La sortie du livre signé Jordan Bardella, Ce que je recherche, devenant immédiatement un best-seller, attire l’attention sur les éditions Fayard et leur longue histoire. Le fondateur, Arthème Fayard, arrivé d’Auvergne à Paris, fonde sa société en 1857. Sa grande spécialité est la vente de livres bon marché, une des premières formules du Livre de Poche. Son fils Joseph-Arthème Fayard consolide la spécialité du roman populaire, mais s’ouvre à la grande littérature grâce à la publication des œuvres complètes d’Alphonse Daudet, vendues en livrets à 10 centimes.
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En 1904, la Bibliothèque Moderne pouvait accueillir des écrivains de renom, Paul Bourget, Hector Malot, Marcel Prévost, Maurice Barrès : leurs droits d’auteur furent divisés par deux, mais les tirages de leurs livres furent décuplés. Le roman populaire n’est pas pour autant abandonné, notamment les romans fanfarons de Ponson du Terrail (Rouleau suisse), Paul Féval (Le Bossu) ; Michel Zévaco (Le Pardaillan). En 1911, Fayard connaît un immense succès avec la série des Spectres by Marcel Allain and Pierre Souvestre.
Xénophobe et antisémite
Fayard, après la Grande Guerre, poursuit sur sa lancée : romans populaires, romans sentimentaux, romans d’espionnage… Mais l’éditeur entend diversifier ses publications, fidéliser le public bourgeois autant que les lecteurs habituels de L’esclave amoureux ou de la prostituée ingénue. Un homme est devenu l’ingénieur principal, Pierre Gaxotte.
Normalien, professeur d’histoire, disciple de Maurras, xénophobe et antisémite, il a fait entrer au catalogue l’esprit et les auteurs de l’Action française. Il devait diriger l’hebdomadaire Candide où il écrit, entre autres, des attaques crasseuses contre Léon Blum (« D’abord, il est laid. Sur le corps d’un pantin disjoint, il promène la triste tête d’une jument palestinienne… »). Il était également à la tête de je suis partoutinitialement destiné à la politique internationale, avant que Gaxotte ne quitte les rênes de Brasillach et de Rebatet, qui en font le principal hebdomadaire fasciste français des années 1930. Entre-temps, Gaxotte avait lancé une collection à succès, les Grandes Études historiques, accueillant des Maurrassiens comme Jacques Bainville et Louis Bertrand.
“Un éditeur n’est pas forcément d’accord avec ses auteurs”
Après les tourbillons de l’après-Seconde Guerre mondiale, Fayard tombe en 1958 dans les tentacules d’Hachette, surnommée « la pieuvre verte », tout comme, à diverses dates, Grasset, Fasquelle, Stock, Presses de la Cité… Dans son statut de filiale, Fayard connaît un nouvel essor, d’abord sous la direction de Charles Orengo, qui publie notamment L’Orchestre Rouge de Gilles Perrault et Quand la Chine se réveille d’Alain Peyrefitte, reprenant la tradition d’une maison ouverte, éclectique et pluraliste, que Claude Durand, venu des Editions du Seuil, dont, à son grand regret, n’a pu devenir le nouveau patron, a porté à son apogée.
This one beautifully broadens the palette of the house. In addition to Solzhenitsyn, for whom he was the official editor since his work at Seuil, he published Hélène Carrère d’Encausse, Max Gallo, Jacques Attali, Jean Vautrin, Élisabeth Badinter, but also François Mitterrand, Lech Walesa, Hillary Clinton, Shimon Pérès, Nelson Mandela…
Un seul de ses auteurs lui a causé quelques ennuis, Renaud Camus, antisémite, souverainiste et théoricien du « grand remplacement », avec son livre Campagne française. Aux attaques que lui a valu « l’affaire Renaud Camus », Durand a fièrement répondu au nom de la liberté d’expression : un éditeur n’est pas forcément d’accord avec ses auteurs !
L’ère de l’empire Bolloré
Il quitte la direction de Fayard à l’âge de 71 ans en 2009. Olivier Nora puis Sophie de Closets puis Isabelle Saporta lui succèdent, jusqu’à ce que Vincent Bolloré, repreneur de Vivendi, dont le groupe Hachette, impose Lise Boëll comme PDG de Fayard. Elle avait été rédactrice en chef d’Éric Zemmour et de Philippe de Villiers, chez Albin Michel ; elle est considérée comme la fervente rédactrice en chef des hommes politiques de droite et d’extrême droite. Sous sa direction, Jordan Bardella a réalisé son rêve d’être publié par une grande maison d’édition.
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Vincent Bolloré, dont la cause politique est l’union de la droite et de l’extrême droite, cette « unité du camp patriote » comme le préconisait Patrick Buisson, étend ainsi sans retenue son empire médiatique. Avoir le Relais dans chaque station, ayant conquis CNews, C8, Canal +, Europe1, Le Journal du DimancheBolloré, propriétaire d’Hachette Livre, tisse patiemment sa toile. La capture de Fayard n’est pas la moindre de ses conquêtes, et on peut se demander si le Fayard de Claude Durand est définitivement condamné à redevenir le Fayard de Pierre Gaxotte.
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