les affronter. Je n’avais pas peur d’eux et je leur ai parlé plusieurs foisil argumente.

Cependant, c’est Victor Bonspille qui a maintenant la responsabilité de discuter avec les frères Gabriel et de trouver un moyen de réparer les immenses dégâts causés par leur gestion du site.

Je suis d’accord que c’est une catastrophe environnementale, lance M. Bonspille. Mais les responsables l’ont reconnu, se sont excusés et travaillent maintenant avec nous pour trouver une solution. C’est aussi leur communauté.

>Un tas d'ordures.>

Le centre de tri exploité par Gary et Robert Gabriel est devenu au fil des ans un véritable dépotoir.

Photo : Radio-Canada / Delphine Jung

M. Bonspille nie vouloir défendre les frères Gabriel. Il ne veut tout simplement pas s’attarder sur les rumeurs et remuer le passé. Notamment celle de Gary Gabriel, qui a déjà fait face à plusieurs accusations criminelles.

Je ne suis pas policier. Quoi qu’il [Gary Gabriel] a fait dans le passé, c’est son passé. Je travaille avec lui et son frère sur la situation actuelle. Je ne leur parle de rien d’autre que de ce qui se passe sur leur site. Ils savent qu’ils ont fait quelque chose de mal et ils travaillent avec nous pour le réparer. »

Une citation de Le grand chef Victor Bonspille

Québec et Ottawa se renvoient la balle

Pour décontaminer la propriété de G&R Recyclage, le Conseil de bande de Kanesatake aura certainement besoin de l’appui des gouvernements fédéral et provincial. Même si tout le monde s’accorde à mettre la main à la pâte, Victor Bonspille estime que cela pourrait prendre jusqu’à 10 ans pour réhabiliter complètement le site.

Jusqu’ici, Ottawa et Québec se sont échangé cette patate chaude sans vraiment vouloir prendre leurs responsabilités. Une rencontre tripartite avec la ministre fédérale des Services aux Autochtones, Patty Hajdu, et le ministre québécois responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuits, Ian Lafrenière, est prévue la semaine prochaine.

Je pense qu’Ottawa évite la question depuis un certain temps, surtout depuis qu’il est devenu évident qu’il fallait faire quelque chose. Ça fait deux ans que je leur parle et ça prend du temps, dit M. Bonspille. Mais au moins je sais que les fédéraux veulent aider.

Le problème en ce moment, c’est surtout le gouvernement provincial, qui ne se croit pas responsable puisque c’est un territoire fédéral. Mais il ne faut pas oublier que c’est le gouvernement provincial qui a délivré le permis et la licence pour G&R Recyclage. Il doit être tenu responsable et impliqué dans le processus de réhabilitation du site.

climat de peur

Plusieurs membres de la communauté ont également témoigné du sentiment d’insécurité qui règne à Kanesatake. Dans une entrevue accordée à Espaces autochtones, des habitants ont dénoncé l’inaction de la police dans la lutte contre le crime organisé.

Un groupe s’est également mobilisé contre le retrait de l’Etat de ce territoire et a réclamé une enquête internationale indépendante sur les allégations de collusion et de criminalité organisée.

Victor Bonspille remarque qu’il y a eu plus de visiteurs à Kanesatake ces dernières années et, en même temps, qu’il y a plus de violence, d’accidents et de plaintes.

Nous ne sommes pas différents de n’importe quelle autre ville où il y a des gens qui enfreignent la loi et causent des problèmes. Mais dire qu’il y a plein de gangs ici et que c’est une zone de non-droit, je ne suis pas d’accord avec ça. Cela dit, oui je crois que le SQ doit faire un meilleur travail pour rendre les visiteurs plus conformes.

De son côté, Serge Otsi Simon s’inquiète, comme de nombreux habitants, des courses de voitures à grande vitesse sur le territoire et des coups de feu retentissent ici et là dans la communauté.

Mais ce qu’il redoute par-dessus tout, c’est la violence politique émanant du conseil de bande et qui ronge la communauté.

Les gens ont vraiment peur et ils ne peuvent pas donner leur avisdit M. Simon.

Personne ne veut aller aux réunions publiques, poursuit-il. Il y a intimidation, diffamation […] Un gouvernement ne peut pas faire cela.

 
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