Moscou veut interdire la promotion d’un mode de vie « sans enfant »

Moscou veut interdire la promotion d’un mode de vie « sans enfant »
Moscou veut interdire la promotion d’un mode de vie « sans enfant »

(Moscou) Les députés russes ont commencé mardi à examiner un projet de loi interdisant la promotion de la vie sans enfant, sur fond de crise démographique, amplifiée par le conflit en Ukraine, et le virage ultraconservateur pris par le Kremlin.

La défense des valeurs dites « traditionnelles » est le cheval de bataille du président Vladimir Poutine, qui ne cesse de dénoncer la « décadence » occidentale. La Russie réprime déjà les droits des communautés LGBTQ+ à cet égard.

La classe politique veut désormais interdire la « propagande » du mouvement sans enfantterme utilisé pour désigner les personnes qui choisissent volontairement de ne pas avoir d’enfants, pour des raisons personnelles, économiques ou environnementales notamment.

« Il est proposé d’interdire la propagande de l’infécondité : sur Internet, dans les médias, dans les films et dans les publicités », a déclaré sur Telegram Viatcheslav Volodine, le président de la Douma (la chambre basse du parlement russe), avant l’examen du texte en commission mardi.

« Une famille chaleureuse et nombreuse est la base d’un État fort », a insisté ce responsable proche de M. Poutine.

Selon Volodin, un particulier sera passible d’une amende de 400 000 roubles (environ 5 800 dollars canadiens), les fonctionnaires seront confrontés au double de ce montant, tandis que pour les personnes morales, la sanction peut être portée à 5 millions de roubles.

Aucun de ces responsables n’a évoqué la question de la contraception et le texte n’a pas encore été rendu public.

Elvira Aitkoulova, députée co-rédactrice de la proposition, a assuré lundi que les idées défendues par les partisans du mouvement sans enfant représentait un « comportement destructeur » qui pourrait conduire au « dépeuplement » de la Russie.

« Ce mouvement ne correspond pas aux attentes actuelles des femmes », a déclaré Valentina Matvienko, présidente du Conseil de la Fédération, la chambre haute du Parlement, appelant à son « interdiction légale ».

Il y a quelques jours, le porte-parole du président russe Dmitri Peskov a déclaré que « tout ce qui doit être fait pour augmenter le taux de natalité doit être fait. Et tout ce qui l’empêche doit, bien entendu, disparaître de nos vies ».

« Des gens impies »

Dans le centre-ville de Moscou, Abdullah Shamkhalov, un homme d’affaires de 49 ans, s’est dit « favorable » au projet de loi.

“Laissez les gens se marier, avoir des enfants !”, a-t-il exhorté auprès de l’AFP. “C’est la chose la plus importante dans la vie”, a-t-il poursuivi, qualifiant de “sectes, d’impies” ceux qui choisissent de ne pas avoir d’enfants.

A l’inverse, Victoria, une psychothérapeute de 47 ans, estime qu’une telle législation est « sans intérêt ». « Je pense qu’il y a des choses plus importantes à régler » en ce moment, dit cette mère de deux enfants.

Un avis partagé par Anastassia, une étudiante de 22 ans, qui dit n’avoir « jamais vu de propagande » en faveur d’un mode de vie sans enfant.

Avoir ou non des enfants est « un choix personnel. Cela concerne votre corps et votre vie personnelle », affirme-t-elle.

Depuis son arrivée au Kremlin en 2000, M. Poutine s’est donné comme priorité d’endiguer la crise démographique russe, héritée de l’ère soviétique, mais n’y est jamais parvenu.

Les mesures natalistes n’ont pas eu les effets escomptés, le Kremlin ayant reconnu en juillet dernier une situation « catastrophique pour l’avenir de la nation ».

Les pertes sur le front en Ukraine depuis 2022 n’ont fait qu’accentuer cette tendance.

Les autorités défendent leur ligne conservatrice sur les questions sociales, y voyant une extension de la lutte contre les Occidentaux.

La Cour suprême a interdit fin 2023 le « mouvement LGBT international » pour « extrémisme », une formulation vague qui ouvre la porte à de lourdes peines de prison.

Cette semaine, la Douma doit également examiner un projet de loi interdisant l’adoption d’enfants russes par des ressortissants de pays autorisant la transition de genre.

 
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