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5 questions sur les guerres en 2025 – Guillaume Ancel – Ne souffrez pas

En ce début d’année 2025, qui laisse espérer que ces conflits sanglants en Ukraine et au Moyen-Orient puissent enfin prendre fin, je réponds à cinq questions importantes qui m’ont été posées par plusieurs médias et auxquelles je ne peux répondre que partiellement. . Cinq questions sur les guerres en 2025.

La guerre en Ukraine peut-elle prendre fin en 2025 ?

Une séquence de négociations s’est engagée depuis au moins début décembre 2024 entre l’équipe du futur président américain Donald Trump (liée à celle de Joe Biden) et l’entourage du président russe Vladimir Poutine. Cette négociation est d’autant plus difficile que chaque protagoniste accélère son mouvement pour arriver en position de force pour la discussion finale qui devrait avoir lieu vers le 20 janvier, pour la cérémonie d’investiture de Trump aux Etats-Unis, date à laquelle il veut démontrer sa capacité à arrêter la guerre si elle ne parvient pas à construire la paix.

Certains analystes estiment que Poutine n’est pas prêt à abandonner et veut continuer sa guerre à tout prix, conformément à ce qu’a dit à juste titre le « maître du Kremlin » par certains de son entourage. Or, cette guerre a un prix exorbitant pour la Russie et lui inflige, entre autres, une inflation de plus de 9 % et des taux bancaires entre 20 et 30 % qui pénalisent l’ensemble de son économie. Par ailleurs, la société russe est fortement affectée par le nombre de morts et de blessés dans ses rangs, les mercenaires étrangers et les soldats nord-coréens « prêtés » par Kim Jong-un ne représentant que quelques pour cent des 500 000 soldats engagés par la Russie contre l’Ukraine.

Les pertes russes estimées à bien plus de 600 000 morts et blessés dépassent le nombre actuellement engagé, autrement dit cette « opération militaire spéciale » a déjà coûté à la Russie plus qu’une armée au complet pour un résultat très limité : moins de 4 000 km2 conquis en 2024, soit 0,6 % de la superficie de l’Ukraine.

À ce rythme-là, il faudrait 10 générations de soldats russes et plusieurs millions de pertes supplémentaires pour conquérir l’Ukraine. Poutine a donc tout intérêt à récupérer une participation intermédiaire – 19 % du territoire ukrainien à ce stade – pour « inventer » une victoire, même partielle.

Cependant, si Poutine refusait l’accord que propose Trump pour arrêter ces combats, il prendrait le risque de voir l’effort de guerre américain augmenter considérablement, car le nouveau président est nettement moins prudent et retenu que son prédécesseur alors que l’armée russe est loin d’être à la hauteur. dominant le champ de bataille.

Donald Trump va-t-il abandonner les Ukrainiens ?

Dans cette négociation, le président ukrainien Volodomyr Zelensky n’a pas vraiment son mot à dire car il est tellement dépendant de l’aide militaire américaine que les Européens ne peuvent pas compenser en l’état. Le courageux président ukrainien devra donc supporter le prix négocié par le parrain américain. Et à moins de démontrer sa capacité à l’accepter et à faire accepter cet accord par une société durement éprouvée par trois années de guerre, Zelensky devra lui aussi quitter sa place après avoir incarné le leader de la résistance ukrainienne.

Il est toutefois peu probable que les États-Unis abandonnent l’Ukraine ; ce serait en effet une humiliation pour les Américains de céder face à la Russie, qui a été leur rivale pendant des décennies de guerre froide. Trump, même s’il imposait un changement radical au Parti républicain, verrait son image particulièrement endommagée s’il ne pouvait pas démontrer qu’il a gagné contre la Russie (dont le PIB est celui de l’Espagne).

Quant à la question de la paix, d’une paix durable au cœur de l’Europe, la discussion de Trump avec Poutine ne l’envisage pas vraiment. Ce sera le fardeau des Européens, qui seront invités à acheter massivement aux industriels américains ce dont ils ont besoin pour se défendre contre l’empire de Poutine, plus menaçant que jamais. Ce sera également un fardeau terrible pour les Ukrainiens, une fois passé le soulagement de la cessation des combats.

Fondamentalement, le seul gagnant de cet accord en Ukraine sera Poutine, c’est aussi pourquoi la négociation dans ces conditions a une « chance » importante de réussir et, en l’absence de paix en Europe, on peut s’attendre à ce que les combats en Ukraine se terminent en 2025.

Netanyahu a-t-il gagné contre le Hamas et contre l’Iran ?

En réponse à l’attaque terroriste du Hamas contre Israël le 7 octobre 2023, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, qui faisait l’objet de graves poursuites judiciaires, a immédiatement lancé une guerre sans merci contre… l’ensemble de la bande de Gaza. Alors que l’armée israélienne a démontré à plusieurs reprises sa capacité à cibler un objectif et à le détruire en minimisant les dommages collatéraux, elle a reçu l’ordre de ravager systématiquement cette étroite bande de 360 ​​km2 et de détruire toute infrastructure permettant de la détruire. y vivre collectivement.

Le Hamas n’existe plus militairement, mais il n’a jamais été considéré comme une armée (contrairement au Hezbollah au Liban). C’est d’abord une organisation politique et religieuse difficile à éliminer par une offensive militaire et qui risque malheureusement de renaître de ses cendres à l’heure d’une génération de Palestiniens qui veulent se venger. Autrement dit, Benjamin Netanyahou a considérablement affaibli le Hamas mais il ne l’a pas détruit. Pire encore, il poursuit la même politique de destruction de la bande de Gaza (bombardements et étouffement de l’aide humanitaire) faisant principalement des victimes civiles, probablement entre 100 et 120 000 morts désormais, dont la majorité sous les décombres. Cela a valu à Netanyahu le droit d’être poursuivi par la Cour pénale internationale, tout comme Poutine.

Avec ce bombardement de la bande de Gaza, Netanyahu a alimenté une guerre tous azimuts contre la coalition de pays organisée par l’Iran, du Hezbollah (au Liban) aux Houthis (au Yémen) en passant par la Syrie de Bachar al-Assad. Cette guerre menée contre les « 7 fronts » n’a été possible que grâce au soutien américain. Il a notamment réussi à faire tomber le régime de Bachar al-Assad en Syrie en révélant aux mouvements rebelles que les Russes avaient massivement retiré leurs capacités militaires en faveur de la guerre contre l’Ukraine. L’effondrement en 12 jours du régime d’Assad après 50 ans de dictature sanglante en Syrie est un véritable succès pour la sécurité d’Israël et la paix dans la région, puisqu’il neutralise un pays géographiquement central dans la coalition dirigée par l’Iran.

Mais ce succès reste à confirmer, c’est le défi d’établir un nouveau pouvoir en Syrie sans que celui-ci ne sombre dans le radicalisme alors que de multiples acteurs tentent de poursuivre leurs propres desseins dans ce pays, de la Turquie à l’État islamique, des Kurdes aux différents pays. les mouvements rebelles, et bien sûr l’Iran. Si ce succès en Syrie est d’abord celui des Syriens eux-mêmes, c’est aussi celui des États-Unis dans la redistribution des cartes politiques au Moyen-Orient, marquant l’échec de la Russie de Poutine qui protégeait jusqu’ici la dictature d’Assad.

L’Iran est sorti très affaibli de cette confrontation contre Israël, qu’il avait probablement déclenchée à la demande de Poutine. Le régime des mollahs semble désormais fragile, concentré sur sa propre survie plutôt que d’alimenter les conflits dans cette région. Avec l’effondrement de la Syrie, l’Iran a compris que la Russie de Poutine n’était plus en mesure de la protéger militairement, ni de la réapprovisionner en systèmes de défense sol-air ou autres armes sensibles monopolisées par la guerre contre l’Ukraine.

Les otages israéliens seront-ils libérés en 2025 ?

Avec un cessez-le-feu prévisible pour début 2025, les otages israéliens devraient enfin être libérés, malheureusement trop tard car la plupart d’entre eux n’auront pas survécu à leurs conditions de détention et aux bombardements systématiques de la bande de Gaza qui ne les ont pas épargnés. Sur les 90 otages qui seraient toujours détenus dans la bande de Gaza, seuls 20 à 30 seraient encore en vie et dans un état déplorable.

La responsabilité première de cette tuerie revient bien entendu à leurs ravisseurs, le Hamas, qui a organisé cette prise d’otages lors de l’attentat terroriste du 7 octobre 2023 contre Israël. Cependant, la politique de Netanyahu, tout en démontrant le contraire, n’a jamais eu pour objectif de les libérer en priorité : les bombardements massifs et quotidiens de la bande de Gaza n’ont pas pu les sauver – bien au contraire – et Netanyahu a laissé tomber à plusieurs reprises les opportunités de trouver un accord de cessez-le-feu. : en septembre 2024 par exemple lorsqu’il préféra lancer une opération militaire contre le Hezbollah au Liban, ou encore fin décembre 2024 lorsqu’il fit échouer une ultime négociation pour rester en état de guerre, alors que son ami Donald Trump n’est arrivé au pouvoir aux États-Unis que le 20 janvier 2025.

Lire aussi : Ukraine, Moyen-Orient, ces guerres épuisantes qui se termineront en 2025

L’Europe va-t-elle enfin se défendre ?

Avec presque trois ans de guerre en Ukraine, au cœur même du continent européen, le moins que l’on puisse dire, c’est que la réaction de l’Europe – en particulier de l’Union européenne – n’est pas à la hauteur. Il faut reconnaître qu’elle a réagi rapidement aux sanctions économiques contre la Russie et à l’aide financière à l’Ukraine. Les résultats sont malheureusement limités en raison notamment du contournement par Poutine de ces sanctions en faisant appel à des pays tiers ou à des sociétés écrans.

Concernant la « puissance militaire » de l’Europe, elle devrait être au moins égale à la somme de celle de chaque pays membre (un total qui représente d’ailleurs 4 fois plus que le budget militaire de la Russie) mais dont la dispersion est telle que L’Europe reste en réalité une « puissance inexistante ». Inexistant pour le principal acteur militaire de ces conflits, les États-Unis, qui considèrent tout au plus l’Europe comme un marché réservé à leur industrie de défense.

La guerre contre l’Ukraine, les menaces répétées et explicites de Vladimir Poutine contre de nombreux pays membres (de la à la Finlande) et l’arrivée au pouvoir de Donald Trump qui remet clairement en cause le contrat de sécurité collective que représente jusqu’ici l’OTAN sont autant de raisons d’investir massivement. dans la sécurité européenne. Cela nécessite un transfert progressif de responsabilité – de « souveraineté » pour reprendre ce terme dépassé – des États membres vers l’Union européenne pour les questions liées à la défense, à commencer par les équipements militaires et donc l’industrie européenne de défense.

Si Trump parvient à geler la ligne de front en Ukraine pour arrêter cette guerre, il a déjà annoncé qu’il n’engagerait pas de soldats américains sur le territoire (pas de bottes au sol). Cela signifie qu’il acceptera néanmoins que l’OTAN soit l’épine dorsale de l’organisation nécessaire à une telle intervention, avec notamment un accès au système de renseignement américain sans lequel cette force de sécurisation de la ligne de démarcation serait myope.

Dans ce scénario d’arrêt imposé des combats en Ukraine, l’Europe devra fournir un puissant « contingent de forces », de l’ordre de 100 000 soldats par an pour pouvoir effectuer deux rotations de 6 mois de 50 000 soldats déployés en Ukraine. . C’est l’équivalent de l’armée française dans son ensemble, qui peut difficilement fournir plus de deux contingents de 10 000 hommes par an (soit 20 000 au total sur les 100 000 requis). Cet effort militaire considérable est à la portée de l’Europe à condition qu’elle considère cette dimension militaire à son niveau, et non plus au niveau beaucoup trop dispersé de chacun de ses membres.


L’année 2025 sera donc un défi pour l’Europe face au gel de la guerre en Ukraine ainsi qu’au rétablissement de la paix au Moyen-Orient où on aurait tort de ne pas investir. Si des décennies de paix lui ont permis une prospérité sans précédent, il est temps pour l’Europe de comprendre que sa sécurité relève aussi de sa propre responsabilité.


 
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