l’essentiel
« Le Silence des Ogres » est le sixième livre de Sandrine Roudeix, toulousaine. Un roman émouvant sur la filiation et l’identité. A lire absolument.
Ce merveilleux livre écrit par Sandrine Roudeix, scénariste, photographe et romancière toulousaine, parle de filiation, d’émancipation féminine et de transmission familiale. Il est principalement question d’amour dans « Le silence des ogres » (éditions Calmann-Lévy). L’amour que nous donnons et recevons, l’amour que nous espérons et l’amour que nous n’attendons plus.
Une romancière signe des autographes et des dédicaces lors d’un salon littéraire où elle présente son dernier livre. Soudain, un inconnu se place devant elle et prononce ce nom qu’elle n’a plus entendu ni prononcé depuis si longtemps : Patrice. Patrice est son père. Celui qu’elle a rencontré pour la première fois à 19 ans, celui qu’elle a décidé de ne plus jamais revoir à 28 ans, celui qui, aujourd’hui, vingt ans plus tard, revient semer la pagaille dans sa vie, sa tête et son cœur.
“Dites ce qui n’est pas dit”
Dès qu’elle entend ce nom, elle comprend : on n’efface jamais les brûlures de l’enfance, on n’oublie rien. Cette femme qui renoue, par la force du destin, avec son passé, est-elle Sandrine Roudeix ? « Tout à fait, et c’est parfaitement accepté », dit-elle d’emblée. « J’ai écrit six romans, dont deux entièrement autobiographiques. L’idée principale était de dire ce qui ne peut pas être dit. C’est mon histoire et j’avais en tête Annie Ernaux, qui s’engouffre dans la faille de l’écrivain pour écrire sur une autre… qui est en réalité elle. Ce personnage qui dit « je », est une fille sans père. , c’est un chœur de femmes sans père qui s’adresse à toutes les femmes sans nom, sans amour, sans estime.
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Sur cette toile terriblement délicate, Sandrine Roudeix tisse un fil narratif d’une élégance et d’une force irrésistibles, voyageant à trois époques de la vie du narrateur. « J’ai mis 20 ans pour l’écrire, confie l’auteur. « Depuis l’époque où, dans un café de la place Saint-Georges à Toulouse, j’avais décidé de ne plus jamais revoir mon père. 28 ans plus tard, je savais comment j’allais écrire cette histoire, quelle structure j’allais utiliser, quelle architecture j’allais donner à ce récit. Cette jeune femme, qui n’a vu son père qu’une dizaine de fois au maximum, l’a. besoin de lui, au fond ? A-t-elle besoin de « former une famille » ? La psychanalyse aide bien sûr à mettre des mots sur des mots – ou sur les maux. briser ce silence… »
Porté par une écriture qui oscille entre fulgurances et poésie, « Le silence des ogres » interroge tel un jeu de piste la place d’une jeune femme dans une société patriarcale et le récit intime devient universel. « L’écrivain aime la vérité qui fait mal », écrit Christine Angot, spécialiste de l’autofiction. Sandrine Roudeix répondrait que l’écrivain aime avant tout la vérité qui aide à comprendre et non plus à faire semblant. Pour enfin vivre.