Nous voilà désormais à la rencontre de Suzanne Fougères. Ou plus précisément son fantôme. Et même ceux qui, contrairement à Marie Desplechin, ne sont pas fous de ces histoires, se laisseront emporter par ce récit bien mené, nourri d’humanité, de sincérité et d’une intemporalité qui lui donne une belle consistance. Parce que le temps peut s’accélérer, les enfances continuent de se ressembler, à l’image des vacances de la Toussaint – ou d’automne – chez les grands-parents où la visite au cimetière prime sur la récolte des bonbons.
Très excitée à l’idée de participer à la fête d’Halloween, la jeune Inès va vite déchanter. Sa grand-mère refuse de céder aux sirènes commerciales et décide de confectionner un costume maison qui lui va à ravir. Un drap usé et deux trous ronds pour les yeux suffiront à transformer Inès en un redoutable fantôme. La petite fille ne voit pas du tout les choses de la même façon. Hors de question pour elle de sortir avec un costume DIY. Elle préfère pâlir et renoncer à la fête tant attendue…
C’est à ce moment qu’un autre fantôme entre dans sa vie, discrètement d’abord, comme une voix qui lui murmure à l’oreille, puis plus insistante, au point de devenir presque harcelante. Suzanne, qui aurait aujourd’hui plus de 100 ans, mais dont la vie s’est arrêtée brutalement à l’âge de 12 ans.
Des jeunes filles au fort caractère
Complice à tout moment
Commence alors une relation de plus en plus intime entre Inès et Suzanne, qui devient une complice constante, une amie imaginaire, un remède à la solitude. Ensemble, les deux filles vont surmonter plusieurs obstacles pour retrouver leurs racines. Une quête qui peut parfois devenir infinie et une histoire qui grandit au fil des pages.
Que Marie Desplechin s’intéresse aux histoires de fantômes est surprenant. “L’histoire a pris le dessus. Le fantôme est le passé que nous portons avec nous. De nombreux enfants souffrent de ne pas être punis. J’ai une famille qui n’a jamais quitté le nord de la France depuis des générations. Ce que je voudrais dire aux enfants, c’est que les fantômes ne sont pas une idée abstraite. Nous sommes tissés de cela. Remonter l’histoire de votre famille et de votre pays a un côté aventureux. Un nom, c’est déjà une histoire et quand on raconte cela aux enfants, ils sont fascinés. Cela leur donne une place dans la vie. nous dit l’auteur pour qui la vie est parasitée par la présence des morts. “L’espace entre la vie et la mort est imaginaire. J’ai toujours souhaité, lorsque je perdais des amis, qu’ils viennent me hanter. Mais ça n’a jamais fonctionné. » regrette notre interlocuteur.
Lecture maudite
Frissonner, flirter avec le danger, dépasser ses limites : tous les enfants aiment ça, le temps… d’une histoire. On se souvient entre autres de l’incroyable succès, dans les années 2000, de la collection Chair de Poule. Moins effrayant mais délicieusement étrange, Lecture maudite proposer dix histoires effrayantes, comme l’annonce la pochette, et laisse une place discrète mais efficace aux phénomènes surnaturels. Qu’il s’agisse des tableaux customisés par Charlie lors de la visite scolaire au musée dont certains éléments disparaissent sans prévenir, d’une nuit sous la tente qui pourrait se terminer sous les crocs de Bob le boucher, un sorcier est enfin venu libérer le village du de l’horrible écuyer Bruce Mac Dougall ou du chemin des morts que Malo n’ose emprunter à vélo, ce chemin par lequel étaient autrefois transportés les morts de Malendure et d’autres villes environnantes pour rejoindre le cimetière de Pigerolle. Certains disent que ce chemin est hanté. En tout cas, Lina et Malo pourraient effectivement y croiser un fantôme.
Dans ses nouvelles pour enfants à partir de 7 ans, l’auteure Céline Gourjault, de sa plume limpide, mêle habilement l’extraordinaire à l’ordinaire, avec juste la dose de suspense nécessaire pour faire trembler un peu…
⇒ Le fantôme de Suzanne Fougères | Roman | Marie Desplechin, L’école des loisirs, coll.neuf, 158 pp., 12 €. A partir de 9 ans.
⇒ Lecture maudite. Des histoires à faire vibrer | Collecte | Céline Gourjeault et Gemma Palacio | Amaterra, 180 pp., 16 €. A partir de 7 ans.
EXTRAIT
« Enfin… je dors la plupart du temps ! Je me réveille de temps en temps pour me promener dans le village. Je mène ma petite enquête sur les naissances et les décès. C’est drôle de retrouver les enfants grands et les adultes âgés. Je fais le point et me rendors. Je pense que c’est la même chose pour tous les fantômes, non ?.
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