La députée républicaine de 37 ans en est certainement un bon exemple. Bref, c’est un peu la version brune et rocheuse de Marjorie Taylor Greene, la députée blonde et sensuelle de Géorgie. Toutes deux sont des femmes d’affaires qui se sont lancées en politique en surfant sur la vague Maga (« Make America Great Again ») soulevée par Donald Trump lors de sa candidature à la présidentielle en 2016. L’une et l’autre ont été élues en novembre 2020 avec un programme mêlant idées populistes et théories vagues avec des connotations d’extrême droite. Tous deux souscrivent bien entendu au dogme complotiste des « élections volées » de 2020. Tous deux font preuve d’un talent consommé pour se faire remarquer par des propos radicaux où la vérité tient aussi peu de place que le bon sens.
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Passion pour les armes
Lauren Boebert est née en Floride. Sa mère avait dix-huit ans lorsqu’elle lui a donné naissance ; son père est inconnu. Elle a grandi dans le Colorado et, elle-même enceinte avant de terminer ses études secondaires (Boebert a maintenant quatre enfants), elle a occupé plusieurs emplois. D’abord chez McDonald’s, puis dans une société de prospection de gaz naturel, avant d’ouvrir un restaurant avec son mari : dans la ville de Rifle, il était sans doute logique de l’appeler Shooters Grill (« The Shooters’ Grill »). Victime d’un attentat un soir, Boebert exige que ses employés soient armés.
La passion des armes à feu était un bon début pour entrer en politique sous les couleurs du Parti républicain. Pourtant, en se présentant en 2020 au siège de député de la 3e circonscription électorale qui, dans l’ouest et le sud du Colorado, comprend de grandes zones rurales, mais aussi des villes comme Durango, Montrose, Grand Junction, Aspen et Pueblo, le néophyte n’avait aucune chance. a priori. Elle a créé la surprise en battant largement, lors des primaires, le député Scott Tipton, en poste depuis dix ans, qu’elle avait accusé d’être trop mou et surtout indigne du soutien de Donald Trump. C’était la première fois depuis un demi-siècle, dans le Colorado, qu’un député sortant était ainsi éliminé lors des primaires de l’un ou de l’autre parti.
Le goût du chahut au Congrès
Cet exploit changerait la dynamique électorale. Lauren Boebert l’a facilement emporté (51% des voix contre 45%) face à son adversaire démocrate, Diane Mitsch Bush, professeur de sociologie à la retraite qui a siégé à l’Assemblée d’État. Au Congrès, la nouvelle élue ne tardera pas à se distinguer, en refusant de voter la certification des résultats présidentiels, en multipliant les déclarations fracassantes, et en chahuté Joe Biden lors du discours sur l’état de l’Union. Ses excentricités ne l’ont pas empêchée d’être réélue en 2022, mais, cette fois, avec seulement 546 voix d’avance sur le démocrate Adam Frisch, économiste de formation, homme d’affaires et conseiller municipal.
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Boebert a-t-il senti le vent tourner ? Frisch était contente de rejouer le match, mais la Républicaine a préféré tenter sa chance ailleurs. Elle convoite toujours un siège de députée, mais cette fois dans la 4e circonscription. Essentiellement rurale, elle est considérée comme la plus républicaine du Colorado et le candidat parachuté ne devrait avoir aucune difficulté à y triompher. Boebert a en effet écrasé ses adversaires républicains lors des primaires du 25 juin, tandis que certains spéculaient sur une éventuelle fin de sa carrière politique après un nouveau scandale retentissant : le 10 septembre 2023, elle a été expulsée du Buell Theatre, à Denver, après avoir fait scandale et fourni un nouvel exemple de comportement problématique.
Les espoirs démocratiques affaiblis
Lauren Boebert a justifié sa démarche par le désir de s’évader après un divorce difficile l’année dernière. Ses détracteurs soulignent que le 3e arrondissement était suffisamment grand pour que le député y trouve un nouveau havre de paix. Ils invoquent plutôt la volonté d’échapper à une défaite annoncée face à Adam Frisch, qui bat des records de collecte depuis qu’il a fait sensation aux législatives de 2022.
Reste que le vote s’annonce désormais plus incertain dans l’une des trente-quatre circonscriptions que les démocrates convoitent pour retrouver la majorité à la Chambre des représentants le 5 novembre. Globalement, le Colorado a changé de cap ces dernières années pour élire, avec des marges de plus en plus nettes. , un président démocrate. Dans le 3e arrondissement, la conversion n’est cependant pas aussi avancée. Le district n’a pas envoyé de démocrate au Congrès depuis 2008. Ce qui n’empêche pas Frisch d’espérer. Son rival républicain, l’avocat Jeff Hurd, se targue d’être originaire du pays et se targue de défendre l’économie locale. Mais il est également hostile au droit à l’avortement et, cette année, une telle position pourrait lui être fatale.