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“En voulant sauver la face, l’Iran a mis en danger sa stabilité et son avenir économique”

Les tirs de missiles sur Israël par l’Iran sont extrêmement risqués pour le régime de la République islamique, a jugé mercredi l’iranologue Clément Therme sur la RTS. En mettant en danger la stabilité du pays et la sécurité de sa population, il pourrait voir son autorité s’affaiblir encore davantage.

En assassinant le chef du Hezbollah libanais Hassan Nasrallah le 27 septembre à Beyrouth, Israël a porté un coup non seulement au groupe islamiste chiite, mais aussi au pouvoir iranien, estime Clément Therme, professeur à l’université Paul Valéry de Montpellier, invité de La Matinale .

Hassan Nasrallah avait, au Liban, mandat de représenter le guide suprême iranien. « C’était le fleuron de ce que l’Iran appelle l’axe de la résistance. C’est une attaque contre le pouvoir personnel du Guide et sa dimension transnationale. Il fallait effacer cet affront», note le spécialiste de la République islamique.

Le Guide suprême a dû réagir au risque d’une crise de crédibilité envers ses alliés

Clément Therme, maître de conférences à l’Université Paul Valéry de Montpellier et spécialiste de l’Iran

Cependant, l’Iran a récemment montré des signes d’ouverture, notamment économiquement avec les États-Unis. Mais ce positionnement n’a pas suffi et la logique révolutionnaire a finalement pris le pas sur la défense des intérêts économiques du pays. « La volonté d’ouverture économique est une priorité plus lointaine du régime », constate Clément Therme.

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La crédibilité en jeu

Pour lui, si l’Iran a agi, c’est parce que l’affaiblissement des Gardiens de la révolution hors des frontières iraniennes commençait à poser problème aux auxiliaires iraniens. « Le Guide suprême a dû réagir face au risque d’une crise de crédibilité avec le Hezbollah, les milices chiites en Irak, les rebelles houthis au Yémen ou le régime syrien », énumère Clément Therme.

La réponse choisie par l’Iran, estime le spécialiste, pourrait cependant menacer la survie même du régime iranien. « Pour l’instant, la République islamique a conduit à l’appauvrissement de l’Iran », mais la population jouissait d’une certaine sécurité. Cette « stabilité autoritaire » était « le principal argument du régime pour défendre sa pérennité et le statu quo en interne », analyse-t-il. « Désormais, si le régime commence à créer le chaos et à risquer une attaque israélo-américaine sur son territoire, la protestation risque de s’intensifier. »

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À plus court terme, à quoi l’Iran s’expose-t-il après le lancement de son missile ? L’État juif se prépare-t-il à frapper fort ? Pour Clément Therme, c’est encore difficile à dire, mais le risque de déstabilisation régionale est réel, par exemple si des installations énergétiques iraniennes sont frappées, car le pétrole est très important pour la survie du régime iranien.

L’escalade risque de s’étendre en fonction du choix qui sera fait par Israël

Thermes Clément

Comme dans sa réponse d’avril dernier, « Israël cherchera peut-être à frapper des bases militaires. Soit directement les dirigeants iraniens, soit ce qu’ils ont déjà fait contre leurs auxiliaires [à Gaza, au Liban et en Syrie, ndlr]énumère le maître de conférences à l’université Paul Valéry de Montpellier, qui résume : « L’escalade risque de s’étendre en fonction du choix qui sera fait par Israël. »

Une réponse israélienne forte est probable

Et la réponse israélienne pourrait bien être violente, car l’Iran a tiré mardi plus de missiles contre Israël qu’en avril dernier, lors de sa campagne militaire. représailles contre la frappe israélienne sur son consulat à Damas en Syrie, passant de 120 à environ 200 missiles, et peut-être sans avoir prévenu au préalable [lire encadré]. « Cette fois, la frappe iranienne est plus qu’une frappe symbolique. La réponse israélo-américaine sera probablement plus forte qu’en avril », prédit Clément Therme.

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Pour l’iranologue, « en sauvant la face auprès de ses partenaires, le régime a mis en danger la stabilité et l’avenir économique » de l’Iran. « C’est une mesure qui a été prise pour satisfaire les factions les plus conservatrices du régime. Mais il existe un fossé croissant entre ceux qui, à l’intérieur du système, souhaitaient une réponse extrêmement forte, et la majorité de la population, qui souhaite une normalisation », note-t-il.

Le but est de manipuler l’opinion publique pour lui faire croire que la réponse militaire contre Israël est une cause nationale en Iran.

Thermes Clément

La population en paiera le prix

Mais c’est la population iranienne qui risque de subir de plein fouet une éventuelle réponse massive israélienne, même si elle est, selon Clément Therme, « très largement opposée à la guerre, à cette politique régionale qui donne la priorité à la question israélo-israélienne ». palestinien par rapport aux intérêts économiques du pays. De nombreux Iraniens considèrent donc que le conflit israélo-palestinien ne devrait pas être la première priorité de leur État et que celui-ci devrait se concentrer sur l’amélioration des conditions économiques de la population, rapporte-t-il.

>> Lire aussi : « Les Iraniens doivent se débrouiller seuls » pour espérer voir le régime tomber

Pour la République islamique, conclut Clément Therme, « tout l’enjeu est de manipuler l’opinion publique pour faire croire que la réponse militaire contre Israël est une cause nationale en Iran, alors qu’en réalité c’est une cause révolutionnaire qui n’a pas d’attrait qu’en Iran. un cercle limité.

Commentaires recueillis par Pietro Bugnon

Adaptation web : Vincent Cherpillod

 
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