Face à une augmentation de 34,5% des hospitalisations pour cas de scorbut après le début de la pandémie de Covid-19, les équipes françaises font état d’une réémergence du scorbut chez les enfants en France. Les auteurs constatant également une augmentation des cas de malnutrition sévère, ils établissent un lien avec l’aggravation de la précarité socio-économique et de l’inflation depuis la période pandémique. « Le retour inquiétant de cette maladie met en évidence les conséquences possibles de l’augmentation de la précarité socio-économique depuis 2020 sur l’état nutritionnel des enfants en France. » indique un communiqué de l’AP-HP.
Les chercheurs de cette étude observationnelle publiée dans The Lancet Régional Santé – Europe proviennent du service de pédiatrie générale et du centre de référence des rhumatismes inflammatoires et des maladies auto-immunes systémiques de l’enfant (Raise) de l’hôpital Robert-Debré (AP-HP), de l’Inserm, de l’université Paris Cité et du service de pédiatrie de Cayenne (Guyane). Les auteurs appellent à des recommandations pour mettre en place des programmes d’aide alimentaire ciblés, améliorer l’accès à des aliments nutritifs et abordables mais aussi renforcer la formation clinique dans le but de prévenir et de détecter précocement les carences alimentaires.
Une augmentation de 20,3% des cas de malnutrition sévère après le début de la pandémie
L’objectif principal de cette étude était de décrire l’évolution du scorbut chez les enfants en France sur la période 2015-2023 à partir des données du PMSI (programme de médicalisation des systèmes d’information). La période ayant été marquée par la pandémie de Covid-19, les auteurs ont pu analyser comment cette dernière avait influencé l’épidémiologie du scorbut. L’étude a également examiné la malnutrition à différents stades et a pu prendre en compte des facteurs socio-économiques, tels que l’indice des prix à la consommation.
Les équipes ont ainsi identifié 888 patients âgés de 18 ans ou moins (âge moyen de 11 ans, 48,5% de garçons) hospitalisés pour scorbut sur la période d’étude. En comparant l’incidence de 2015-2020 à celle de 2020-2023, les chercheurs estiment l’augmentation des hospitalisations pour scorbut après le début de la pandémie de Covid-19 en 2020 à + 34,5 %, et à + 20,3 % celle des cas. de malnutrition sévère (la malnutrition légère ou modérée a diminué de 11,2 %). L’augmentation du scorbut a été particulièrement marquée chez les enfants âgés de 5 à 10 ans et chez les filles, tandis que celle de la malnutrition sévère était plus prononcée chez les 11-17 ans. De plus, les auteurs ont constaté une augmentation de la carence en fer dans leur cohorte. Concernant les enfants hospitalisés pour le scorbut après 2020, 22,6 % souffraient de malnutrition sévère, 5,8 % souffraient de troubles du spectre autistique et 5 % souffraient d’anorexie mentale.
Des hausses liées au contexte de crise
Selon les auteurs, l’augmentation des cas de scorbut et de malnutrition sévère était associée à une aggravation de l’insécurité socio-économique et de l’inflation. L’association serait « vraisemblablement causal », selon les scientifiques qui rapportent un « aggravation de l’insécurité alimentaire » depuis 2020 pointer du doigt « la pandémie, les crises socio-économiques et la politique mondiale ». Début 2023 en France, l’inflation était de 15 % pour les prix alimentaires, avec un effet lourd « notamment sur les familles précaires ». Ainsi, la réémergence du scorbut pourrait être un indicateur de disparités socio-économiques et alimentaires.
Parmi les enfants hospitalisés pour scorbut, la proportion ayant bénéficié de l’AME a augmenté entre les périodes pré-Covid-19 et post-Covid-19 (+32,9%), suggérant « une augmentation de la pauvreté sociale depuis la pandémie ».
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