«On se moquait des gens un peu comme mon père, qui n’avait pas eu la chance d’aller à l’école depuis très longtemps, qui étaient devenus joueurs de hockey ou entraîneur et qui avaient terminé leur carrière à la radio avec un micro», a révélé le auteur et animateur dans une interview avec Le Soleil, après une conférence à la Maison de la culture de Rivière-du-Loup, à laquelle il était invité dimanche par la Bibliothèque Françoise-Bédard. “Ils ont commis beaucoup d’erreurs”, a-t-il poursuivi. Nous avons pris un extrait de la radio et nous nous sommes moqués d’eux à plusieurs reprises. Aujourd’hui, on ne pouvait plus faire ça !
Jean-Philippe Pleau pense ici à Gabriel Grégoire et Jacques Demers « qui ont fait des lapsus sur les deux mots ». Si c’était drôle, l’auteur reconnaît désormais qu’ils étaient « le produit de notre système ». “Je ne veux plus rire des individus, mais je veux rire de la société qui rend cela possible.”
Il ne peut oublier les propos de certaines personnes qui lui rappelaient à quel point ceux dont il se moquait avaient un grand cœur. « C’étaient des êtres sensibles et blessés. Je voudrais leur présenter mes excuses sociologiques. Si l’hôte devait recommencer L’écrivain sportifil aurait l’impression de se moquer de son père.
En revanche, le sociologue le reconnaît, tant pour lui-même que pour Jean-Philippe Wauthier et Olivier Niquette. L’écrivain sportif “leur a permis d’exister.” Il garde un souvenir impérissable de cette époque où il a appris à développer son sens de l’humour qui émerge désormais tout naturellement dans ses conférences et exposés.
Des rencontres marquantes
S’il ne se permet plus de rire des gens pauvres et peu instruits, Jean-Philippe Pleau perçoit « une inégalité qui est renforcée par le système ». Le cœur et la tête chargés de toutes les émotions qu’il venait de vivre après des rencontres touchantes au Salon du livre de Rimouski, l’auteur de Rue Duplessis atterrit à Rivière-du-Loup, où l’attendaient quelque 80 personnes. Animée par Stéphanie Robert, peintre de Cacouna et amie, la conversation avec la romancière née à Drummondville a donné lieu à des échanges et des témoignages à la fois uniques et poignants.
Il a d’abord raconté les rencontres marquantes qu’il a faites au cours des deux derniers jours au Salon du livre de Rimouski, dont celle de Jacqueline, qui était sa voisine d’en face, sur la rue Duplessis. Il ne l’avait pas vue depuis 35 ans. Depuis qu’elle a lu son livre, elle lui a dit qu’elle voulait le tabasser. Elle lui a demandé pourquoi il avait écrit ce livre.
« Notre conversation a duré 20 minutes. Elle m’a dit qu’elle n’avait pas l’impression de vraiment connaître mes parents. Elle m’a demandé si j’avais inventé toute cette pauvreté culturelle, sociale et économique que je nomme dans le livre, cette violence, cette colère, toutes les peurs de mes parents. Elle s’est rendu compte que mes parents cachaient leur pauvreté derrière des voitures neuves, cachaient leurs peurs parce qu’ils avaient honte. Jacqueline a dit qu’elle comprenait désormais mieux mon livre et pourquoi je l’avais écrit. Elle m’a remercié d’avoir osé le faire. L’échange s’est terminé par un selfie, après quoi elle lui a dit qu’elle l’aimait.
Transfuge de classe
Plutôt que d’écrire ce livre, le transfuge de classe qui a grandi sur la rue Duplessis à Drummondville aurait pu s’en tenir à 15 ans de thérapie et à ses études en sociologie, estime-t-il. « L’effet aurait été le même sur moi, c’est-à-dire que je me serais libéré de cette honte, je serais passé de la honte de mes origines à ma honte d’avoir eu honte de mes origines. Je suis sociologue de formation. Alors j’ai eu envie de tendre une main à l’autre. J’ai un mot et j’essaie de l’utiliser du mieux que je peux. Selon lui, le Québec compte une communauté de transfuges de classe qui s’ignorent.
A travers les violences ainsi que les préjugés sexistes, racistes et homophobes dans lesquels il a grandi, le titulaire d’un doctorat en sociologie estime que ses parents sont des « érudits de la sensibilité ». “Mais, dans leur boîte à outils pour gérer leurs émotions, il y avait de la colère et un clou rouillé.” Pour casser les codes, le quadragénaire a su s’entourer de personnes sensibles qui ont appris à gérer leurs émotions. Parmi ceux-ci, il cite souvent l’anthropologue Serge Bouchard, avec qui il a travaillé en étroite collaboration pendant 11 ans, notamment en co-animant avec lui une émission de radio. La poésie de Pierre Perreault lui a aussi beaucoup appris.
“J’excuse sociologiquement mon père et les gens de mon milieu d’avoir été colériques, violents, homophobes, sexistes, racistes, car ils sont le produit de notre société”, a-t-il déclaré. .
Ému aux larmes
L’intervenante a été émue aux larmes à plus d’une reprise, notamment en évoquant la mémoire de la sociologue Caroline Dawson récemment décédée, ainsi que par certains témoignages de la salle. Une larme a coulé sur sa joue lorsqu’il a entendu l’histoire touchante d’un adolescent qui lui a raconté que l’écoute de son émission de radio l’avait calmé. A livre ouvert, celui qui est en garde partagée a raconté, avec courage, qu’il avait l’impression d’être un transfuge de classe, notamment parce qu’il n’obtient pas assez d’attention de la part de son père et parce qu’il en a trop chez sa mère. maison. Les yeux rouges d’émotion, Jean-Philippe Pleau a préféré s’entretenir avec le jeune homme en privé après l’entretien.
De 3 000 à 53 000 exemplaires de son livre
Le sociologue se dit heureux et impressionné par le succès de son livre. “J’ai écrit ce livre dans mon bureau en me disant qu’il y aurait 3 000 personnes qui le liraient et que ce serait fini”, a-t-il admis dans un entretien avec Le Soleil. L’auteur avait tort. Sur 3000 exemplaires vendus en quatre jours, le roman Rue Duplessis est en réimpression pour passer à 53 000 exemplaires.
Rue Duplessis ne s’arrêtera pas à la publication d’un livre. «Nous travaillons sur des projets d’adaptation, notamment au théâtre», précise l’auteur. Cela sera annoncé prochainement. »
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