Le rapport du coroner Bernard Lefrançois a été rendu public la semaine dernière. L’homme de 81 ans, que nous appellerons André*, est décédé l’an dernier des suites de brûlures combinées à l’inhalation de fumées toxiques.
André vivait dans la municipalité de Colombier, sur la Rive-Nord du Québec. Tard dans la matinée, le 11 novembre 2023, ses voisins ont vu de la fumée sortir de sa maison.
Un homme entre dans la maison malgré l’intense fumée pour secourir André, allongé au sol, incapable de se relever en raison de ses limitations.
Après plusieurs sorties dehors pour respirer, le voisin a réussi à faire sortir André de la maison avec l’aide d’autres personnes. L’incendie a causé d’importants dégâts à la résidence.
L’homme de 81 ans a été brûlé sur une grande partie du corps. Des manœuvres de réanimation lui ont été prodiguées avant l’arrivée des secours. André a ensuite été transporté au Centre local de services communautaires (CLSC) de Forestville où son décès a été constaté par un médecin.
Sa mort a été déclarée accidentelle par le coroner.
Hospitalisation
Tout d’abord, le coroner souligne que les services d’urgence ont mis du temps à se rendre à la maison d’André, puisqu’ils arrivaient de Forestville. La distance à parcourir jusqu’à Colombier explique la nécessaire intervention des voisins. Cet aspect n’est pas critiqué par le coroner.
Me Lefrançois a ensuite analysé les rapports de police et le dossier médical de la victime.
L’octogénaire souffrait de plusieurs problèmes de santé, notamment des troubles neurocognitifs, du diabète, de l’hypertension et de la dyspnée. André avait des problèmes de mémoire et pouvait avoir des hallucinations.
Il a également subi des chutes répétées en raison de ses problèmes de mobilité. Il vivait dans sa maison à Colombier avec sa compagne depuis plus de 50 ans. La femme assurait sa sécurité en l’aidant souvent à se relever. Elle appelait parfois les ambulanciers pour l’aider.
André a bénéficié d’une aide à domicile, offerte par le CLSC de Forestville. Des membres du personnel de santé sont venus à son domicile pour prendre des médicaments et prodiguer des soins d’hygiène notamment. La compagne d’André s’est occupée du reste, notamment en lui préparant à manger.
À l’été 2023, la conjointe fait part de son épuisement au personnel aidant. Elle se sentait surchargée ; André n’a pas toujours été coopératif pour recevoir des soins.
Le 21 octobre 2023, moins d’un mois avant son décès, l’homme de 81 ans a été transféré de force au centre hospitalier de Baie-Comeau après désorganisation. Il est resté hospitalisé pendant neuf jours.
Manque de communication
Durant la période d’hospitalisation, la compagne d’André a quitté le domicile familial pour être hébergée ailleurs, ne pouvant plus faire face à l’état de santé de sa compagne. Cette décision est également suggérée par les intervenants du dossier.
Le 30 octobre, André sort de l’hôpital. «La décision semble avoir été prise en considérant que sa compagne était à la maison alors qu’en réalité elle résidait ailleurs», écrit le coroner dans son rapport.
André continue donc de recevoir les soins du CLSC à domicile, mais vit désormais seul.
« Les proches de la victime n’étaient pas d’accord avec le personnel médical qui l’a libéré ; Ils considéraient qu’André n’était pas capable de prendre soin de lui-même et pouvait constituer un danger pour lui-même et pour les autres », souligne le coroner.
L’enquête policière montre que l’incendie s’est déclaré dans la cuisine, avec des fritures. Selon les témoins consultés, André avait l’habitude de cuire des aliments frits avec une poêle remplie d’huile, qu’il oubliait souvent sur le feu.
« Je considère que le dernier congé accordé à André après une hospitalisation de neuf jours, dans l’état où il se trouvait, et avec la perspective de rentrer seul ou même avec l’aide d’un conjoint incapable de le faire. supposer, était discutable», note Me Lefrançois.
Pas question de trouver un coupable
Dans le rapport, on rappelle que les coroners ne peuvent pas se prononcer sur la responsabilité civile ou pénale d’une personne lors d’une enquête. Aussi, les coroners n’ont pas la compétence pour juger de la qualité des actes posés par les professionnels de la santé.
L’objectif des enquêtes est de formuler des recommandations dans le but d’éviter des décès similaires et ainsi de sauver des vies humaines.
« André était-il vraiment capable de prendre soin de lui de manière adéquate et sécuritaire à son retour chez lui ? A-t-il obtenu les services requis dans les circonstances ?
Le coroner Me Lefrançois indique qu’il est important que le CISSS de la Côte-Nord fasse la lumière sur ces questions, afin d’éviter d’autres décès de personnes à la santé précaire. Le choix de maintenir André hospitalisé ou de le ramener à son domicile doit être analysé.
Le coroner recommande donc au CISSS, dont relève le centre hospitalier de Baie-Comeau, de revoir la qualité des soins prodigués aux défunts, en octobre 2023.
Il encourage également le CISSS à mettre en place des mesures pour améliorer la qualité des soins aux usagers et assurer la sécurité.
«Nous avons pris connaissance du rapport et un suivi au coroner sera fait dans les délais requis», note le CISSS de la Côte-Nord dans un courriel transmis au Soleil.
*Nom fictif
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