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Au centre de l’écosystème du livre

Certes, ce sont les ventes qui motivent finalement les acteurs de la « chaîne du livre » à se réunir dans un salon pour célébrer une publication récente ou un auteur dans l’air du temps. D’autant que, sans être hors de portée du porte-monnaie, la location d’un kiosque demeure un coût, surtout pour les auteurs émergents et ceux qui s’auto-éditent… et ils sont « de plus en plus nombreux en Outaouais », constate Mme Legault-Dallaire.

“Oui, il faut penser au côté business, mais c’est bien plus que cela.”

« Un salon, c’est un accès à la littérature, un lieu de mise en avant de la culture, explique-t-elle. C’est un espace qui « donne accès à des auteurs, des rencontres, des tables rondes et toutes sortes d’activités organisées autour du salon, il va donc bien au-delà du simple fait d’acheter ou de vendre des livres », puisqu’il permet de nourrir les lecteurs, de provoquer des découvertes. , développer l’imagination et alimenter les débats.

“A fair is access to literature,” says the president of the board of directors of the Corporation du Salon du livre de l’Outaouais, Claudia Legault-Dallaire. (Etienne Ranger/Le Droit)

D’ailleurs, l’appellation « chaîne du livre » est dépassée, précise Mme Legault-Dallaire.

Il convient désormais de privilégier « écosystème du livre », appellation plus inclusive (on accueille entre autres les bibliothèques) et qui s’éloigne de l’image mercantile faisant de la transaction financière le dernier maillon de la chaîne. Alors que la « chaîne » évoquait sa dimension commerciale – une image réductrice – « l’écosystème » met l’accent sur l’interdépendance du secteur, suggère celui qui est avant tout libraire, copropriétaire de la boutique Bouquinart, à Aylmer.

« Fédératrice », Mme Legault-Dallaire entend plus que jamais œuvrer à « enrichir les liens entre tous les différents acteurs du secteur », pour que le SLO puisse s’épanouir encore davantage.

L’ampleur, l’achalandage et la réputation font du SLO le 3e salon du livre en importance au Québec. (Patrick Woodbury/Le Droit)

À ses yeux, les salons littéraires se trouvent précisément « au centre » de cet écosystème, puisqu’ils sont le point de rencontre de l’ensemble de ses parties prenantes : auteurs et associations d’auteurs, éditeurs, imprimeurs, exploitants, diffuseurs, distributeurs. , libraires, bibliothécaires. Sans oublier bien sûr les lecteurs.

Globalement, l’environnement est « solidaire et proactif », mais chacun a parfois tendance à chercher à « se mettre à l’abri ». « Chacun a ses réalités, ses enjeux et j’ai l’impression qu’on oublie parfois les réalités des autres », partage celle qui siégeait au conseil d’administration de SLO Corporation depuis 2018, avant d’être élue. président, le 11 septembre.

Or, « le but d’un salon du livre est de rassembler tous ces acteurs pour trouver ensemble des solutions. […] Ce serait bien si nous parvenions à parler d’une seule voix.

Courtiser le privé

“C’est tous ensemble que nous pourrons soit frapper à la porte du gouvernement pour dire ‘Trouvez-nous une enveloppe’, soit trouver des solutions internes” liées à la recherche de nouveaux partenaires privés – et à l’établissement des paramètres qui régiront les futurs mécénats.

Courtisant le secteur privé, « je ne dirais pas qu’on hésite à aller trop loin dans ce sens, on pense même qu’il faut le faire », compte tenu du relatif déclin de la générosité des pouvoirs publics.

« Nous avons déjà des mécènes qui nous aident financièrement. La question est pourquoi devons-nous les parcourir ? Je trouve dommage qu’il n’y ait pas plus de fonds [publics] pour la culture. »

— Claudia Legault-Dallaire

Reste qu'”il faut se demander comment bien faire”, ce recours au privé : “il y a des questions éthiques à se poser, il faut respecter les valeurs du spectacle.” Mme Legault-Dallaire ne veut pas inonder le salon de commanditaires, ni dupliquer le salon, par exemple en sélectionnant deux institutions financières concurrentes.

« Nous commençons à avoir de plus en plus de partenaires privés », constate-t-elle. Et ceux-ci rentabilisent certaines activités du salon, ou les rendent plus animées. « Mais jusqu’où sommes-nous prêts à aller ? » demande-t-elle. Faut-il associer des noms de sponsors aux espaces ou aux activités du salon ?

“Nous ne sommes pas tous d’accord sur ces questions, mais nous sommes tous d’accord pour pousser la réflexion plus loin.”

Il manque un joueur

Cependant, autour de cette table de discussion, il manque un acteur crucial.

En Outaouais, un acteur brille par son absence, au sein de l’écosystème du livre : les éditeurs, rappelle-t-elle. Ce qui handicape quelque peu tous les autres acteurs. Ceci, même si « le marché du livre est en croissance – et le livre québécois encore plus » partout dans la province.

«Et je ne vois aucun signe de déclin, malgré des réalités économiques plus difficiles», ajoute Mme Legault-Dallaire, faisant référence à la situation inflationniste qui touche l’ensemble de la société.

(Bookseller L’Exèdre)

Les librairies dans leur ensemble « ont vécu, encore une fois, un 12 août complètement fou ! ajoute-t-elle pour illustrer son propos. Le 12 août, c’est la date où j’achète un événement littéraire québécois ! encourage les lecteurs à s’arrêter dans une librairie.

Si certains acteurs du secteur peuvent paraître inquiets, « c’est peut-être parce que, bon gré mal gré, le prix des livres augmente et les frais fixes des libraires augmentent également. Mais je n’ai aucun souci. Notre pourcentage [marge bénéficiaire] reste le même. Les lecteurs sont vraiment là, ils achètent, ils aiment lire, la rentrée littéraire bat son plein. C’est incroyable la qualité littéraire que nous avons aujourd’hui. En tant qu’amatrice de littérature québécoise, je ne sais même pas où ranger tous les livres que j’ai envie de lire… Il y en a trop !

D’une manière générale, les librairies indépendantes ne se marchent pas sur les pieds et vivent en bonne harmonie, chacune ayant réussi à trouver un créneau que les autres n’exploitent pas, explique-t-elle.

« Il n’y a pas beaucoup de librairies au pied carré en Outaouais. La plupart sont concentrés sur le territoire de Gatineau. Et il n’y a pas de chaîne non plus. (Une librairie devient une chaîne composée de quatre succursales.)

C’est aussi le manque d’accessibilité aux livres dans les zones rurales qui a poussé le SLO à développer des Caravanes littéraires, une initiative permettant à une diversité d’auteurs de se déplacer dans des zones plus éloignées des grands centres urbains, à la rencontre du public scolaire.

Par ailleurs, les achats des bibliothèques publiques – dont « les budgets n’ont pas changé pour le moment », dit-elle – résistent.

Les éditeurs

Depuis que la maison d’édition gatinoise Vents d’Ouest a interrompu ses activités en mars 2020, « il n’y a plus d’éditeur en Outaouais; de toute façon, elle n’est plus diffusée largement à travers le Québec», déplore le nouveau président du SLO.

La petite Neige-Galerie, cofondée par le caricaturiste Christian Quesnel, a fermé ses portes il y a quatre ans. Il reste encore La Note Verte, une petite maison d’édition (et école de musique) basée à Maniwaki. Et, à Gatineau, la maison Les Alluvions, lancée en 2022 par l’auteur-éditeur Jean-Rodrigue Paré, qui a entre-temps publié trois titres dont deux romans auto-édités. (A Ottawa il y a aussi les éditions David et L’Interligne)

Cependant, leur influence à l’extérieur de l’Outaouais est « très limitée », car ils n’ont l’appui d’aucun des grands distributeurs qui pourraient assurer la diffusion de leurs œuvres à travers le Québec ou même dans le reste du Canada.

En l’absence d’un éditeur local assez fort pour briller, les auteurs outaouais en sont réduits à chercher ailleurs, très loin, où nicher leurs écrits ou accepter de s’auto-éditer, ce que font plusieurs membres de l’Association des auteurs de l’Outaouais (AAAO). , dans le passé. Un choix qui ne facilite pas leur influence, estime Claudia Legault-Dallaire.

Les auteurs et éditeurs indépendants parviennent cependant à trouver cette visibilité au SLO, où ils sont toujours les bienvenus, plaide-t-elle.

Voir la région désertée par les éditeurs l’attriste : « Pourtant, les talents ne manquent pas dans la région. C’est même incroyable la quantité de talents que nous avons !

« La quantité d’œuvres littéraires provenant de l’Outaouais est incroyable ! C’est une offre riche – et largement distribuée partout au Québec – et nous en sommes heureux et fiers. Sur le salon, nous ne nous sommes jamais « forcés » à mettre en valeur les talents locaux, cela s’est fait naturellement.

Le SLO ou la Maison des Littéraires pourraient-ils envisager de prendre une part de ce rôle d’éditeur local ?

Prudente, la présidente du SLO ne répondra pas à cette question avant d’avoir eu l’occasion d’en discuter avec les membres de son conseil d’administration. Créer une entreprise culturelle n’est « jamais facile », mais démarrer une maison d’édition et la maintenir à flot est un défi particulier, estime-t-elle. “C’est beaucoup de travail, de temps, d’énergie.”

 
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