WASHINGTON, DC – La scène est instantanément devenue emblématique. Une mer de bonnets roses a déferlé dans les rues de Washington, au lendemain de l’investiture de Donald Trump. Le 21 janvier 2017, des centaines de milliers de femmes manifestaient dans la capitale américaine, promettant de résister bec et ongles à leur nouveau président.
Laurie Gillman, 58 ans, marchait fièrement aux côtés de ces femmes. Habitante de Washington DC, propriétaire d’une librairie indépendante, elle n’avait pas vu venir la victoire de Donald Trump en 2016. Cette fois, la surprise fut moins grande.
Je me sens un peu plus seul maintenant
pourtant, confie-t-elle.
Laurie Gillman se décrit comme une libérale assez modérée, « pas très à gauche ». » Elle a ouvert sa librairie il y a presque 10 ans.
Photo : Radio-Canada / Yasmine Mehdi
En 2016, le choc pousse Laurie Gillman à l’action. Mais cette année, elle n’a pas la même énergie. On sent de la tristesse dans sa voix, mais aussi un peu de lassitude.
On a passé huit ans à être en colère, à être choqués […] dire ça [Trump] ne représentait pas qui nous étions. Et maintenant, c’est peut-être ce que nous sommes après tout… Ou bien, la majorité d’entre nous
elle soupire.
Pour son nouveau mandat, le président élu aura carte blanche, avec une majorité républicaine au Congrès et une Cour suprême composée de juges conservateurs qui lui ont déjà rendu des décisions favorables.
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Donald Trump s’adresse à ses partisans à Palm Beach le soir de sa victoire.
Photo : Getty Images / AFP/Jim Watson
Le résistance
de 2016 – qui avait réussi à rassembler progressistes, indépendants et républicains modérés – semble s’être estompée. D’autant que Donald Trump a accru ses soutiens ces huit dernières années.
Donald Trump n’a pas seulement remporté le collège électoral, il a également remporté le vote populaire. Les démocrates n’ont donc pas la même excuse [qu’en 2016]
note l’historien américain et professeur à la Université George WashingtonTimothée Shenk.
Tout ce que [la Résistance] Les efforts déployés au cours des huit dernières années pour garantir que Trump ne revienne jamais à la Maison Blanche ont échoué de façon spectaculaire.
Il il faut changer de stratégie
Ravi Mangla faisait partie du Résistance 1.0
contre Donald Trump. Aujourd’hui porte-parole national de Fête des familles qui travaillentle progressiste de 36 ans se prépare au deuxième acte de cette résistance qui devra être différent et plus stratégique, reconnaît-il.
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En 2016, Ravi Mangla avait soutenu le sénateur progressiste Bernie Sanders lors de la primaire qui l’opposait à Hillary Clinton.
Photo : Radio-Canada / Yasmine Mehdi
Ce n’est pas parce que les gens ne sont pas dans la rue que rien ne se passe.
Ravi le souligne, donnant l’exemple d’un appel Zoom que son groupe a co-organisé au lendemain de la victoire de Donald Trump et auquel ont participé quelque 100 000 personnes.
Nous devons cette fois-ci être plus intelligents et plus efficaces.
Nos militants ne prévoient pas de marche massive dans l’immédiat. Ils sont davantage orientés vers […] la mobilisation de plusieurs groupes locaux qui seront ensuite agrégés au niveau national
explique Mary Small, du mouvement progressiste Indivisible, né au lendemain de la première victoire de Donald Trump.
Résistance locale et juridique ?
Les militants ne sont pas les seuls à préparer le retour du républicain à la présidence. Les gouverneurs démocrates ont créé le groupe Les gouverneurs protègent la démocratie pour résister à d’éventuelles offensives de l’État fédéral. La Californie, de son côté, s’apprête à poursuivre massivement en justice l’administration Trump.
Les libertés qui nous sont chères sont attaquées […] La Californie a déjà été confrontée à ce défi et nous savons comment y répondre.
L’Union américaine des libertés civiles (ACLU) entend également se tourner vers les tribunaux, notamment pour lutter contre la promesse de l’administration Trump d’expulser des millions d’immigrés sans papiers en recourant si nécessaire à l’armée.
Nous le défierons lorsqu’il violera les droits des personnes. Et il y aura une multitude de lois que Trump devra violer pour expulser un million de personnes par an.
le directeur juridique deACLU Cécile Wang.
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L’historien Timothy Shenk lui-même aurait souhaité que Kamala Harris remporte l’élection présidentielle.
Photo : Radio-Canada / Yasmine Mehdi
L’historien Timothy Shenk estime que des mouvements de protestation spontanés apparaîtront lorsque Donald Trump mettra en œuvre sa politique la plus controversée. Quand on parle d’expulsions massives, on imagine la réaction [de l’opinion publique] si, par exemple, un enfant a été abattu
illustre l’expert.
La militante Mary Small estime également que l’opinion publique sera un levier important. Trump aime le pouvoir, mais il aime aussi être populaire
résume-t-elle.
La fin de « la Résistance » ne signifie pas la fin de l’opposition à Trump.
Et la Marche des Femmes dans tout ça ?
Une grande manifestation sera organisée à Washington le 18 janvier, deux jours avant l’investiture de Donald Trump.
Cette fois, ce sera un Marche populaire et non d’un Marche des femmes. Les organisateurs attendent 50 000 personnes, soit environ dix fois moins qu’en 2017.
Laurie Gillman ne sera pas là. Elle a déjà prévu de passer la semaine de l’investiture avec sa fille en Californie, par envie d’échapper à la politique. Je ne veux pas avoir à y penser
explique-t-elle, ajoutant que plusieurs de ses employés ont également pris des vacances durant cette période.
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La librairie East City se trouve à quelques pas du Capitole.
Photo : Radio-Canada / Yasmine Mehdi
Le militantisme de Laurie s’exercera depuis sa librairie. Un lieu de rencontre qui, selon elle, offre des pistes de solutions pour comprendre ses concitoyens. La lecture peut aider à créer un dialogue
elle croit.
Un dialogue qui s’annonce difficile, dans un pays profondément divisé.