livre d’art –
L’Ecole de Savièse comme on ne l’a jamais vue
Apprendre qu’ils étaient 26 de ces fous d’un authentique Valaisan n’est pas la seule surprise de cette œuvre qui nous invite dans leur bulle.
Publié aujourd’hui à 11h48
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- L’École de Savièse est racontée dans un nouvel ouvrage scientifique.
- Il propose les biographies de 26 artistes liés à cette nébuleuse.
- Des photographies rares révèlent leur quotidien, leur travail et leurs interactions sociales.
On revient toujours à l’Ecole de Savièse… Cette fois arrêtée par les peintres de la fin du 19ème sièclee siècle et le début du suivant, sur un paradis encore intact, bâti sur des travaux honorables, une nature souveraine et ce bonheur tranquille. Un idéal qui Biéler (1863- 1948)vun Muyden (1860-1036), Danses (1876-1929) et Province de Burnat (1872-1952)souvent citadins de naissance, ont touché au pinceau, vivant parfois en colocation. Mais ils vivaient surtout de l’intérieur.
Là-haut, ces Vaudois, Neuchâtelois, Genevois et Français ont capté son essence, intégré ses humanités, suivi ses rites et adopté ses rythmes. Les coulisses joyeuses d’une fête de village. Laverie à la rivière. La montée à l’alpage. Jusqu’à l’existence qui laisse ses traces, creusant les visages. Ou la révérence du père qui apporte le cercueil de son enfant mort au cimetière.
Ce que ces artistes ont cherché et trouvé dans ce coin de pays, cette authenticité qu’ils ont immortalisée sans jamais la surjouer ni la trahir, n’est-ce pas une aspiration encore très actuelle ? Et la force d’attraction intacte de l’Ecole Savièse ? Désormais, on y revient aussi plus riche en connaissances après avoir lu la publication – on pourrait dire l’enquête – de deux historiennes de l’art, Maéva Besse et Isaline Pfefferlé.
Dans « L’Ecole de Savièse, autrement », ils portent un nouveau regard, redéfinissent le territoire d’action, la dynamique de groupe. Et déconstruire certaines idées tenaces. Le fil est édifiant sans pour autant se nier d’être vivant. Elle est aussi globale sans nier les individualités. Première surprise : il y en a 26 !
Quatre pays, cinq cantons
Cette Ecole de Savièse, vite réduite à une poignée d’artistes, est en fait… une nébuleuse. Une véritable force de frappe. Avec des peintres, mais pas seulement. Des hommes, mais pas seulement. L’ouvrage nous entraîne à la rencontre picturale et biographique d’artistes méconnus et rarement cités, dont la Nyonnaise Julia Bonnard (1860-1927). Ou les filles d’artistes. Comme leurs épouses, dont la Genevoise Marguerite Vallet-Gilliard.
Ceux que les auteurs « relient » – effaçant ainsi la notion restrictive d’appartenance – à l’école de Savièse viennent de quatre pays (Suisse, France, Allemagne, Angleterre). Et, pour les Suisses, ils ont leurs racines dans les cantons de Genève, Vaud, Valais, Neuchâtel et Bâle. Avec un premier sur la liste : Ernest Bieler. C’est lui, le pionnier, l’un des chouchous actuels du marché de l’art suisse que même le musée d’Orsay a concouru aux enchères en 2022, qui déniche Savièse.
Nous sommes en 1884. Partout en Europe, les artistes partent respirer le plein air « pour », écrivent les auteurs, « rompre avec les conventions picturales classiques et peindre la nature telle qu’elle est perçue, in situ ». Des colonies se forment à Barbizon, Pont-Aven, au Danemark, en Belgique, en Allemagne. Et en Valais. « La topographie particulière de la région, ses montagnes et ses habitants, poursuivent-ils, deviennent emblématiques d’une époque révolue et, par extension, idéalisée ».
Et là… deuxième réajustement scientifique : Savièse n’est pas le seul port d’attache de ces archéologues de l’authenticité onirique. Ils sont dispersés entre le Val d’Hérens, le Val d’Anniviers ou encore Saas Fee et Zermatt. Et si cette transhumance s’étend ailleurs, elle signifie aussi une rupture.
« En venant ici, témoigne Edmond Bille, je fuis les écoles où l’on apprend des recettes, où l’on apprend un métier, d’où l’on sort en laissant son talent derrière soi. […] Pour peindre, il faut avoir de l’émotion, de la tendresse, de l’amour et de l’enthousiasme. Enivrants ou respectueux, observés ou vécus, ces éclats se fixent sur des scènes de vie domestique, de travail de la terre, sur des rites religieux, sur des visages. Mais, étonnamment, « peu de vignes », notent Maéva Besse et Isaline Pfefferlé !
Il reste encore des surprises éclairées par leurs recherches. Particulièrement photographique. Nous voyons ces artistes en live. Travailler. Rencontrer. Prenez une photo de vous. Ou faites un portrait de vous-même. Un peu comme si nous étions avec eux, dans cette bulle intemporelle devenue école. Mais aussi une partie de l’image de la Suisse.
« L’École de Savièse, autrement », Maéva Besse et Isaline Pfefferlé. Éd. art&fiction, 324 p.
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Florence Millioud a rejoint la section culturelle en 2011 par passion pour les gens de culture, après avoir couvert la politique et l’économie locales depuis 1994. Historienne de l’art, elle collabore à la rédaction de catalogues d’expositions et d’ouvrages monographiques sur les artistes.Plus d’informations
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