« Mes livres sont tous à la gloire de Dieu »

Le dogue a-t-il lime ses crocs ? L’auteur culte de
Dahlia noir il a maintenant Dieu dans sa bouche et sa foi en bandoulière. Alors que l’écrivain, connu pour ses humeurs imprévisibles et ses coups de gueule, terrorise habituellement son entourage et les journalistes qui se succèdent pour l’interviewer (dûment briefés sur ses revendications et sujets interdits : Trump, les élections à venir, sa vie privée…), il apparaît ce matin-là souriant et chaleureux dans les bureaux parisiens des Editions Rivages. Un miracle ?

Nous l’avons simplement connecté dès le départ à son héros narrateur, Freddy Otash, et c’est ce qui compte le plus pour lui. Parce que son roman au titre ironique, les Enchanteurs, qui plonge dans les recoins les plus sordides de la Babylone hollywoodienne des années soixante, c’est avant tout le parcours d’un ex-flic corrompu jusqu’aux os, un homme possédé par le mal (il commet un assassinat dès l’ouverture du livre) et auquel le romancier propose un geste rédempteur à la fin des plus de 600 pages de sa sombre odyssée : dans les toutes dernières lignes.

Si la chronologie de l’histoire n’est pas anodine, centrée sur l’été 1962 et les enquêtes croisées qui ont suivi l’overdose de Marilyn Monroe, la mort de la star n’est que l’écran de fumée qui permet à l’écrivain d’exposer les vices qui gangrènent la société américaine. , dont l’innocence est à jamais perdue. Faire remonter à la surface les péchés les plus innommables des États-Unis d’après-guerre, laisser son héros patauger dans la boue la plus sombre avant d’être enfin touché par la grâce, telle est l’ambition.

Et lorsque le grand James Ellroy parle du moment du passage de l’obscurité à la lumière, les larmes lui viennent aux yeux. L’homme a eu une trajectoire égale en violence à celle de ses personnages, une mère assassinée alors qu’il avait 10 ans. Freddy Otash est son côté obscur. Et ne vous y trompez pas : le roman est toujours aussi grossier, trash, les mots ne le sont pas.