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Italo Calvino, édition Yves Hersant, « Romans » (Gallimard)

L’écrivain collectionné. Faire entrer Italo Calvino (1923-1985) dans la prestigieuse « Bibliothèque de la Pléiade » est une évidence, étant donné l’importance d’un écrivain et d’une œuvre internationalement reconnus. Mais c’est aussi un double défi, car d’une part cette œuvre, vaste et diverse, résiste à toute classification dans des genres littéraires prédéfinis, et d’autre part, l’auteur n’était pas très friand, concernant ses textes, de commentaires, de gloses ou d’exégèses plus ou moins savantes et plus ou moins éclairantes. D’autant qu’il expliquait lui-même pas mal, dans des entretiens ou des préfaces, son œuvre, son contexte, ses sources d’inspiration, sa technique d’écriture, en bon oulipien au moins aussi soucieux du processus créatif que de son résultat final, qu’il envisageait d’ailleurs avec distance, humour et modestie.

Pour cette entrée au panthéon des lettres, le maître d’ouvrage, Yves Hersant, a logiquement choisi les plus immédiates, à savoir les romans de Calvino. Huit au total, qui s’étendent de 1947 à Sentier du nid d’araignée – encore complètement imprégné, selon son auteur dans une note de 1960, d’un « néoréalisme » héritage social et prolétarien hérité de la guerre, de la Résistance et de son appartenance au Parti communiste – jusqu’en 1983, avec Monsieur PalomarDes romans, certes, mais volontiers expérimentaux, et parfois déstabilisants pour la critique.

Le cœur du volume est constitué par ce qui était attendu avant tout : la trilogie fabuleuse (au sens littéral, proche du « fantastique ») que l’écrivain décrira plus tard comme « cycle complet »parce qu’il n’a pas eu de suite et qu’il s’intitule Nos ancêtres. À ses yeux, Le vicomte fendu (écrit en 1951), Le baron dans les arbres (écrit en 1956-1957), et Le chevalier inexistant (composé en 1959), constituent « L’arbre généalogique des ancêtres de l’homme contemporain »Le premier, écrit comme un défi à ses débuts ratés, se voulait une allégorie de l’homme contemporain. Le second, plus optimiste, est « un roman, au sens le plus traditionnel du terme »dit Calvino ; et Cosimo del Rondo est le seul de ses héros auquel l’écrivain s’identifie. Quant au dernier, avec Agilulf dans son armure vide comme héros, écrit à une époque plus incertaine, en pleine guerre froide, Calvino voulait qu’il soit, pour le lecteur, juste « un divertissement ». On aime la diversité des époques dans ces pastiches historiques en désordre – XVIIet et XVIIIet siècles, le temps de Charlemagne – et le fait que, dans chacun d’eux, un moi-narrateur, un personnage réel, mêle constamment son grain de sel au récit.

L’œuvre d’Italo Calvino, publiée à l’origine en français entre Albin Michel (Le vicomte fenduen 1955), Julliard (Le sentier du nid d’araignéeen 1978) et, pour tout le reste, le Seuil (depuis Le baron dans les arbresen 1960, jusqu’aux recueils de textes posthumes), est désormais entièrement publié chez Gallimard, et a bénéficié de nouvelles traductions. Un dépoussiérage nécessaire pour un univers qui se retrouve ici dans ce qu’il y a de plus séduisant et de plus accessible, la trilogie Nos ancêtres. Logiquement, d’autres volumes réunissant les récits et les essais devraient suivre un jour.

Italo Calvino, aux éditions Yves Hersant
Romans
Gallimard
Traduit de l’italien par Roland Stragliati, Yves Hersant, Martin Rueff, Christophe Mileschi
Tirage : 14 000 exemplaires.
Tarif : 69 € jusqu’au 31/12/2024, puis 76 € : 1328 p.
Numéro de série : 9782070115655

 
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