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Faut-il avoir un travail bien rémunéré qui vous tue lentement, ou faut-il miser sur la liberté même si cela signifie être fauché ?

Dix ans de culture coréenne à Bruxelles

On pense à ce roman en lisant Bienvenue à la librairie Hyunam. Encore un succès en librairie du jeune auteur Hwang Bo-Reum, cette fois en Corée du Sud. Non pas pour le côté fantastique, mais pour sa dose de sagesse salvatrice. Les éditions Picquier ont décidé de publier ce roman en français durant cet automne 2024, grâce au travail d’un duo de deux traductrices : Hyonhee Lee et Isabelle Ribadeau Dumas.

Tout perdu

Sans surprise, il s’agit donc de la librairie Hyunam, récemment ouverte par Yeong-ju, une femme que l’on imagine approcher de la quarantaine (les femmes d’un certain âge sont apparemment appelées Ajummas en Corée), dans un quartier plutôt désert de Séoul. Le défi est immense, pour elle, dans un pays qui délaisse la littérature et a les yeux rivés encore plus que nous sur les écrans : la moitié des adultes coréens déclarent ne pas ouvrir un seul livre par an.

Petit à petit, la librairie va attirer de nouveaux clients à la recherche d’un endroit paisible et donc, tous un peu perdus. Il y a d’abord Min-jun, un jeune homme qui quitte l’école et se rend compte que toutes les choses qu’il avait faites jusqu’à présent, “C’était pour trouver du travail. Malheureusement, malgré ses nombreux entretiens d’embauche, Min-jun continue d’être rejeté. Donc, ce muet “« ni heureux ni malheureux » arrête de te battre et accepte de devenir barista dans la librairie.

On croise aussi une femme à la dérive qui crochete toute la journée, un écrivain à la mode épuisé, un lycéen qui ne voit plus l’intérêt d’aller en cours ou encore une femme qui s’est mariée et commence à regretter son projet. Sans oublier notre libraire Yeong-ju qui vit elle aussi avec le poids de son passé sur les épaules. Comme le personnage du magnifique film de Wim Wenders : Des jours parfaits.

Les librairies Filigranes ont quatre mois pour trouver un repreneur et éviter la faillite. « Nous avons bon espoir de trouver une solution »

La crise du travail

Dans ce huis clos quasi total au milieu de ce petit monde qui tente de s’améliorer, les dialogues sont très souvent philosophiques. Est-il sérieux de ne pas avoir de rêves et de se contenter d’une vie « simple » ? Est-il préférable de poursuivre ses rêves quand sa quête est une torture ? Que faire si l’on atteint son rêve et qu’on est toujours malheureux ? Faut-il avoir un travail bien payé qui nous tue à petit feu ou miser sur la liberté quitte à être ruiné ? Entre autres… Dans un pays où il a été question l’an dernier d’augmenter la semaine légale de travail à 69 heures, ces réflexions semblent importantes, voire vitales…

Parfois, certains d’entre eux semblent évidents. D’autres fois, la réflexion s’avère plus profonde. Dans tous les cas, nous sommes inévitablement amenés à nous interroger à notre tour sur les choix que nous avons faits. Histoire de revenir un peu plus sur les traits laissés par nos doutes « covid ».

Ce livre est aussi un bel hommage au métier de libraire et aux défis que ces métiers doivent relever. À travers des ateliers d’écriture, la qualité de son café, ses conseils (le roman distille de nombreuses références à des livres, des films et des documentaires), les conférences organisées, Yeong-ju cherche à attirer les clients, bien sûr, mais surtout à les aider à se sentir mieux. Il y est beaucoup question du pouvoir des livres sur nos vies. Comment s’impriment-ils en nous alors que nous ne nous souvenons parfois plus du contenu ? Comment la lecture d’un livre dépend énormément du timing et comment les mots peuvent nous rendre plus lucides et empathiques.« Plus il y a de lecteurs, plus le monde devient meilleur. »écrit, très justement, Hwang Bo-reum. Un livre sympathique qui a évidemment remporté le prix des libraires coréens en 2022.

« Bienvenue à la librairie Hyunam » | Roman de Hwang Bo-reum, Picquier éditions, 360 pp. | Prix 22 €

 
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