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un processus basé sur la confiance et la coordination

CV

– Podcast – Depuis trois ans, Sandrine Khalifa encourage une démarche de prescription équitable et de bon usage des médicaments au sein de l’Ehpad dont elle est médecin coordonnateur. Parmi les moyens mis en œuvre, la déprescription médicamenteuse peut être envisagée suite à une réévaluation du traitement. Mais pour réussir cette étape et arriver à la décision la plus pertinente, le dialogue et la confiance entre professionnels de santé et résidents sont fondamentaux.

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TRANSCRIPTION

Actualités VIDAL. Mot d’expert. David Paitraud reçoit le Dr Sandrine Khalifa, gériatre, médecin coordonnateur de l’Ehpad « Les Rives de Sèvres » (département des Deux-Sèvres).

David Paitraud. L’accord médical signé entre l’Assurance Maladie et les médecins libéraux en mai 2024 consacre la mise en place d’une consultation de déprescription. Il s’adresse aux patients âgés à qui sont prescrits au moins dix lignes de traitement. En moins de dix ans, la démarche de réduction des prescriptions de médicaments s’est imposée dans la pratique médicale. Elle est aujourd’hui encouragée dans le cadre d’une problématique plus large, celle de sobriété médicamenteuse. Mais comment déprendre pour que médecins et patients se comprennent ? Quelles sont les conditions d’une déprescription réussie et de la pérennisation d’une prescription juste et adaptée des médicaments ?

Dr Sandrine Khalifa, votre expérience nous intéresse et intéressera certainement nos médecins auditeurs. Vous êtes gériatre, médecin coordonnateur dans un Ehpad des Deux-Sèvres. Dans cet établissement, vous avez initié une démarche de déprescription lorsque cela était possible.

Qu’est-ce qui vous a motivé à vous engager dans cette démarche ?

Dr Sandrine Khalifa. Je suis également médecin hospitalier et j’ai participé aux bilans médicamenteux avec les pharmaciens hospitaliers. j’ai trouvé ça processus très intéressant de réévaluation de nos prescriptions. Depuis, j’ai toujours été intéressé par cette approche dans mes propres prescriptions.

Un état des lieux a-t-il été réalisé au sein de votre Ehpad pour évaluer la polypharmacie auprès des résidents ?

En effet, dans mon rapport annuel, j’ai fait le point sur les exigences. Par exemple, en 2024, 96 % des résidents possédaient au moins 5 molécules et 41 % des résidents possédaient au moins 10 molécules pour une population d’âge moyen de 89 ans. Il s’agit d’un Ehpad de taille moyenne avec une unité protégée, une population d’Ehpad classique.

Quelles ont été les étapes de mise en œuvre de la déprescription au sein de votre maison de retraite ?

Je travaille à la maison de retraite depuis trois ans.

Créer un climat de confiance, de travail et de coopération

La première étape a été un phase d’observation et datation de la différent les professionnels de la santé et de la résidents verser établir un lien de confiance entre autres, puisque les différentes personnes impliquées dans la prescription sont les médecins, mais aussi l’équipe soignante, le pharmacien et le patient qui se trouve au centre. Il a fallu environ un an pour créer ce climat de confiance.

Sécuriser le circuit de la drogue

Ensuite, nous avons travaillé sur le circuit de la drogue et sa sécurité en concluant un accord avec une pharmacie communautaire qui nous livre les médicaments sous blister et avec laquelle nous avons également conclu un partenariat pour une évaluation des médicaments.

Concernant la sécurisation du circuit des médicaments, nous avons constaté que les infirmières écrasaient les médicaments, ce qui n’était pas nécessaire, et les écrasaient ensemble. Nous avons donc travaillé avec des pharmaciens, des infirmières et des médecins pour revoir la galénique et limiter le nombre de médicaments écrasés, les écraser dans de bonnes conditions.

La deuxième chose sur laquelle on a travaillé dans le circuit de la drogue est notre réserve que nous appelons allocation pour besoins urgents pour des prescriptions imprévues. Dans cette dotation de besoins urgents, je n’ai aucun pas mis médicaments inappropriés à la personne âgée pour limiter les risques iatrogènes.

La déprescription implique que certains médicaments soient retirés de la prescription car ils ne sont plus d’actualité. Comment évaluez-vous cela ?

Souvent les patients ont anciennes ordonnancesprescrits par des médecins spécialistes. Mais lorsqu’ils évoluent avec le temps et l’âge, il arrive que des centenaires aient encore des médicaments de prévention primaire alors qu’ils souffrent de malnutrition et ont des difficultés à s’alimenter. On peut par exemple dans ces cas-là supprimer certains médicaments.

Il y a aussi médicaments qui sont donné comme symptomatique. On peut parfois essayer de trouver des traitements non médicamenteux.

Vous travaillez ligne par ligne, médicament par médicament, avec le médecin traitant, mais aussi avec le pharmacien. Vous rencontrez-vous régulièrement ? Comment ça marche en pratique ?

Jusqu’à présent, nous n’avons travaillé que sur certains médicaments pour lesquels nous avons constaté des risques d’effets indésirables. Par exemple, les médicaments qui ont provoqué des chutes.

Actuellement, nous avons prévu pour l’année 2024 rencontrer régulièrement le pharmacienregarder ligne par ligne les prescriptions des résidents qui avaient plus de 10 molécules, et faire suggestions pour les médecins généralistes. Ils acceptent de réévaluer leur prescription, mais demandent un peu d’aide pour pouvoir trier et aussi à faire éducation pour les résidents. En effet, les médecins généralistes ont souvent du mal à convaincre leurs patients d’arrêter un médicament qu’ils ont commencé. Le fait qu’on vienne expliquer aux habitants qu’on a trouvé un accord et qu’à terme on peut faire différemment, amène parfois de meilleurs résultats. Mais cela peut être difficile.

Quels sont les autres freins à la déprescription ?

Temps surtout et le patient qui s’en tient à ses médicaments. Par exemple, une dame est arrivée à la maison de retraite avec des antibiotiques à long terme pour prévenir les infections urinaires. Le médecin généraliste, qui prenait en charge le dossier, a voulu arrêter le traitement, mais la résidente a absolument insisté sur ses antibiotiques. J’ai alors proposé que la maison de retraite lui fournisse du jus de canneberge, précisant que nous n’avions pas observé d’infections urinaires fréquentes et qu’elle avait besoin de quelque chose. Elle a accepté de prendre des canneberges à condition qu’il s’agisse de capsules à avaler. Il est également important de travailler avec les résidents sur leurs convictions. Mais cela prend souvent plusieurs mois.

Autre obstacle, les médecins se heurtent parfois difficultés de légitimité par rapport à une prescription faite par un spécialiste. Dans ce cas, nous discutons en faisant ressortir la littérature. Comme nous sommes plusieurs à décider, il y a un consensus qui naît entre nous.

Comment éviter de retomber dans la surmédication ? D’autant plus que nous nous adressons à un public âgé, parmi lequel de nouveaux problèmes de santé peuvent surgir.

je pense queà chaque prescription, il faut remettre en question toute la prescription et sur l’intérêt de poursuivre toutes les lignes. Et posez-vous aussi la question de savoir s’il faut réintroduire un nouveau médicament, ou ne faut-il pas plutôt augmenter un autre traitement ?

Ce symptôme n’est-il pas lié à un problème non diagnostiqué ? Par exemple, en cas de vertiges, plutôt que d’avoir recours à un traitement anti-vertige, n’y a-t-il pas une hypotension orthostatique sous-jacente qui amènerait soit à prescrire des bas de contention, soit à arrêter un médicament ? hypotendu ?

Je pense qu’à chaque fois, c’est nécessaire revoir l’ensemble du problème sous un autre angle. Et c’est pour cela que le travail collaboratif en maison de retraite peut être intéressant, puisque l’on va se poser des questions et réfléchir ensemble au problème.

Interview : David Paitraud, pharmacien

Montage : Robin Benatti & David Paitraud

Remerciements : Dr Sandrine Khalifa, gériatre, médecin coordonnateur de l’Ehpad « Les Rives de Sèvres » (Deux-Sèvres department)

 
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