Le chef islamiste des rebelles en Syrie, Abou Mohammad al-Jolani, a lancé lundi des discussions sur la passation du pouvoir après le renversement du président Bachar al-Assad, les Occidentaux faisant preuve de prudence face à ces insurgés qui contrôlent la majeure partie du pays. pays.
Emporté dimanche après 13 ans de guerre par une offensive spectaculaire des groupes rebelles menés par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) de M. Jolani, le président Assad a fui le pays avec sa famille pour Moscou selon les agences russes.
Dès sa chute après 24 ans à la tête du pays, rebelles et civils se sont précipités dans les prisons pour libérer les détenus, d’autres ont continué les célébrations.
Au lendemain de son entrée à Damas, M. Jolani a discuté lundi avec l’ancien Premier ministre Mohammed al-Jalali de « coordonner la transition du pouvoir », après que le Parlement et le parti Baas de M. Assad ont apporté leur soutien à la transition, selon un communiqué. déclaration rebelle.
Dans une déclaration distincte diffusée par la télévision d’État, dont le logo sur Telegram affiche désormais le drapeau rebelle, le responsable du HTS, Mohammed Abdel Rahmane, a déclaré que « les forces de sécurité s’efforcent de sécuriser les bâtiments et les installations gouvernementales, publiques et privées, et effectuent des patrouilles pour assurer la sécurité à Damas.
Le groupe HTS, ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda, affirme avoir rompu avec le jihadisme, sans vraiment convaincre les pays occidentaux, dont les Etats-Unis, qui le qualifient de terroriste.
« Évaluer les actions »
Prenant acte de la fin d’un demi-siècle de règne incontesté du clan Assad, un tournant historique, de nombreux pays ont multiplié les appels en faveur d’une transition sans violence.
Les États-Unis et les pays européens ont déclaré qu’ils jugeraient HTS sur ses actions, notamment en appelant à un gouvernement « inclusif ».
“Nous évaluerons non seulement leurs paroles, mais aussi leurs actes”, a déclaré le président américain Joe Biden, soulignant que certains groupes rebelles avaient “un passé de terrorisme”.
Son chef de la diplomatie Antony Blinken a affirmé que les États-Unis étaient « déterminés » à ne pas laisser le groupe jihadiste État islamique se reconstituer en Syrie.
Berlin a de son côté indiqué que le chancelier allemand Olaf Scholz et le président français Emmanuel Macron « étaient prêts à coopérer avec les nouveaux dirigeants, sur la base des droits humains fondamentaux et de la protection des minorités ethniques et religieuses ».
A la demande de la Russie, qui maintient des bases militaires en Syrie, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit en urgence lundi à huis clos sur la situation dans ce pays.
De son côté, Israël, qui a qualifié la chute de M. Assad d’« historique », a mené lundi plus de 100 frappes contre des sites militaires en Syrie, dont un centre de recherche à Damas, dans le but de détruire « les capacités militaires » du pouvoir déchu, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).
A Beyrouth, le Hezbollah pro-iranien a condamné ces raids et assuré « soutenir la Syrie et son peuple ».
Alors que le gouvernement syrien était accusé par des ONG d’avoir arrêté des centaines de milliers de personnes, dont des dizaines de milliers tuées notamment sous la torture, une foule de proches de détenus s’est rassemblée devant la tristement célèbre prison de Saydnaya, près de Damas.
-Invoquant l’existence de « cellules souterraines cachées », le groupe de secours des Casques blancs y a effectué des recherches, faisant appel à « des spécialistes de la démolition des murs et des équipes chargées d’ouvrir les portes en fer ».
« Torture épouvantable »
“Les détenus sont toujours sous terre, la prison a trois ou quatre sous-sols”, dont les accès sont verrouillés par des codes, raconte Aida Taha, 65 ans, qui s’y rendait à la recherche de son frère, dont elle n’avait plus de nouvelles depuis 2012.
Les prisonniers libérés ont afflué dans les rues de Damas par vagues, certains complètement désorientés, alors que les Syriens partagent des photos de leurs proches détenus sur les réseaux sociaux dans l’espoir d’obtenir des informations à leur sujet.
À l’hôpital d’Harasta, près de Damas, les rebelles syriens ont indiqué à l’AFP avoir découvert lundi une quarantaine de corps portant des traces de torture.
“C’était un spectacle horrible: une quarantaine de corps étaient entassés, montrant des traces de tortures terribles”, a déclaré Mohammed al-Hajj, un combattant des factions rebelles du sud du pays, joint par téléphone à l’AFP depuis Damas. .
Le cofondateur de l’Association des détenus et des disparus de la prison de Sednaïa (ADMSP), Diab Serriya, a estimé que les corps étaient probablement ceux de détenus de la prison de Sednaïa.
Sur la place des Omeyyades à Damas, c’est toujours la liesse, avec de forts coups de feu et des klaxons.
Seules quelques entreprises ont rouvert à Damas, où les institutions, notamment les écoles, sont fermées. La Banque centrale a affirmé que l’argent des déposants était « en sécurité ».
Les réfugiés syriens affluent également du Liban et de Turquie vers la frontière syrienne.
Gel des procédures d’asile
Au moins 910 personnes, dont 138 civils, ont été tuées lors de l’offensive éclair des rebelles lancée le 27 novembre, selon l’OSDH.
Déclenchée en 2011 par la répression de manifestations pro-démocratie, la guerre en Syrie a fait plus de 500 000 morts. Outre la Russie, la Turquie et les États-Unis – qui soutiennent les forces kurdes syriennes – maintiennent toujours des soldats sur le terrain dans le nord de la Syrie.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, dont le pays soutient des groupes rebelles et accueille des millions de réfugiés syriens, a déclaré que la Turquie « n’a aucun objectif sur les terres » syriennes.
Dès le renversement de M. Assad, le débat sur l’accueil des réfugiés syriens a refait surface en Europe, plusieurs pays, dont l’Allemagne, annonçant le gel des procédures de demande d’asile pour les exilés syriens. Vienne a déclaré qu’elle préparait leur expulsion.