Le ciel rugit aux frontières orientales de l’Europe. La guerre qui déchire les flancs de l’Ukraine voit divers engins volants fendre les airs, en quête de victoire. Avions et hélicoptères, missiles, fusées, mais surtout drones. Ils ne sont certes pas une invention du conflit ukrainien – ils ont déjà participé aux combats au Moyen-Orient dans les années 2010 – mais la guerre russe les a multipliés. Il existe aujourd’hui des millions de machines, parmi lesquelles les FPV règnent en maître, et le secteur de l’armement parie déjà sur l’avenir. De la Silicon Valley aux chaînes de production de Shenzhen, qui héberge la production commerciale du géant chinois DJI, les entreprises technologiques travaillent sur les drones… et les moyens de les contrer.
Dans cette course au progrès militaire, la Chine se montre : le pays de Xi Jinping est champion dans la fabrication de batteries, indispensables aux drones. Ainsi, rappelle Forbes, le plus grand fabricant de batteries en termes de capacité est la société chinoise CATL. Chaque année, elle fabrique 132 GWH de cellules, des composants à peine plus gros qu’une batterie qui composent les batteries.
Avec une exportation importante de ses composants, la Chine inonde le marché mondial des drones de batteries, et est donc en mesure de bloquer les flux de production. L’entreprise américaine de fabrication de drones Skydio a récemment fait les frais de la politique de Pékin : en octobre, la Chine a interdit la vente de composants essentiels, comme les batteries, à plusieurs entreprises américaines.
Piles fabriqué en Ukraine
De quoi donner des cheveux gris aux puissances occidentales, Etats-Unis en tête. Heureusement pour le secteur, dans sa lutte acharnée pour récupérer ses territoires, l’Ukraine semble ouvrir la voie à une production de drones libérée des contraintes chinoises. Ancien pilier du bloc soviétique, le pays est devenu en quelques années passé maître dans l’art de fabriquer des drones, même s’ils sont artisanaux, et fabriqués dans des cuisines ou des garages. En décembre 2023, Volodymyr Zelensky rapportait que le nombre d’unités fabriquées par an était de quatre millions – même si les observateurs s’accordent sur le chiffre d’un million –, un bond numérique gigantesque.
Un essaim mortel qui nécessite à son tour des millions de batteries pour rester en vie. Les quadricoptères de reconnaissance avec une demi-heure de vol nécessitent un approvisionnement constant en batteries fraîchement rechargées pour continuer à fonctionner, explique Forbes. Les drones bombardiers en consomment une quantité similaire. Les très célèbres drones FPV embarquent des batteries plus lourdes que le reste de leur corps. La batterie est au cœur de la guerre.
La production locale de batteries de drones est devenue un sport national en Ukraine, comme en témoigne l’organisation Wild Hornets (Dyki Cherchni, en ukrainien, Frelons sauvage, en français), l’un des nombreux groupes chargés de trouver et d’assembler les composants nécessaires.
Une vidéo sur les réseaux sociaux explique le processus des Wild Hornets. Les éléments constitutifs de ses batteries sont des Samsung 50S, optimisés pour les applications haute puissance et offrant une capacité respectable de 5 000 mAH, détaille Forbes.
Quelques dollars pour un drone
Selon l’organisation, la production locale de batteries de drones est possible, même grâce au financement participatif. Wild Hornets a également relevé des défis plus complexes, comme fabriquer des contrôleurs de vol, les centres de contrôle de ses drones, sur une chaîne de production robotisée. Le produit militaire final coûte au total 65 dollars pour les petites batteries et 90 dollars pour les grandes, comme les batteries de drones commerciaux. Un prix imbattable, et nécessaire, dans un conflit qui consomme environ 10 000 drones ukrainiens par mois, selon le Royal United Services Institute for Defence and Security Studies (RUSI).
« Les drones à longue portée offrent des capacités de frappe relativement peu coûteuses et augmentent ainsi le nombre de cibles pouvant être touchées, tout en réservant les munitions les plus efficaces à des cibles mieux protégées et plus difficiles à atteindre. »» détaillée en octobre pour GEO Léo Péria-Peigné, chercheur en armement et industrie de défense au Centre d’études de sécurité de l’Institut français des relations internationales (Ifri).
Nul doute que cette production low-cost et indépendante est scrutée de près par les grandes puissances internationales désireuses de s’affranchir des composants chinois.
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