Le maintien dans l’emploi des personnes atteintes d’un cancer (comme le cancer du pancréas, du sein ou du col de l’utérus) est une question de société. La maladie affecte non seulement la vie personnelle, mais aussi la vie professionnelle. Cinq ans après le diagnostic, 20 % des patients auraient perdu leur emploi, notamment ceux les moins diplômés, ceux de plus de 50 ans et ceux ayant des contrats précaires. L’association SARA soutient les personnes touchées par cette maladie en facilitant les échanges entre patients, professionnels de santé et entreprises.
Le livre « Gai-rire : l’amitié dans la maladie » retrace le parcours de son auteur, Alexandra Jover et la création de l’association SARA, à Lyon. Il raconte l’histoire de Sarah, sa meilleure amie, tombée malade à 25 ans. Alexandra était à ses côtés, notamment lors de sa rechute, une expérience qui a marqué et influencé son propre parcours.
« Quand Sarah est tombée malade, j’étais dans une crise de sens dans mon travail de communication. J’ai ressenti un choc intense lorsqu’elle a annoncé son cancer”confie Alexandra. « Elle luttait contre la maladie, alors que j’étais en bonne santé mais malheureux dans mon travail. J’ai décidé de démissionner, de suivre une formation et de créer l’association.
Cancer au travail : quels enjeux pour le patient ?
Quelle est la principale difficulté pour une personne travaillant avec un cancer ?
Une des difficultés majeures est la perte des repères entre la fin du traitement et l’éventuel retour au travail. Pendant le traitement (comme un traitement de chimiothérapie), il existe un suivi médical. Mais à la fin, les médecins disent : “C’est fini, on se reverra dans trois mois.” » Cette rupture est déstabilisante et laisse les patients sans direction et avec une perte de confiance. Environ 63,5 % des patients conservent des séquelles cinq ans après le traitement.
Quels sont les effets secondaires les plus courants ?
Les effets secondaires les plus courants sont la fatigue chronique, qui ne disparaît pas avec le repos, et les problèmes cognitifs tels que la perte de mémoire et les difficultés de concentration. Ces symptômes compliquent forcément le retour au travail.
Que peuvent concrètement faire les entreprises pour faciliter le retour ?
Les entreprises peuvent apporter leur aide en gardant le contact avec le salarié dès l’annonce de la maladie, si celui-ci le souhaite. Ce contact régulier atténue la peur du retour. Ensuite, il est important de faire preuve d’empathie et d’écoute, car l’annonce d’un cancer peut aussi être un choc pour les collègues. Cela permet ensuite de mettre en œuvre des actions concrètes : organiser un rythme de travail adapté, réorganiser les tâches, etc.
Malheureusement, les entreprises ne sont pas prêtes à adopter cette approche. Il faut parfois beaucoup de chance pour trouver un employeur empathique. Tous les patrons ne sont pas à l’écoute, et nous accompagnons également les personnes en difficulté dans leur environnement de travail.
Cancer au travail : quelles solutions pour les patients ?
Quelles sont les bonnes pratiques pour accompagner un salarié en traitement ?
L’une des meilleures pratiques consiste à sensibiliser l’ensemble de l’entreprise aux impacts de la maladie, tant pour le salarié que pour l’organisation touchée par l’annonce et l’absence. Nous organisons des actions comme des conférences pour ouvrir le dialogue et montrer que l’entreprise est à l’écoute, levant ainsi les tabous, car aujourd’hui encore, une personne sur deux n’ose pas parler de son cancer au travail.
Lorsqu’une situation est identifiée, nous accompagnons individuellement le collaborateur et son manager et proposons des ateliers collectifs pour préparer le retour et gérer les émotions et les attentes de chacun.
Comment ces ateliers aident-ils l’équipe à soutenir un collègue malade ?
Les ateliers permettent à l’équipe de définir son rôle d’accompagnement du collègue concerné : qui souhaite avoir des nouvelles, qui souhaite s’impliquer davantage. Chacun peut exprimer ses émotions et voir comment il peut soutenir le collègue selon ses moyens.
Nous travaillons également individuellement avec le salarié sur la gestion des émotions et le rythme de travail (par exemple en cas d’horaires décalés), y compris des aménagements comme le temps partiel ou les horaires adaptés. Les tâches sont répertoriées en fonction des contraintes du poste et, avec le médecin du travail, nous ajustons ce qu’il peut accomplir en fonction de sa condition physique. Cette liste, révisée régulièrement, sert de guide pour équilibrer les attentes.
Quels conseils donneriez-vous pour concilier santé et travail après un cancer ?
L’essentiel est de s’écouter. Le travail peut apporter des choses positives, mais il faut savoir quand recommencer. Pour certains, travailler pendant une cure est bénéfique, pour d’autres, une pause est nécessaire, pouvant même conduire à un changement de carrière.
À SAVOIR
Les Rencontres Cancer & Travail ont été organisées jeudi 14 novembre par l’association SARA : elles visent à briser les tabous et à favoriser l’inclusion des patients dans le monde professionnel, en réunissant experts et personnes concernées pour discuter de solutions concrètes.
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