“Le compte n’est pas bon”, “Trump a triché”, « Exiger un recomptage ». Depuis le 6 novembre, et la victoire du candidat républicain à l’élection présidentielle américaine, des voix s’élèvent pour remettre en question les résultats. Contrairement aux élections précédentes, ils sont cette fois issus du camp démocrate.
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Dans le discours dans lequel elle a reconnu sa défaite, Kamala Harris a néanmoins admis que même si « Les résultats des élections n’étaient pas ceux que nous souhaitions », « nous devons [les] accepter “. Mais nombre de ses électeurs, surpris par la défaite de leur candidat autant que par son ampleur, ont exprimé leur incompréhension et leur désarroi. Parmi ceux-ci, certains dénoncent une élection truquée et réclament un recomptage des votes.
Marginale sur TikTok, cette remise en question par les démocrates des résultats des élections s’exprime surtout sur les réseaux sociaux « Recount [les voix de l’élection de ] 2024″). Ce n’est rien de plus massif et systématique que le mouvement « Stop au vol » de Trump et de ses militants en 2020, ou « Protégez le vote » lors de la campagne de 2024. Certains posts ont néanmoins atteint des audiences notables, comme un tweet appelant à un recomptage vu plus de 13 millions de fois.
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Le mythe des 20 millions de voix manquantes
Ce discours aux connotations complotistes s’appuie sur des détails insignifiants ou trompeurs. “Ces enfoirés n’auraient jamais compté [les votes] si vite, parce qu’ils n’ont jamais compté aussi vite »» s’enrage ainsi un internaute sur X, en référence au temps qu’il a fallu pour connaître le vainqueur lors des précédentes élections. Mais ceux-ci étaient plus serrés. Comme expliqué Le New York Times Le 6 novembre, l’avance acquise par Donald Trump dans plusieurs Etats clés était suffisante pour le déclarer vainqueur avant même la fin du décompte, Kamala Harris ne pouvant mathématiquement plus le rejoindre.
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Sur Facebook, un autre internaute explique que« Il manque 20 millions de voix »preuve que « quelque chose ne va clairement pas ». Selon une rumeur persistante, Kamala Harris aurait en effet reçu 20 millions de voix de moins que Joe Biden en 2020 (dans d’autres versions, la différence est de 18 millions), un écart jugé anormal et suspect. Le Parti démocrate et son principal comité d’action politique, Priorities USA, dénoncent régulièrement des opérations de « suppression des électeurs », un ensemble de techniques légales et illégales visant à empêcher certains groupes d’exercer leurs droits civiques. En Virginie, par exemple, 1 600 personnes ont été radiées des listes électorales début novembre sur décision de la Cour suprême, sur fond de désaccord entre démocrates et républicains sur leur citoyenneté américaine.
Mais il est hautement improbable que 20 millions d’électeurs aient pu être privés de leur droit de vote. En réalité, ces calculs bancals ne parviennent pas à préciser que Joe Biden avait récolté au total 81 millions de voix en 2020, ce qui constitue un record absolu dans l’histoire américaine, mais que le décompte des voix de Kamala Harris est toujours en cours. Jeudi 7 novembre à 14 heures, le candidat démocrate comptait près de 68 millions de voix, soit seulement 13 millions de moins, alors que le dépouillement se poursuit au Nevada et en Arizona. Elle a déjà dépassé les 65 millions de voix d’Hillary Clinton en 2016.
Interférence réelle et fantasmée
Les accusations les plus graves concernent l’ingérence russe dans les élections. Au moins trois fois au cours des deux dernières semaines, les services de renseignement américains ont dévoilé des vidéos virales promouvant les théories du complot pro-Trump. Ces contrefaçons ont été attribuées à Storm-1516, un groupe de désinformation lié au Kremlin qui opérait auparavant en France pendant les Jeux olympiques.
L’internaute à l’origine du compte AlphaFox78, un militant trumpiste qui a été le premier à relayer une vidéo de faux électeurs haïtiens, a expliqué à CNN avoir été payé 100 dollars par un propagandiste pro-Kremlin pour la publier. Si ces manipulations sont avérées, elles n’ont eu qu’un seul effet « marginaux » sur les bulletins de vote, estime le chercheur en sciences politiques Julien Giry, ceux-ci circulant principalement parmi les électeurs républicains déjà engagés auprès de Donald Trump.
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Certains démocrates dénoncent néanmoins des ingérences électorales massives, quitte à mettre en avant des faits divers – une technique habituellement observée chez les militants complotistes trumpistes. Un utilisateur de “une enquête et un nouveau vote”en partageant quatre extraits vidéo évoquant des urnes incendiées, comme autant d’indices de manipulation électorale. Cependant, même si trois urnes électorales ont bel et bien été incendiées dans les États de l’Oregon et de Washington, ces incidents sont restés isolés. La police ne connaît pas les motivations de l’individu responsable, qui a laissé des messages de soutien à la Palestine, mais la plupart des électeurs concernés ont pu être identifiés et voter à nouveau.
“Aucune preuve d’une activité malveillante”
D’une manière générale, les protestations démocrates dispersées relèvent davantage de la consternation que de véritables doutes sur le système électoral américain. Il n’a pas été trouvé fautif, assurent les autorités fédérales. « Notre infrastructure électorale n’a jamais été aussi sécurisée et la communauté [qui tient les bureaux de vote] jamais aussi bien organisé »se félicite de la CISA, l’agence américaine de cyberdéfense, qui déclare ne pas avoir vu “aucune preuve d’une activité malveillante ayant un impact matériel sur la sécurité ou l’intégrité de notre infrastructure électorale.”
En 2020, Donald Trump a tenté de convaincre le secrétaire d’État géorgien de lui “trouver 11 780 votes” ce qui lui manquait pour remporter les élections. Il a depuis été inculpé de « complot frauduleux contre les Etats-Unis ». Quatre ans plus tard, après une campagne marquée par la diffusion à grande échelle de fausses informations et de théories du complot sur d’hypothétiques tricheries démocrates, il remporte l’élection avec une avance confortable. Les accusations de manipulation de la part des démocrates font désormais l’objet de moqueries de la part des militants trumpistes.
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