♦ « Donner de la vie aux jours » d’Anne-Dauphine Julliand
C’est en retenant notre souffle que nous ouvrons le dernier livre d’Anne-Dauphine Julliand. Comment aborder une telle souffrance ? Car, le dit-elle sans ambages dès l’avant-propos, le sort a frappé une troisième fois. Après sa fille Thaïs, décédée en “trois ans et trois quarts» d’une maladie génétique, dont la courte vie a touché les lecteurs de Deux petits pas sur le sable mouillé (Les Arènes, 2011). Après Azylis, qui souffrait de la même maladie que sa sœur, âgée de 10 ans et demi, dont la perte, Anne-Dauphine Julliand a témoigné dans Consolation (Les Arènes, 2020), had caused indescribable pain, « celui qui déchire l’âme. Elle ne raconte pas d’histoire. Anne-Dauphine aurait dû “arrête là», garder pour elle ce qui restait pour que sa famille puisse vivre. Mais, la veille de ses 20 ans, son fils aîné, Gaspard, décède.
Devant l’abîme qui s’ouvre sous ses pieds, “il n’y a rien à écrire« . « Et pourtant, j’écris. Parce que je suis vivant. Pour ceux qui sont vivants. J’écris au nom de tout mon peuple. Ceux là-haut et ceux-ci. J’écris le lien. J’écris ce qui nous fait avancer. j’écris la vie», explique l’auteur en préambule de ce livre consacré à Arthur, son plus jeune fils.
La vie malgré tout, la vie plus forte que tout. C’est ce qui ressort de ce texte que l’on lit d’une traite. “Ajouter de la vie aux jours», cette phrase du professeur Jean Bernard, qui donnait déjà le ton de Deux petits pas sur le sable mouilléest le titre de ce nouveau livre. Car la vie impérieuse rappelle la mère qui vient d’entendre l’intolérable. « Votre fils s’est suicidé. » Dans le néant de son « retrait intérieur», le bruit de son cœur est évident : « Un battement sourd. Puis un autre. Badam. Et un autre. Et encore un autre. Badam. Badam. Chaque fois plus intense, plus rapide. »
Quand le destin persiste, quand la souffrance brûle au fer rouge, quand le cœur implose, Anne-Dauphine entend cette femme, rencontrée lors d’une dédicace de son précédent livre, qui lui avait raconté le suicide de sa fille. Elle traverse la France pour venir aux funérailles de Gaspard et lui murmure à l’oreille : « Nous pouvons y survivre. » Oui, c’est possible « accepter la douleur et savourer la joie», sourire à nouveau, effrayer les ténèbres. Grâce au vermillon d’un vernis à ongles, il est possible de retrouver la douceur du printemps.
Edition Les Arènes, 144 p., €18
♦ « Symboles dans la peinture » de Robert Bared
« Le langage symbolique est par définition codé. » C’est pour ouvrir l’accès à ces codes que cet ouvrage propose un décryptage de 90 symboles récurrents dans la peinture occidentale, classés par thèmes : temps, espace et matière, nombres, couleurs, faune, flore, objets, parties du corps… « Le symbolisme dépasse le pouvoir des sens (…) : il ouvre l’espace de représentation à ce qu’il ne représente pas », des références culturelles que nous avons oubliées ou perdues. Ce bel livre d’art restitue, exemples à l’appui, le sens de ces symboles, dans leur ambivalence, changeant au fil des siècles. « Au pays des symboles, les bêtes parlent, les miroirs signifient avant même de penser, les fleurs libèrent leur couleur dans les jardins choisis, les dieux et les mortels portent des masques invisibles. »
Hazan, 216 p., 160 illustrations, 45 €.
♦ « Le Dieu des bêtes » de Fabrice Hadjadj
« Seigneur, vraiment, tes pensées ne sont pas nos pensées ! Qu’est-ce qui vous passait par la tête lorsque vous avez inventé l’yctérope ? » Éveiller en lui l’enfant émerveillé qui découvre l’infinie diversité de la vie, y compris la réalité « va au-delà de la fiction », le philosophe Fabrice Hadjadj entraîne son lecteur dans le grand bestiaire de la Bible. L’agneau immaculé, l’âne qui parle, la fourmi et l’abeille données en exemple, l’éponge au vinaigre tendue au Christ en croix… provoquent une légère réflexion spirituelle, philosophique et théologique, assaisonnée de fables, de « Sermon aux cochons » et de nombreuses touches d’humour. Comme les créatures qu’il célèbre “comme un camouflet venu de l’infini”, l’auteur livre ici un ouvrage foisonnant, un voyage à travers les Écritures aussi riche qu’insolite.
Desclée de Brouwer, 336 p., 19,90 €
♦ “Il nous aimait” par le pape François
Au cœur d’un monde déshumanisé, le pape François nous offre un texte d’une étonnante pertinence. Dans cette encyclique publiée à l’automne – la quatrième de son pontificat – il fait du Sacré-Cœur la clé de voûte d’une spiritualité à la fois intérieure et fraternelle. De saint Jean à Thérèse de Lisieux, en passant par Marguerite-Marie Alacoque, le pontife tisse les fils d’une dévotion vivante où le cœur se révèle comme lieu de sincérité et moteur du changement social. Nourri d’expériences personnelles et de références littéraires, ce texte lumineux réhabilite la piété populaire tout en dressant une synthèse de onze années de pontificat. Une lecture captivante pour ceux qui cherchent le chemin de leur cœur.
Cerf/Bayard/Mame, 144 p., 4,90 €.
♦ « Atlas des pays bibliques » de Jean Emériau
« Quitte ton pays et va dans le pays que je te montrerai. » C’est l’injonction du ciel adressée à Abraham qui marque le début de la grande transhumance des croyants tout autour du bassin méditerranéen. La Bible déploie ensuite un certain nombre de détails de localisation, dont beaucoup ne seront validés ni par la nature ni par l’archéologie. Depuis les voyages de Paul jusqu’à nos jours, l’enchevêtrement des empires et les conséquences des guerres brouillent encore davantage les frontières. Cet atlas des pays bibliques, grâce au soin pédagogique de Jean Emériau son auteur, met de l’ordre dans les données et propose 72 cartes et plans distinguant les régions et les périodes. Les références bibliques sont complétées par des textes anciens et des notes explicatives.
Desclée de Brouwer, 2024, 287p., 25€