Alors que les créations sonores se réinventent au gré des évolutions technologiques et du développement des plateformes de streaming, quel pourrait être l’avenir des livres de musique et des livres CD ? C’est la question à laquelle plusieurs acteurs du livre ont tenté de répondre, jeudi 28 novembre, lors d’une table ronde consacrée à la problématique au Salon de Montreuil.
« Avec la transformation des propositions sonores, l’usage des QR codes, l’intelligence artificielle, les story boxes, la fin du bon vieux livre des records a-t-elle sonné ? “, lancé Dominique Moutel, membre du réseau Ram Dam qui regroupe les acteurs de la création musicale jeune public. Une inquiétude légitime : supplantés par les nouvelles technologies, les lecteurs CD ont par exemple totalement disparu des supermarchés.
« Aujourd’hui, les ventes de livres CD en librairie sont en baisse » (Mélanie Perry, Didier Jeunesse)
« Le marché a beaucoup évolué. Aujourd’hui, les ventes de livres CD en librairie sont en baisse »confirmé Mélanie Perry, directeur de Didier Jeunesse. Malgré ce constat plutôt pessimiste, l’éditeur l’a néanmoins nuancé, expliquant que le patrimoine patrimonial de la maison, porté par Michèle Moreau dans les années 1980, c’est « toujours écouté sur les plateformes musicales ». Un phénomène qui pourrait bien s’accentuer avec l’arrivée de Spotify sur le marché français du livre audio, qui ne représentait jusqu’alors que 2% du secteur de l’édition.
Si les éditions Didier Jeunesse s’adaptent aux pratiques contemporaines, elles continuent néanmoins de se distinguer avec quatre nouveaux livres-CD par an, intégrés à la collection emblématique du catalogue. Intitulé « Les plus belles comptines du monde », cela implique qu’un « collectionneur » puisse se rendre dans des régions reculées de la planète pour découvrir des dialectes peu répandus et peu pratiqués.
Une expérience immersive totale
« Il y a encore des artistes qui souhaitent publier des livres musicaux » a également défendu le co-scénariste Vincent Blavier. Producteur du titre musical Les enfantillages d’Aldebert (Gallimard Jeunesse, 2014), ce dernier a notamment noté que “Certains parents se plaignent de ne plus avoir de CD, car cela implique forcément d’être connecté”. Egalement auteur du conte musical Smartville publié chez Glénat, l’artiste continue d’ailleurs de vouloir « offrir aux gens un spectacle véritablement immersif », que seule une production musicale de qualité peut, selon lui, encore offrir.
« Pour nous, l’audio est essentiel. Après tout, le conte est avant tout oral. » également pris en charge Christine Lumières, fondateur des éditions indépendantes Le jardin des mots. Si la maison n’a pas non plus renoncé à l’objet livre et reste en retrait des plateformes musicales, elle a néanmoins intégré les usages actuels. Ainsi, onze titres de sa collection phare « Les Savoureux » sont estampillés d’un QR code dirigeant le lecteur vers la version audio du titre, disponible sur le site de la maison.
« Le QR code commence à gagner du terrain »
Aujourd’hui, le modèle économique des livres-CD, plus chers à fabriquer, est-il encore viable ? Et continue-t-il à captiver le public ? « Il existe encore quelques prêts de livres-CD dans les bibliothèques, mais il est vrai qu’ils ne sont plus vraiment utilisés dans les voitures, comme avant, lors des longs voyages de vacances.indiqué Anne-Valérie Malavieille de la médiathèque parisienne Marguerite Yourcenar. Le QR code commence sérieusement à gagner du terrain et c’est une option qui permet d’amener les parents qui n’ont plus de lecteur CD à la maison à ce format. »
Concerning the Didier Jeunesse editions, Adélaïde Chataignier, chef de projet musical, a admis que la maison s’était engagée dans un processus de transfert des droits à divers conteurs, pour compenser le manque de popularité du genre. Cependant, tous les professionnels interrogés refusent de croire que le livre-CD puisse être abandonné et restent globalement optimistes quant à son avenir. « La lecture numérique est extrêmement exigeante en termes d’archivage des donnéesindicated Mélanie Perry, L’hébergement Web est coûteux et gourmand en énergie, nous ne pouvons donc pas exclure un retour potentiel aux supports physiques.