De notre correspondant à Dakar,
Devant un grand mur blanc, couvert de brouillons de graffitis colorés, une vingtaine de femmes dessinent de grosses lettres, pinceaux et bombes aérosols à la main.
Yanka est rappeuse et danseuse dans la vie. C’est la première fois qu’elle peint sur un mur et l’expérience est un peu intimidante. ” Quand je dessinais au crayon, je faisais des cercles pour donner un peu de recul, mais là c’est un peu différent. Ce n’est pas pareil, on va s’entraîner dit-elle pleine de volonté.
C’est la septième fois que la formation Passer’elle est organisée par le collectif des graffeurs et graffeurs Escouade Doxandem. Parmi les participants, Kiné Diop, 30 ans. Elle travaille comme agent de développement, et fait de la teinture en même temps. Elle a sauté sur l’occasion. ” J’aime dessiner, j’aime créer, j’aime bricoler… J’ai de la ressource ! (rires) C’est une opportunité pour moi de toujours parfaire mon expérience artistique. Pourquoi ne pas faire des graffitis sur des boubous, du tissu “, elle dit.
---Changer les mentalités
Au programme, des cours de lettrage, de dessin de visages… Mais c’est surtout pour les cours d’entrepreneuriat culturel que Yanka a choisi de suivre cette formation gratuite. ” Nous avons vu comment monter un projet, comment le structurer, comment faire un plan de financement, à qui s’adresser pour les subventions, à quel organisme on peut faire appel au Sénégal pour de l’aide. “. Yanka attache également de l’importance au développement personnel », car pour frapper aux portes pour vendre son projet, il faut avoir confiance, être convaincu et être convaincant. »
Le collectif n’a reçu qu’une trentaine de candidatures. Il y a encore des barrières dans les mentalités. ” Ma famille n’était pas d’accord pour que je rejoigne ce milieu », explique Neye Mareme Fall. A 20 ans, elle en est à sa deuxième formation en graffiti. ” Ils pensaient que c’était un environnement désastreux, ils pensaient que les graffeurs fumaient de la drogue “, Elle ajoute.
” Ce sont les clients qui viennent me voir »
Cependant, vous pouvez faire carrière dans le graffiti. C’est le cas d’Aïda, artiste du nom de Dasha, qui est venue encadrer les élèves. Diplômée des beaux-arts, elle est l’une des premières graffeuses du pays. ” Pour ma part, je n’ai jamais démarché de clients. Ce sont les clients qui viennent me voir. dit Dasha. ” J’ai travaillé avec l’ONU assez récemment. J’ai aussi des marchés qui sont privés. C’est quelque chose qui paie, parce que c’est connu maintenant. Surtout au Sénégal », souligne-t-elle.
Le projet de fin de formation des apprentis graffeurs : une grande fresque représentant une reine traditionnelle, une couturière, à côté d’un ingénieur moderne. Pour montrer que tout est possible pour les femmes.