Une sortie froide du Sahara, peu d’accords signés, une diaspora algérienne en colère… La visite d’Abdelmajid Tebboune au Portugal valait son pesant de cacahuètes.
La visite du président algérien Abdelmajid Tebboune, entre le 22 et le 24 mai 2023 au Portugal, soulève des questions à tous les niveaux au point de friser le mystère. Accueilli à l’aéroport par son propre ambassadeur, aucune séance de travail avec le gouvernement ou avec le premier ministre (véritable pouvoir exécutif du pays) n’a été constatée… Le président algérien était en vacances. Alors que le pensionnaire d’Al Mouradia était attendu à Paris ou à Moscou, il se retrouve à Lisbonne.
Emboîtant le pas à une importante délégation marocaine, présidée par le chef du gouvernement Aziz Akhannouch et composée des principaux ministres de l’exécutif le 12 mai, ce voyage de Tebboune, presque en catimini, n’est pas non plus dénué de sens. En réalité, face à l’omniprésence de la diplomatie marocaine sur les fronts sensibles de la géopolitique mondiale, Alger tente de trouver des brèches pour exister.
Que ce soit sur le dossier ukrainien, avec l’arrivée du ministre ukrainien des Affaires étrangères et le rappel de la position de neutralité du Maroc, l’arbitrage demandé par Anthony Blinken à Nasser Bourita concernant les tensions à Jérusalem, la présence en force du Maroc aux dernières élections arabes Sommet de la Ligue et réintroduction de la Syrie…
Le nouveau ministre algérien des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, a le vertige. Rappelons que face à la dégradation du climat social, le régime algérien veut entretenir le mythe d’une “diplomatie souveraine et influente”, comme le disait Ramtane Laamamra, le célèbre “Talleyrand algérien” qui n’était pas encore en poste depuis deux ans (1 année et 8 mois pour être précis). Sauf que cette fameuse posture est aussi vraie que l’existence d’une république sahraouie à Laâyoune. En effet, surtout depuis l’arrivée de Tebboune et l’émergence de la « nouvelle Algérie », le voisin oriental ne cesse de perdre du terrain partout.
A commencer par son principal soutien international, la Russie. Depuis le début de l’opération militaire lancée par Vladimir Poutine sur le sol ukrainien le 24 février 2022, le « grand frère » n’a cessé d’attendre un signe clair de soutien d’Alger, comme l’ont fait le Venezuela, Cuba ou d’autres « États voyous ». Sauf que Moscou a oublié que la principale obsession d’Alger était le Maroc, et que le clan Tebboune/Chengriha n’hésitera pas à s’allier à Lucifer lui-même pour contrer les intérêts souverains du royaume.
Ainsi, ils ont sacrifié leur relation « privilégiée » avec la Russie pour se rapprocher de la France de Macron. Grâce au refroidissement des relations entre Rabat et Paris, Alger a décidé de se tourner vers la “mère patrie”, avec à la clé une visite historique d’Emmanuel Macron en Algérie. Une visite au cours de laquelle le chef de l’Etat français a lancé une attaque sans équivoque contre les Russes. Pour entretenir le mythe de l’importance de l’Algérie sur la scène internationale, Abdelmajid Tebboune devait visiter un pays, n’importe lequel.
L’impossibilité d’un voyage en Russie étant constatée, il restait Paris. Sauf que dans un contexte où la diaspora algérienne manifeste chaque jour devant son ambassade face à la répression visant les opposants politiques ou autres militants kabyles, Macron a décidé de temporiser. Cela a quitté le Portugal. Pays à petite communauté algérienne, non lié économiquement à l’Algérie.
Sauf que cette petite communauté n’a pas hésité à s’en prendre à son président à coups d’œufs et de cris d’exigence pour un État civil et non militaire. De plus, malgré la présence de quelques opérateurs économiques, peu d’accords ont été signés entre les deux pays. Et le clou de l’émission a été la sortie sur le Sahara, un dossier régional certes, mais on se demande ce qu’il fait à l’ordre du jour d’une conférence de presse entre deux chefs d’Etat théoriquement non concernés. Abdelmajid Tebboune s’est donc montré peu virulent, parlant simplement de soutien “aux efforts de l’ONU et de respect des résolutions du Conseil de sécurité”.
Aucune mention du « peuple sahraoui », ni du reste des clichés de la diplomatie de son pays. Et sachant que depuis 2018, aucune résolution du Conseil de sécurité des Nations unies n’évoque le référendum comme solution et considère le plan d’autonomie présenté par le Maroc en 2007 comme un moyen sérieux de résoudre le conflit, le président algérien tempérerait-il sa position ?.