Marc Newson, un livre ouvert

A l’étage de la boutique Taschen Depuis la rive gauche parisienne, les interviews s’enchaînent. Il faut dire que Marc Newson fait partie de ces stars du design. Devant l’Australien installé à Londres, en veste rayée et chemise à carreaux Vichy, des piles de son nouveau livre XXL bleu ciel attendent leur signature. Le temps d’échanger quelques mots avant le départ du marathon.


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IDEAT : Etes-vous heureux d’être de retour à Paris ?

Marc Newson : Se retrouver dans la Ville Lumière est toujours un plaisir ! J’y ai vécu, dans différents quartiers. Mon préféré est sûrement la Butte Bergeyre, près de la place Colonel Fabien, dans le 19e. On y trouve de très belles petites maisons, dont la Villa Zilveli de Jean-Paul Goude, mon voisin de l’époque.

Marc Newson

IDEAT : Qui vous a le plus influencé en tant que designer ?

Marc Newson : J’étais très loin de ce monde, ayant grandi en Australie, mais je me nourrissais de magazines européens, notamment italiens. Évidemment, il s’agissait souvent des mêmes acteurs, des mêmes influences. Il faut dire qu’après la Seconde Guerre mondiale, l’Italie a connu un élan créatif incroyable dans le domaine du design industriel. J’ai été profondément inspiré par cette période, comme beaucoup de designers de ma génération.

IDÉE : Vous avez toujours voulu devenir designer ?

Marc Newson : Pas du tout. Je n’ai découvert ce métier qu’à la fin de mon adolescence. J’ai suivi une formation d’orfèvre et de bijoutier au Sydney College of the , un peu par défaut, je ne savais pas quoi faire. J’étais naturellement créatif et j’ai commencé à construire des choses, des meubles, à apprendre sur le tas, dans les ateliers de l’école.

L'égouttoir à vaisselle Dish Docteur, conçu pour Magis en 1997. © Marc Newson

L’égouttoir à vaisselle Dish Docteur, conçu pour Magis en 1997. © Marc Newson

IDÉE : Quel a été le premier objet que vous avez fabriqué ?

Marc Newson : Je ne saurais pas dire ! Enfant, je passais mon temps libre dans le garage de mon grand-père, qui était rempli d’outils, à bricoler toutes sortes d’objets. À l’époque, nous n’avions pas de smartphones ni de distractions modernes, il fallait s’occuper et fabriquer ses propres objets. J’ai donc construit mon propre monde.

IDÉE : Aujourd’hui, grâce à l’impression 3D, il semble que la fabrication des objets soit encore plus simplifiée.

Marc Newson : L’impression 3D est un outil formidable. Je l’utilise principalement pour prototyper et tester des idées. Cependant, je pense que les jeunes designers doivent être conscients des limites que ces technologies imposent. Il est essentiel de ne pas se laisser limiter par ces limites et de les surmonter en utilisant d’autres méthodes. La technologie, quelle qu’elle soit, doit rester un outil et non une fin en soi.

Dessins d'étude d'objets réalisés par le décapsuleur Stavros, 1997. © Marc NewsonDessins d'étude d'objets réalisés par le décapsuleur Stavros, 1997. © Marc Newson

Dessins d’étude d’objets réalisés par le décapsuleur Stavros, 1997. © Marc Newson

IDEAT : Vous avez conçu votre première montre en 1986, à l’âge de 23 ans, avant de lancer votre propre marque en 1994 et de participer à la conception de l’Apple Watch. Comment avez-vous vécu cela ?

Marc Newson : J’avais acquis une certaine expertise dans le secteur. Ce projet a permis une fusion parfaite entre mes connaissances et cette nouvelle technologie, qui est ainsi devenue très « humaine », anthropomorphique, ne pouvant réellement fonctionner qu’en harmonie avec le corps.

IDEAT : Pensez-vous que les montres connectées ont révolutionné le design des montres ?

Marc Newson : Absolument. Il y a 200 ans, lorsque les montres de poche sont devenues des montres-bracelets, ce fut un changement majeur. Aujourd’hui encore, nous portons nos montres au poignet – l’endroit est idéal. J’ai compris cela en travaillant sur ce projet.

La montre Atmos 568 en cristal Baccarat pour Jaeger Lecoultre, 2016. © Marc NewsonLa montre Atmos 568 en cristal Baccarat pour Jaeger Lecoultre, 2016. © Marc Newson

La montre Atmos 568 en cristal Baccarat pour Jaeger Lecoultre, 2016. © Marc Newson

De plus, le poignet L’Apple Watch reste l’un des meilleurs outils pour prendre son pouls et d’autres données. Personne ne pensait que l’Apple Watch serait un succès. Et finalement, elle a réintroduit la montre auprès d’une nouvelle génération qui avait arrêté de la porter, car elle se contentait de son téléphone portable.

IDÉES : Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez découvert votre chaise Lockheed Lounge dans le clip ? Pluie par Madonna, en 1993 ?

Marc Newson : C’était assez surréaliste car à l’époque, ayant à peine 30 ans, je n’avais pas d’équipe, aucun moyen d’être informé officiellement. Je l’ai découvert – comme tout le monde – en regardant la vidéo sur MTV, qui était une véritable institution à l’époque. Mais en la voyant à travers l’écran, j’avais le sentiment que je n’en étais pas l’auteur.

J’ai conçu le Lockheed Lounge En 1986, elle avait depuis sa propre vie, sa propre carrière. Elle avait évolué toute seule. J’ai toujours eu cette vision détachée de mes créations. Je ne pensais même pas aux bénéfices potentiels pour ma réputation, ma crédibilité, ma carrière ou quoi que ce soit, j’étais obsédée par l’avenir et le prochain projet.

> « Marc Newson. Works 84-24 », Marc Newson & Alison Castle, Taschen, 496 pages, 150 €. Disponible ici.


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