La lutte d’influence entre AmazoneAmazone et les libraires, quant à la régulation du marché du livre, se font plus entendre que jamais, après une année où l’Américain s’est vu imposer des frais de port qu’il combat vigoureusement. Depuis le 7 octobre 2023, toutes les livraisons de livres à domicile en France, jusqu’à 35 euros, doivent être accompagnées de frais de port d’au moins 3 euros. Pour y échapper, c’est très simple : il suffit d’acheter dans un point de vente physique, qu’il s’agisse d’une librairie, d’un hypermarché ou d’une maison de presse. Peut-être après la commande.
La mesure vise à protéger les librairies. Emmanuel Macron, en le défendant en mai 2021, souhaitait des frais de livraison sur lesquels les libraires pourraient s’aligner et qui ne seraient pas ceux d’Amazon. ” Ce prix du livre unique est une force du modèle français », a déclaré le Président de la République.
Au bout d’un an, difficile de savoir à quel point les habitudes des Français ont changé. Les libraires ont-ils gagné une clientèle qui se serait détournée de la plateforme de vente en ligne ?
Un chiffre d’affaires top secret
Le plus simple serait de comparer l’évolution des ventes de livres du géant né en 1994 en tant que libraire et celle du marché dans son ensemble. Problème : Amazon ne divulgue aucun chiffre. La politique du groupe n’est jamais de détailler son chiffre d’affaires par pays (réparti uniquement entre l’Amérique du Nord et le reste du monde), et encore moins par secteur.
« Depuis le 7 octobre 2023, le marché du livre en France a mieux fait que résister, il a légèrement progressé. Le marché d’Amazon est probablement en baisse, mais c’est à eux de le dire. Si leurs chiffres le montrent, qu’ils les publient », raconte à l’AFP, le délégué général du Syndicat français de la librairie, Guillaume Husson.
Et d’ajouter : « Les chiffres des librairies nous apprennent que les envois diminuent chez ceux qui les ont utilisés, mais qu’il y a une augmentation assez importante du click and collect », retrait des commandes en magasin, sans frais de port.
Amazon défend haut et fort « l’accès aux livres » pour les Français ne disposant pas d’une librairie locale. Il cite une étude Ifop de septembre 2023 pour laquelle il a financé : 75 % des ruraux qui achètent des livres en ligne déclarent le faire » en raison de l’éloignement des points de vente « . Lundi, il a publié une nouvelle étude Ifop pour étayer ses arguments.
Choisissez Amazon ou lisez moins
Dans cette enquête auprès de 12 005 personnes en France, réalisée en ligne du 30 juillet au 27 août, 62 % ont répondu que la mise en place de ces frais de port « affecte [leur] pouvoir d’achat »contre 38% pour qui cela n’a eu aucun effet.
64 % de ceux qui achètent des livres déclarent le faire “plus fréquemment” dans les points de vente physiques, soit l’objectif affiché de la mesure gouvernementale. 56 % d’entre eux ont « réduit » globalement leurs achats en préférant emprunter « des livres à des proches », et 51 % ont également « réduit » leurs achats au profit d’emprunts à la bibliothèque.
« Dans un pays où plus de 90 % des communes ne disposent pas de librairie, imposer des frais de port obligatoires sur les livres revient à taxer la lecture, obligeant de nombreux Français à choisir entre payer plus ou lire moins. », déplore le directeur général d’Amazon.fr, Frédéric Duval, cité dans un communiqué.
Saisi par l’entreprise, la justice administrative doit encore se prononcer sur la légalité de ces frais de port obligatoires. L’avis de la Cour de justice de l’Union européenne, demandé par le Conseil d’État, est attendu dans les prochains mois.
Selon les chiffres publiés par le ministère de la Culture, les grands magasins culturels (Fnac, Cultura, Espace Culturel Leclerc…) étaient en 2023 les premiers vendeurs de livres neufs, avec 28,4 % du marché, devant les librairies. (23,3%) et sites InternetInternet (22,2 %).
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