Pour le professeur Armelle Gentric, le propos est compris : bien vieillir doit s’apprendre dès l’enfance, tout au long de la vie. ” Nous vieillissons dès le jour où nous sommes conçus » se souvient le gériatre brestois. « La promotion de la santé ne concerne pas uniquement les professionnels de la santé. L’Éducation nationale devrait y participer pour que l’éducation à la santé soit enseignée très tôt à l’école. Mais on voit bien qu’avec le mode de vie actuel, l’addiction aux écrans et la sédentarité des jeunes, on va à l’encontre de ce que l’on souhaiterait. »
Les pathologies des personnes âgées sont la conséquence de l’accumulation de facteurs de risque dans le temps : être hypertendu à 30-40 ans quadruple le risque de maladie d’Alzheimer à 75 ans…
Être hypertendu entre 30 et 40 ans quadruple le risque de maladie d’Alzheimer à 75 ans
Des messages à repenser
Une autre question à considérer concerne les messages de prévention eux-mêmes. Comment les transmettre et avec quel contenu pour que les gens ne se sentent pas contraints ou coupables ? Il faut tenir compte du contexte environnemental, socioculturel, économique, etc. « Les messages de santé publique, lorsqu’ils sont diffusés verticalement, n’atteignent pas leur cible et ne modifient pas les comportements. Des recherches doivent être menées sur leur impact réel. Comment sont-ils reçus, intégrés et mis en œuvre dans la vie ? Quel vecteur de communication privilégier ? Nous avons besoin d’une réflexion globale avec toutes les parties prenantes, à commencer par les utilisateurs. »
Un exemple parlant est la prévention des chutes chez les personnes âgées, qui entraînent chaque année 130 000 hospitalisations et 12 000 décès. De nombreuses feuilles de route se sont concentrées sur ce sujet, depuis les recommandations de la HAS à destination des médecins généralistes de 2005 (qui préconisaient un dépistage annuel par une question sur l’historique des chutes dans l’année et le Lève-toi et teste go) jusqu’au récent plan national antichute pour les personnes âgées. qui visait à réduire de 20 % en trois ans les chutes mortelles ou entraînant une hospitalisation. Un objectif qui n’a pas été atteint. « Face à ce problème, les projets se succèdent et dans ma pratique rien ne change… Je vois arriver à l’hôpital des gens qui sont déjà tombés 3-4 fois auparavant, c’est désespéré », déplore le professeur Armelle Gentric.
Développer la formation
De même, « l’expérimentation du programme Icope pour identifier les facteurs de fragilité chez les seniors a montré les difficultés d’application dans la vie réelle des CPTS de Brest », elle regrette.
La Faculté de médecine et des sciences de la santé de Brest est pionnière dans ce domaine depuis 2017. Un service de Prévention Santé a été créé. L’objectif est de rassembler et former non seulement les professionnels de santé mais aussi tous les citoyens qui souhaitent s’impliquer dans la prévention et devenir acteurs de leur santé.
« Pour les professionnels de santé, le DU Prévention en santé initialement créé à Brest sera déployé en 2025 à Angers, Lille, Nantes et Rennes. Nous mettons également en place des formations courtes de prévention santé à destination du public » explique le professeur Armelle Gentric, qui multiplie les initiatives auprès des étudiants en médecine en formation initiale ainsi que des professionnels en formation continue.
Entretien avec le Professeur Armelle Gentric (CHU Brest)
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