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« La consommation de plaisir ne décolle pas »

Le JDD. On sort d’une période de forte inflation pour entrer dans l’incertitude économique, les prévisions sont sombres. Cela a-t-il un impact sur les achats de Noël dans vos magasins ?

Enrique Martinez. Ce week-end n’est pas encore terminé, on verra. Il est encore trop tôt pour dresser un bilan. Au cours des deux dernières années, la consommation des ménages a ralenti. Nous sommes sur un plateau, nous ne constatons aucune dégradation en fin d’année.

« Les livres restent en haut du panier »

La hausse des prix de l’alimentation et de l’énergie a-t-elle réduit la part des achats « plaisir » ? Le panier moyen de vos clients a diminué ?

En 2022 et 2023, le niveau de dépenses contraintes a sensiblement augmenté, mais dans le même -, les augmentations de salaires ont permis de maintenir globalement le pouvoir d’achat des Français. En cette fin d’année, l’inflation baisse, les prix de l’énergie aussi, la situation se stabilise, voire s’améliore, même si la consommation reste atone, alors qu’elle repart à la hausse chez la plupart de nos voisins européens. . La traverse une crise de confiance, on la mesure par le taux d’épargne des Français qui engloutit une grande partie de leurs gains en pouvoir d’achat. De même, les investissements ralentissent. Dans ce contexte, notre groupe a atteint à Noël les mêmes niveaux de ventes que l’année dernière, cela veut donc dire que les choses ne décollent pas encore. C’est l’une des raisons qui nous ont poussé à développer des produits reconditionnés et des services de réparation favorisant un nouveau modèle de consommation vertueux.

Quels sont les produits phares pour les cadeaux de Noël ?

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En termes de volume, les livres restent en haut du panier. Mais le marché du jouet au sens large prend de plus en plus de place, notamment les jeux de société et les jeux de construction type Lego, notamment destinés aux adultes. Les ventes de Notre-Dame en Lego ont par exemple été très fortes en fin d’année. Concernant les jeux de société, le secteur est en plein essor. Il faut revenir à une activité sociale et ludique traditionnelle pour contrebalancer le numérique, le - passé sur les réseaux sociaux. On pose le téléphone pendant une heure pour jouer avec des amis.

Revenant au cœur de l’activité de la Fnac, le livre, où vous situez-vous entre les indépendants et Amazon ?

Nous avons des difficultés communes avec les librairies indépendantes, notamment concernant le contrôle des plateformes de vente de livres en ligne qui pratiquent le dumping sur les frais de livraison. Nous avons soutenu la loi Darcos qui visait à rétablir des conditions de concurrence équitables sur ce marché : depuis plus d’un an, cette loi a rempli ses objectifs de rééquilibrage des circuits de distribution, et de soutien à plus de 3 000 points de vente. de livres. C’est la condition pour maintenir une offre riche et diversifiée, au service des lecteurs.

La Fnac est associée au prix Goncourt des lycéens. Cette année c’est Madeleine avant l’aube (Éditions de l’épine), de Sandrine Collette, sacrée. Ce prix est-il une manière parmi d’autres de redonner le goût de la lecture aux jeunes générations ?

Le défi est immense, quand on regarde les chiffres du - passé sur les réseaux sociaux. Certaines personnes passent plus de quatre heures, cinq heures par jour, c’est le même - passé à lire des livres. C’est un phénomène mondial qui dépasse la question du livre. Cela affecte le développement de la pensée, la réflexion, la capacité à s’exprimer, à établir des relations sociales… Le risque est à ce niveau. À l’école primaire, les livres sont au cœur des apprentissages. Mais à l’adolescence, la liberté conduit souvent à renoncer à la lecture. Le Pass Culture ou le Prix Goncourt pour les lycéens ont été conçus pour inciter les jeunes à revenir vers les livres.

Le monde du manga est-il un moyen de fidéliser les jeunes lecteurs ?

Les mangas, comme le monde de la bande dessinée en général, constituent une première porte d’entrée, une manière d’ancrer la lecture dans les habitudes de loisirs des jeunes. Nous avons été l’un des premiers acteurs culturels à investir des espaces dédiés au manga. Ils représentent désormais en volume les départements les plus importants de l’espace bande dessinée. C’est devenu un phénomène culturel : on projette des séries, on organise des événements, par exemple le 100ème numéro de la série de livres Une pièce.

Côté musique, on assiste au retour du disque vinyle, quelle est l’ampleur de ce phénomène ?

Nous avons recréé des espaces vinyles en 2014. Ils représentent aujourd’hui plus de 60 % des ventes de musique, devant les CD. Toutes les grandes stars incluent cet article dans le lancement de leur album. Mylène Farmer et Taylor Swift ont cartonné cette année. Autre phénomène autour des disques vinyles : la K-Pop, qui s’adresse à un jeune public. Ce marché représente près de 20 % de nos ventes, alimentées par les éditions collector. Là encore, le numérique apporte l’abondance et la possibilité infinie de choix, mais le besoin de revenir à l’objet, aux belles pochettes, ravive l’attractivité du disque vinyle, dans des proportions inattendues.

Vous venez d’acquérir l’italien Unieuro, distributeur d’électroménager. Comptez-vous vous développer encore davantage en Europe ?

Unieuro pèse 2,6 milliards d’euros. Avec cette acquisition, nous allons créer un leader européen de 10 milliards d’euros. Fnac Darty était présent en Espagne, au Portugal, en Belgique, en Suisse, au Luxembourg, en Tunisie, au Qatar, en Côte d’Ivoire, au Cameroun, au Congo, au Sénégal, en Arabie Saoudite et aujourd’hui en Italie. L’idée est de se diversifier géographiquement, de consolider nos achats pour réaliser des économies d’échelle, et de consolider un marché encore trop fragmenté pour résister aux grands acteurs mondiaux comme Amazon.

« Il faut contrebalancer le numérique et les réseaux sociaux »

L’incertitude politique en France et le manque de visibilité économique vous inquiètent ?

Ce que nous attendons, c’est l’affirmation d’une réelle volonté de développer l’activité et de faire de la France un territoire compétitif. Les États-Unis surinvestissent pour protéger leur économie, la Chine se ferme et l’Europe est aujourd’hui brisée.

Vous êtes espagnol, Fnac Darty est implanté en Europe, en Espagne, au Portugal et en Italie. Nos voisins font-ils mieux que nous ?

Ces pays ont initié des transformations majeures après la crise financière de 2008 et plus récemment après la période Covid. Leurs économies sont désormais à l’équilibre, ce n’est pas le cas de la France. L’exemple italien est particulièrement éclairant. Il y a une dizaine d’années, elle était la bête noire de l’Europe. Aujourd’hui, c’est la France qui joue ce rôle. Pour s’en sortir, l’Italie a fait des choix douloureux : relever l’âge de la retraite, restructurer les aides sociales, etc. L’Italie est sur la voie d’une plus grande compétitivité. Il reste beaucoup à faire pour que la France prenne le train en marche et ne reste pas en retrait. Et ce pays dispose de nombreux atouts pour y parvenir.

 
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