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“Lorsque la France a colonisé l’Algérie, toute la partie occidentale de l’Algérie faisait partie du Maroc”

Pour Boualem Sansal, ancien haut fonctionnaire de l’industrie en Algérie, ce plaidoyer pour la langue française est l’occasion d’évoquer l’Algérie d’hier, d’aujourd’hui et de demain et de faire un parallèle entre la situation actuelle de la France et celle de l’Algérie avant la guerre civile. des années 1990. Sur le plateau de l’émission Frontièresl’écrivain qui vient d’obtenir la nationalité française revient ainsi sur des épisodes marquants de l’histoire des relations entre la France, l’Algérie et le Maroc, afin de mieux comprendre l’affaiblissement de son influence culturelle et la perte de vitesse de la francophonie en Afrique et le Maghreb. Au cœur de la culture française, dont la langue est aujourd’hui imprégnée d’influences étrangères, la relation de la France avec ces deux pays du Maghreb occupe en effet une place centrale.

La désignation d’un ennemi, clé de la légitimité du pouvoir algérien

Pour mieux contextualiser l’affaire, Boualem Sansal, qui contrairement à beaucoup de ses compatriotes considère que l’Algérie doit beaucoup à la France, et non l’inverse, remonte le fil de l’Histoire, jusqu’à la colonisation de l’Algérie par la France, la guerre d’indépendance qui a suivi et l’installation d’un «Un pouvoir idéologique à la soviétique», qui tire sa légitimité du peuple par «inventer un ennemi».

Dans le cas de l’Algérie, explique l’écrivain, c’est en l’occurrence la France, qui se maintient dans ce rôle d’ennemi en alimentant un récit destiné au peuple : «nous avons gagné la guerre, nous avons chassé la France, mais à travers le néocolonialisme, elle revient, elle nous crée des problèmes, elle nous vole nos cadres, non pas qu’elle en ait besoin, mais pour que nous soyons dans une situation de régression», résume Boualem Sansal, résumant le discours officiel du régime algérien qui s’emploie à perpétuer un fort ressentiment contre la France.

Dans cette histoire destinée à diaboliser la France, afin de mieux légitimer le pouvoir en place aux yeux du peuple, on retrouve les mêmes éléments de langage que ceux utilisés par l’Algérie à l’égard du Maroc, décrits par le journaliste de Frontières comme “Le grand rival de l’Algérie“, un pays “qui n’a pas été colonisée, mais (a été) placée sous protectorat français pendant quelques décennies“, un pays enfin, “qui ne s’est jamais repenti, qui a réussi à freiner l’islamisme».

Entre les deux pays, les différences sont importantes et le contraste est tel qu’une question se pose : « L’Algérie doit-elle parfois s’inspirer de son rival marocain ?»

Le Maroc, le plus vieux pays du monde

Pour l’auteur du chef-d’œuvre « 2084 : La Fin du Monde »»qui a remporté le Grand Prix de la Francophonie décerné par l’Académie française, il convient de répondre à cette question en se penchant sur l’histoire respective des deux pays, afin de mieux comprendre les choses. Boualem Sansal fait immédiatement un rappel important : «Le Maroc, il faut le savoir, est le pays le plus ancien du monde. Le Maroc existe depuis 12 siècles, la France existe depuis 1000 ans. Il a existé sous sa forme actuelle auprès d’un sultan. C’est un État ancien qui a toujours été très puissant, qui a colonisé toute l’Afrique du Nord, presque jusqu’à l’Egypte, qui a colonisé l’Espagne. C’est un Empire très puissant qui s’étendait jusqu’au Sénégal« . Une hégémonie qui s’est effondrée avec l’effondrement de l’ensemble du monde musulman suite à l’invasion des Mongols en 1280, suivie de l’éclatement de l’empire marocain et de la colonisation.

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Pour autant, la France n’a pas colonisé le Maroc, rappelle l’écrivain algérien avant d’expliquer les raisons de ce choix : «parce que c’est un grand État« . En effet, poursuit-il, «c’est facile de coloniser des petites choses qui n’ont pas d’histoire mais coloniser un état est très difficile« . Ainsi, il prend comme exemple le cas de l’Allemagne qui n’aurait pas pu coloniser la France, ce «vieux pays, constitué» mais qui à défaut «a pu l’occuper momentanément« . Car pour coloniser, rappelle-t-il, il faut «supprimer sa culture (dans le pays), mettez une pièce de rechange», chose impossible dans des nations anciennes comme la France ou le Maroc, mais tout à fait possible dans le cas de l’Algérie, colonisée depuis 130 ans par la France.

Et, “à l’époque, les dirigeants français étaient sages», poursuit-il à propos de la non-colonisation du Maroc, ce pays ancien aux institutions fortes, une décision notamment prise par le gouvernement français a créé un problème qui persiste dans le temps, à l’origine de tensions entre les deux pays frontaliers. .

L’histoire d’une trahison

«Lorsque la France a colonisé l’Algérie, toute la partie occidentale de l’Algérie faisait partie du Maroc : Tlemcen, Oran et même jusqu’à Mascara.», rappelle Boualem Sansal. Cependant, lorsque «La France colonise l’Algérie, elle s’établit en protectorat au Maroc et décide ainsi, arbitrairement, de rattacher tout le Maroc oriental à l’Algérie, en traçant une frontière.».

Face à cette décision arbitraire prise par la France, «l’une des plus grandes puissances militaires de l’époque», le Maroc ne peut rien faire. Quelques années plus tard, en 1954, à l’aube de la guerre d’indépendance algérienne, «Des militants algériens ont pris contact avec le roi du Maroc», rappelle Boualem Sansal, énumérant leurs demandes au Souverain : «les accueillir, les aider diplomatiquement, financièrement et leur permettre de créer des bases militaires pour s’entraîner« . Demande au Roi du Maroc d’accepter, »mais à une condition», pour restituer au Maroc ses territoires amputés par la France, une fois que l’Algérie aura retrouvé son indépendance. Une condition à laquelle l’Algérie répond par l’affirmative.

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Mais les choses ne se passent pas comme prévu. “L’indépendance arrive. Entre-temps, l’Algérie est devenue un pays communiste», explique Boualem Sansal, derrière lequel se positionne le régime moscovite, prêt à aider l’Algérie contre « le“Le Maroc (qui) s’est rallié à la France et aux Américains”, et qui est donc désigné par les Russes comme “l’ennemi” de l’Algérie, ce nouveau pays communiste. Une histoire à laquelle le régime algérien adhère pleinement en refusant, dès l’indépendance du pays – à laquelle le Maroc a grandement contribué – de respecter sa parole.

«Résultat, en 1962, l’armée marocaine revient en Algérie pour reprendre ses territoires. Il y a eu une guerre pendant un an. Finalement, la raison a pris le dessus, la médiation internationale a permis de retracer un peu les choses.», poursuit Boualem Sansal qui ne semble pas savoir que c’est l’armée frontalière, dirigée par Boumediene, qui a pris l’initiative d’attaquer un contingent des FAR pour forcer les factions armées du GPRA, notamment en Kabylie, à faire bloc contre un ennemi étranger. Mais depuis,méfiance» du Maroc envers l’Algérie s’est installé, d’autant plus qu’à un fait aggravant s’ajoutent la trahison et les mensonges : «le régime militaire algérien a inventé le Polisario pour déstabiliser le Maroc« . Dans la création de cette entité fantoche, l’écrivain voit aussi la volonté de l’Algérie de maintenir un système communiste et de faire taire toutes les voix algériennes qui pourraient vouloir prendre exemple sur le Maroc, ce pays où les citoyens «sont plus libres, il y a du tourisme, ça va mieux».

 
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